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L’esprit de Sankara flotte toujours sur la jeunesse burkinabè
Publié le samedi 15 novembre 2014  |  AFP
27e
© aOuaga.com par G.S
27e anniversaire du 15-Octobre : une commémoration sous le signe de l`unité
Mercredi 15 octobre 2014. Ouagadougou. Les héritiers politiques du président Thomas Sankara sont allés déposer à l`unisson une gerbe de fleurs sur sa tombe dans le cadre de la commémoration du 27e anniversaire de son assassinat le 15 octobre 1987




Ouagadougou - "A la tête de la manifestation qui a pris le 30 octobre l'Assemblée nationale, on avait un commandant invisible qui s'appelait Thomas Sankara", assure Souleymane "Soul" Ouédraogo, un des animateurs du "Balai citoyen", mouvement à la pointe de l'insurrection
burkinabè.

Vingt-sept ans après son renversement par son "frère d'armes" Blaise Compaoré et son probable assassinat, l'esprit du président iconoclaste et révolutionnaire, qui transforma la Haute-Volta, nom colonial, en Burkina Faso ("Pays des hommes intègres"), a flotté sur les manifestations qui ont chassé fin octobre le président Compaoré.

Quand les manifestants forcent les barrages de police qui empêchent l'accès vers l'Assemblée nationale, à Ouagadougou, le 30 octobre, ils scandent "Seule la lutte libère!" - paroles lancées par Sankara à l'Assemblée générale de l'ONU - ou chantent "La Patrie ou la mort, nous vaincrons!", extrait du Ditanyé, l'hymne burkinabè dont il écrivit les paroles.

Ils rebaptisent aussi la "Place de la Nation", haut-lieu de la contestation, "Place de la Révolution", comme elle s'appelait sous la révolution sankariste.

Thomas Sankara ou le chantre de l'humilité dans l'imaginaire collectif burkinabè. Durant ses quatre années au pouvoir, ce "Che" sahélien préféra une petite Renault aux luxueuses limousines, une humble demeure aux ors d'un palais.

Au Burkina, 72% de la population est âgée de moins de 30 ans et n'a donc pas connu son époque. Ossature des cortèges, ces jeunes étaient pourtant nombreux à se revendiquer de son héritage.

Ils ont entendu parler de Sankara "à l'intérieur" du pays "et surtout à l'extérieur, où il est une idole", explique Fernand Sanou, sociologue à Ouagadougou, rappelant que de nombreux Burkinabè vivent dans les pays alentours.

"Sur internet, ils apprennent l'idéal Sankara, le mythe Sankara. Les jeunes rêvent de cette dynamique-là, indépendance et probité", l'inverse exact du régime Compaoré, poursuit-il. Et d'ajouter : "les frustrations, le fait de voir le pays dériver, a fait idéaliser Thomas Sankara et l'époque révolutionnaire".

Sa lutte contre la corruption, qui aboutit au renvoi de certains fonctionnaires, lui attira la sympathie populaire. Mais elle généra des haines tenaces.

Les Comités de défense de la révolution, organes locaux qu'il instaura et qui permirent des progrès dans la santé et l'éducation, selon ses biographes, sont également accusés d'exactions.

- Aucun mausolée -

Mais à Ouagadougou, depuis 27 ans, aucun bâtiment ou édifice ne porte le nom de cette figure de l'anti-impérialisme et du panafricanisme, morte à 37 ans. Seule existe une "Avenue du Capitaine Thomas Sankara", baptisée en 2005, en même temps que celles portant les noms des quatre autres anciens chefs de l'Etat du pays.

Aucun mausolée ni monument à sa mémoire. Sankara, héros et icône de
nombreux Africains, repose dans un cimetière envahi d'herbes sèches, dans une
tombe modeste, peinte aux couleurs du Burkina par ses partisans.
Derrière, douze sépultures blanches abritent ses compagnons et gardes du
corps tombés avec lui le 15 octobre 1987, lors du putsch mené par Blaise
Compaoré, qui dès lors chercha à effacer le crime originel.
Aucune enquête n'a été menée sur les causes de sa mort, officiellement
"naturelle", même si beaucoup y voient la main de Blaise Compaoré, ce que
l'intéressé a toujours nié.
"Le régime qui l'a assassiné et renversé a cherché à effacer sa mémoire. On
a falsifié l'histoire du Burkina", explique Jonas Hien, président de la
Fondation Thomas Sankara.
Les écoliers n'ont pas de cours spécifique sur Sankara et sa révolution,
qui entre 1983 et 1987 allait profondément changer le pays et les
"mentalités", selon lui. L'essentiel des archives de la radio-télévision
nationale sur Sankara, tribun passionné peu partisan des circonvolutions, a
disparu.
Mais, au Burkina, "la mémoire de Sankara est toujours vive", assure Jonas
Hien. Chaque année, l'anniversaire de sa mort est l'occasion de projections,
de débats. Des artistes mettent ses paroles en musique.
Longtemps après sa mort, "les gens continuaient de parler de Sankara dans
les familles, rappelle-t-il. Quand ça n'allait pas du tout (dans le pays), les
gens comparaient avec l'époque de Thomas Sankara", parfois perçue aujourd'hui
comme un âge d'or en dépit des "ratés" de la révolution.
Blaise Compaoré "a essayé d'effacer Thomas Sankara de la mémoire
collective" mais "Thomas Sankara n'est jamais vraiment mort", assure "Soul",
42 ans, figure historique du rap burkinabè et l'un des responsables du Balai
citoyen.
"Ses idées sont restées, on s'est nourri de tout ça et c'est ce qui
alimente notre rejet de l'homme Compaoré et de son régime", poursuit-il.
Après 27 ans d'oubli officiel, l'idole reprend finalement vie. "La jeunesse
burkinabè a réhabilité Thomas Sankara", a réagi sa veuve Mariam Sankara, après
la fuite de Blaise Compaoré.

ayv/jf/mw
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