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PDP/PS : Comment un parti historique se meurt vendredi 14 décembre 2012
Publié le samedi 15 decembre 2012   |  Autre presse


Ousmane
© Autre presse par DR
Ousmane Ouédraogo, chargé des élections de l’UNIR/PS et Denis Ouédraogo, secrétaire politique du PDP/PS Valident les candidatures aux élections


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Le Professeur Ki-Zerbo a-t-il été enterré avec son parti en décembre 2006 ? Depuis sa mort, rien ne va plus dans sa formation politique. Les querelles enfouies ont refait surface conduisant à des multiples fractionnements et démissions. Aujourd’hui, le parti n’est que l’ombre de lui-même. A l’évidence, le parti n’a pas su négocier certains virages historiques.

Un parti qui suspend son président à un mois des consultations importantes, c’est suffisamment rare pour ne pas attirer l’attention. Surtout si ce parti s’appelle PDP/PS, première force politique de l’opposition il y a seulement dix ans. Ainsi donc, le président François Kaboré est suspendu de son poste pour six mois. L’acte est assez grave pour un parti en compétition pour des élections majeures (législatives et municipales couplées du 2 décembre). Mais pour ceux qui suivent l’évolution de ce parti, ce n’est pas une grande surprise. On pourrait dire que le parti poursuit sa trajectoire amorcée depuis 2002, c’est-à-dire la courbe descendante vers les abîmes. Plusieurs raisons expliquent le déclin de ce parti.

Le Parti pour la démocratie et le progrès/Parti socialiste (PDP/PS) traîne sa maladie depuis au moins une décennie. Le premier virage auquel le parti n’a pas su négocier, c’est celui du renouvellement de sa direction politique entre 1996 et 2000. Le parti avait le vent en poupe à cette période. Il aurait fallu un petit coup de barre vers le rajeunissement du bureau politique pour donner au parti un nouveau souffle, un dynamisme dont il avait besoin pour affronter le nouveau contexte politique marqué par la naissance du méga parti, le CDP. Le PDP avait les atouts et les moyens politiques de faire face à ce parti. D’abord son atout principal, c’était d’avoir réussi à rassembler autour de lui des cadres politiques pétris d’expérience.

De sa base MLN et FPV, le parti s’était renforcé avec l’arrivée des cadors de la révolution. Etienne Traoré, Alain Zoubga, Sébastien Zabsonré, Emile Paré et autres. On se rappelle qu’en 1996, l’Union de la gauche burkinabè qui regroupait certaines de ces personnalités avait fusionné dans le PDP. Sans oublier François Wendlassida Ouédraogo qui avait un véritable fief dans le Passoré où il s’est fait élire deux fois et Alain Nindawa Sawadogo, le rescapé du PTB, le parti d’Oumarou Clément Ouédraogo. Avec une telle brochette de cadres politiques, la vieille garde du parti aurait dû se mettre en retrait et confier la direction à ces « jeunes » plus aptes, à l’époque, à comprendre les mutations en cours.

Le Professeur Ki-Zerbo, président d’honneur, allait continuer à influencer le parti de par sa caution intellectuelle et morale. Comme on le sait, cette option du rajeunissement n’a pas prospéré, les vieux ont continué à être au-devant de la scène et même dans l’arrière cours. Cela a fini par cristalliser les tensions et polariser les débats autour de cette question de renouvellement de générations.

Le parti n’a rien tiré de la lutte du Collectif

Le deuxième virage raté par le PDP/PS, c’est lors de la lutte du Collectif contre l’impunité suite à l’assassinat du directeur de publication de L’Indépendant, Norbert Zongo. Le PDP/PS n’a pas beaucoup tiré avantage de cette lutte. En voulant jouer consensus à tout prix avec la composante droits de l’homme et syndicats du regroupement, le principal parti de l’opposition a oublié de faire avancer des revendications purement politiques. C’est ce que vont d’ailleurs lui reprocher avec raison certains partis du G-14 comme l’ADF/RDA et la CPS qui finiront par claquer la porte du Collectif. Cette logique du compagnonnage forcé avec l’aile « dure » du Collectif poussera le parti à boycotter les élections municipales de septembre 2000 alors qu’une base non négligeable du parti poussait à la participation, convaincue de la victoire du parti dans beaucoup de communes.

Ce boycott, mal vécu par de nombreux militants, a fait le lit des dissensions dans les instances du parti au plus haut niveau. Les querelles de positionnement pour les législatives de mai 2002 ont fait le reste. Le coup le plus dur viendra de là où on s’attendait le moins. Emile Paré, siégeant à l’Assemblée nationale par la grâce du Professeur qui lui a cédé sa place, va contester son positionnement sur la liste du Nayala. Il voulait la tête de liste à la place de Ki-Zerbo lui-même qu’il aurait préféré voir sur la liste nationale. Pour se faire entendre, il organise une marche de ses partisans sur le domicile du président du parti et convoque la presse avant de claquer la porte du parti. Une véritable catastrophe médiatique pour le parti. Son porte-parole de fait qui démissionne à quelques semaines du scrutin, cela ne fait pas bon signe. Résultat des courses, le PDP/PS perd sa place de deuxième force politique du pays et de première force politique de l’opposition.

Malgré cette demi-performance, le PDP/PS restait un parti crédible sur la scène politique, surtout que l’ADF/RDA n’a pas su également tiré parti de sa bonne performance lors des législatives, tiraillée qu’elle est entre deux clans. Celui de Gilbert Ouédraogo plus conciliant avec le pouvoir et Hermann Yaméogo qui voulait enfiler la tunique du chef de file de l’opposition. Les lignes de clivage se situant sur la participation ou non du parti au gouvernement et son positionnement par rapport à la crise ivoirienne, Hermann a été exclu parce que jugé trop radical par l’autre clan. Ce fractionnement des libéraux redonnait aux socialistes du PDP leur place d’antan. Mais les querelles ne faisaient que se multiplier suivies de démissions de ténors du parti. Quand le vieux s’est résolu à donner le témoin, c’est à un vieux compagnon que revient le bâton de commandement, le Professeur Ali Lankoandé. C’est lui qui défendra les couleurs du parti lors de la présidentielle de novembre 2005 avec un score catastrophique de 2%. En positionnant le Professeur Lankoandé à la tête du parti et à la présidentielle, le parti a pris le risque de renforcer son image de « parti de papy » dans un pays où 75% de la population a moins de 35 ans. Le renouvellement de génération ne s’est pas fait jusqu’à la mort du Professeur en décembre 2006.

Comme s’ils n’attendaient que ça pour se sauver, la mort de Ki-Zerbo va en tout cas accélérer la saignée du parti. Alain Zoubga créé L’Autre Burkina, Etienne Traoré fonde le Faso Metba. C’est dans ce contexte que Ali Lankoandé cède le parti à François Kaboré, alors inconnu dans le landernau politique national. Le parti devient presqu’une coquille vide au niveau de ses cadres. Ceux qui sont restés sont également en dissidence avec leur direction à l’image de Ouerem. Le groupe de Dima de Boussouma (Francois Wendlassida, Nindawa et autres) quitte le parti pour mettre sur les fonts baptismaux le RDS.

Ki-Zerbo, un poids sur le parti ?

A la lumière de ces nombreuses démissions en l’espace d’une décennie, on pourrait dire que l’atout principal du parti s’est révélé être son véritable talon d’Achille, à savoir la forte identification du parti à son fondateur. Si au début du renouveau démocratique, cette personnification était bénéfique dans la mesure où il mettait son charisme et son aura au service du parti, elle est devenue au fil des années un handicap majeur. De 1993 à 2004, le PDP, c’est Ki-Zerbo, au propre comme au figuré. Ses ex-camarades lui reprochent de n’avoir pas mis ses nombreux contacts au service du parti. De son vivant, cette critique était faite en sourdine et même aujourd’hui, c’est sur les lèvres qu’on la murmure. Appartenant à l’International socialiste, le PDP/PS ne participe pratiquement plus à aucune rencontre de ce regroupement et n’est invité aux congrès de ses pairs.

C’est comme si le parti n’existait plus après son fondateur. C’est une des limites de l’homme politique, mais la faute incombe plus à ses camarades qui n’ont pas su assurer convenablement la relève. Ki-Zerbo écrasait de son charisme et de son aura tous ses camarades. Ce n’est pas étonnant que de son vivant, surtout durant toute la décennie 90, le PDP a toujours été la première force politique de l’opposition. C’était même le deuxième parti du pays après celui au pouvoir (la deuxième force politique n’est pas toujours le principal parti de l’opposition, c’est le cas depuis 2003). Il faut rappeler que Ki-Zerbo, bien que n’ayant jamais présidé la CNPP/PSD, a été son inspirateur, son âme. De son exil dakarois, il a fortement participé à la structuration de ce parti en mettant à sa disposition ses vieux réseaux du MLN et du FPV.

Ce qui a permis à la CNPP/PSD de se hisser à la deuxième place lors des premières élections législatives de mai 1992 en engrangeant douze (12) sièges. C’est avec le PDP que l’identification sera la plus forte. Créé à son retour d’exil en 1993, le PDP va s’illustrer comme la véritable force d’opposition à l’Assemblée nationale avec un groupe parlementaire homogène de 1997 à 2002. Aux législatives suivantes (mai 2007), le parti perd ses sièges dans l’ancien fief de son fondateur (le Nayala), dans le Houet où il s’en sortait relativement bien et dans la capitale Ouagadougou. Il n’a pu sauver que le siège du Dima dans le Sanmatenga et d’Etienne Traoré dans la Kossi. Avec la démission de ces derniers, le parti se retrouve sans siège à l’Assemblée (ils sont partis avant l’adoption de la loi sur le nomadisme en 2009). La présidentielle de novembre 2010 a enfoncé davantage le parti. Son président candidat est sorti bon dernier avec un score minable de moins 1% de l’électorat. Il a récolté ce qu’il a semé car il n’a pratiquement pas battu campagne.

Les suspicions ont alors commencé à faire jour sur l’utilisation de l’argent de la subvention. Le positionnement de ses proches parents (sa femme et ses cousins) sur les listes électorales pour les élections couplées et son insistance à aller avec le MPA ont été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Le parti se retrouve sans président pour six mois. Cette crise permettra-t-elle aux dirigeants du parti de revoir de fond en comble le fonctionnement du parti ? C’est le défi auquel doivent faire face tous ceux qui croient encore que le PDP/PS peut compter sur l’échiquier politique national. Sinon s’il rate cette occasion, on craint fort que ce ne soit le dernier virage vers le déclin définitif.

Abdoulaye Ly

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