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Le dividende démographique est une fenêtre d’opportunités
Publié le samedi 13 septembre 2014  |  Sidwaya
Avortement
© aOuaga.com par Séni Dabo
Avortement au Burkina : une étude fait l`état des lieux
Mercredi 12 février 2014. Ouagadougou. L`Institut supérieur des sciences de la population (ISSP) de l`Université de Ouagadougou a animé une conférence de presse pour présenter une étude sur l`état des lieux de l`avortement au Burkina. Photo : Dr Jean François Kobiané, directeur de l`ISSP




En prélude à l’atelier international de formation sur le dividende démographique en Afrique prévu du 15 au 24 septembre 2014 à Ouagadougou, le directeur de l’ISSP, Jean-François Kobiané, président de l’Union pour l’étude de la population africaine explique dans cet entretien accordé à Sidwaya 96 heures plus tôt, le concept de dividende démographique et les conditions à remplir pour qu’il soit un levier pour le développement.

Sidwaya (S) : Qu’entendons-nous par dividende démographique ?

Jean-François Kobiané (JFK) : L’Afrique traverse en ce moment l’une des périodes les plus critiques de son évolution démographique caractérisée par une croissance rapide de sa population du fait que la mortalité ait baissé dès la fin des années 50 et que la fécondité elle, met du temps à le faire. C’est ce qu’on appelle la phase pré transitionnelle de la baisse de la fécondité qui va elle aussi à un moment baisser au regard des tendances actuelles. Selon les projections démographiques de la division des populations des Nations unies, si ce cap est maintenu, la transition s’opérera pour les pays africains au sud du Sahara dans 30 voire 40 ans. Cela veut dire que le dividende démographique va également prendre ce temps pour s’opérer.
Le dividende démographique est une fenêtre d’opportunités qui se présente à un moment donné de l’histoire d’un pays. Il pourrait être défini comme un coup de pouce historique que l’évolution démographique permet de donner au développement d’un pays à travers le changement de la structuration par âges de sa population. Ceci, en ce sens que dans les pays africains ou la population jeune est très élevée, le rapport actuel entre la population d’âge actif et celle dépendante est en défaveur du premier groupe.
Un individu de la population d’âge actif ayant en moyenne à sa charge plus d’une personne. Lorsque le changement se fera et que le rapport sera inversé, il va se présenter une situation favorable d’un point de vue économique. Sur le plan historique, c’est cette opportunité que des pays asiatiques tels que la Corée du sud, Singapour ou Taïwan ont su anticiper en mettant en place des politiques sociales fortes centrées sur l’Homme se rapportant à l’éducation, la formation et l’emploi.
Dans ce sens il faut noter un engouement depuis quelques années aussi bien des scientifiques que des décideurs pour présenter ce changement (dividende) démographique comme une opportunité de l’émergence africaine.

S : Est-ce à dire que la population africaine actuelle et notamment celle du burkinabe constitue un frein au développement ?

JFK : Le rythme d’évolution de la population burkinabè est très élevé si nous nous referons aux résultats du dernier recensement : 3% de taux de croissance entre 1996 et 2006. Le problème ne réside cependant pas dans la taille de la population mais plutôt dans son rythme d’évolution. Surtout si le rythme de production des richesses rapporté à la population est relativement plus faible que celui de la croissance de cette population. Un rythme qui fait qu’il y a chaque année une forte demande sociale. Toute chose qui sous-entend un investissement au plan économique plus important. Certains pays comme la Chine ou la Tunisie ont fait le choix des politiques volontaristes de limitation des naissances qui ont précipité cette transition. D’autres par contre ont préféré laisser les changements sociaux en termes d’éducation par exemple faire leurs effets avec le temps. La question est de savoir ce qu’on fait du point de vue politique pour anticiper ces changements.
S: Comment faut-il alors s’y prendre pour que ce changement puisse bénéficier à l’ensemble de la population ?

JFK : Lorsque nous disons que la fenêtre d’opportunités va se présenter pour certains pays dans 20 ou 30 ans il faut savoir qu’actuellement, bien que nous n’ayons pas encore atteint le maximum de la demande en matière d’éducation les défis sont déjà là. La question de l’emploi se pose alors que nous ne sommes pas encore à ce stade où le rapport change avec une population beaucoup plus active. C’est dire que c’est dès à présent qu’il faut agir en investissant dans les secteurs clés que sont l’éducation, la santé, l’emploi mais aussi la gouvernance pour bénéficier de cette opportunité le moment venu.

S: En quoi va consister l’atelier qui s’ouvre le 15 septembre prochain ?

JFK : L’atelier comporte une dimension formation et une autre consacrée à la restitution de résultats. Le réseau (Ndlr : celui des chercheurs) a entrepris depuis plus d’un an une série de travaux sur le dividende démographique en Afrique qui peut s’examiner à l’aune de plusieurs facteurs ou secteurs sociaux parmi lesquels celui scolaire. On peut ainsi examiner les mesures dans lesquelles on peut avoir le dividende scolaire ou encore sanitaire, etc. Il s’agira de voir avec le changement le bonus que cela aurait en termes d’investissements dans la scolarisation des enfants. On peut affiner ce dividende démographique et savoir sur quel horizon temporel il va s’implanter dans les différents pays. Le premier travail qui a été effectué par le réseau a porté sur ce dividende. Les premiers résultats ont été présentés à Yaoundé en début d’avril dernier et la restitution de ces résultats sera faite au cours de cet atelier.La formation elle, s’adresse aux nouveaux membres du réseau afin de leur permettre d’avoir les techniques de base qu’il faut pour analyser le dividende démographique. Parce qu’à la longue notre ambition est de produire plusieurs ouvrages mais aussi des documents synthétiques destinés au large public.

(S) : Il est prévu en marge de l’atelier des échanges avec les Parlementaires burkinabè, quel est l’intérêt d’une telle rencontre?

JFK : Depuis maintenant deux ans, il y a un intérêt pour ces questions qui va au-delà du domaine scientifique. Les élus s’y intéressent beaucoup plus à travers le monde. Récemment le réseau des Parlementaires en population et développement du Burkina a organisé dans ce sens une journée pour présenter les différents engagements qui ont été pris dans le domaine de la population d’une manière générale. Et on voit clairement apparaitre dans ces engagements la nécessité de saisir le dividende démographique comme une opportunité pour pouvoir enclencher le développement.
Pour répondre à leur souhait de saisir les contours de ce concept, nous avons proposé au réseau de profiter d’une demi-journée pour leur présenter encore une fois le dividende démographique, l’expérience d’autres pays, la situation du Burkina. Nous leur présenterons également les résultats sur le dividende scolaire. Il est très important que de plus en plus les chercheurs et les décideurs travaillent ensemble et que nous puissions mettre à leur disposition des résultats probants de nos recherches pour leur permettre de jouer leur rôle de veille par rapport à l’exécutif dans les différents pays africains.

Propos recueillis par
Voro KORAHIRE
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