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Limitation du mandat presidentiel au Benin: La Cour constitutionnelle sanctionne le « griotisme » d’un ministre et met fin aux débats sur la modification de la Constitution
Publié le mardi 26 aout 2014  |  Le Quotidien




Saisie de deux recours en inconstitutionnalité formés par des citoyens béninois contre des propos publics du ministre de l’Agriculture, de l’Elevage et de la Pêche les 21 et 22 juillet 2014, la Cour constitutionnelle a rendu sa décision le 19 août dernier. Elle confirme la démarche traditionnelle du juge constitutionnel béninois jaloux de son indépendance et qui, à chaque saisine, réitère son attachement aux valeurs démocratiques et de l’Etat de droit prescrites par la Constitution du 11 décembre 1990. Encore une fois, le Dahomey, régulièrement cité comme un modèle de démocratie dans l’ancienne AOF donne une leçon d’indépendance judiciaire. «Si le peuple veut que le Président Yayi Boni fasse un troisième mandat, pourquoi pas ? (...) C’est le peuple qui décide et c’est le peuple qui vote pour son chef ». En faisant une telle déclaration sur la chaine de télévision béninoise Canal 3, au cours de l’émission « Zone Franche » du 20 juillet 2014, le ministre de l’Agriculture, de l’Elevage et de la pêche, Amadou Djibril Fatouma semblait rendre un bon service à celui qui l’a gratifié de son portefeuille dont elle jouit depuis des années. Mais elle était loin d’imaginer que des citoyens épris de la stabilité et des institutions de leur pays, et habilité à saisir la Cour constitutionnelle (contrairement à la loi organique N°11 2000 du 27 avril du Burkina qui limite le recours au président du Faso, au Premier ministre au 1/5e au moins de l’Assemblée nationale) l’entraineraient devant la Cour constitutionnelle qui la confondra et la condamnera sans ménagement. « Il échet pour la Cour de dire et juger que Madame Fatouma Amadou Djibril, ministre de l’Agriculture, de l’Elevage et de la Pêche, a, dans ses propos tenus au cours de l’émission « Zone Franche » du 20 juillet 2014 sur la chaîne de Télévision Canal 3, violé les articles 34, 42 et 124 ». Telle a été la substantifique moelle de la décision du juge constitutionnel béninois qui a du coup rappelé à tous les citoyens que l’article 42 de la Constitution portant limitation du mandat présidentiel et l’article 34 prescrivant à la charge des personnes investies de fonctions publiques ou élues des devoirs de conscience, de compétence, de probité, de dévouement et de loyauté dans l’intérêt et le respect du bien commun. Quant à l’article 124, elle rappelle que les décisions de la Cour constitutionnelle sont insusceptibles de recours et s’imposent à tous les pouvoirs publics, aux autorités civiles, militaires et juridictionnelles. Mais résumons les faits. Invitée à l’émission « Zone franche », le 20 juillet 2014 pour parler des questions paysannes, le ministre de l’Agriculture de l’élevage et de la pêche, Amadou Djibril Fatouma en prenant l’exemple du président Franclin Roosevelt qui a plus de mandat que ce qui était prévu, parque sollicité par le peuple, a implicitement confirmé des rumeurs qui faisaient état de manœuvres en préparation pour donner l’impression que le peuple requerrait un troisième mandat de Yayi. Le 21 juillet, un citoyen béninois, Jean-Claude Dossa saisissait la Cour constitutionnelle, afin d’obtenir d’elle la condamnation des propos du ministre qu’il juge attentatoire à l’article 42 de la Constitution, naquit de la Conférence nationale des forces vives de février 1990. Depuis, le 20 octobre 2011, le Conseil constitutionnel béninois a rangé la limitation des mandats présidentiels dans un bloc intangible qu’il a appelé « options fondamentales du peuple ». Le 22 juillet 2014, un autre citoyen sortait de sa réserve pour appeler la Cour constitutionnelle a condamné ce qu’il qualifie d’attentatoire au préambule même de la Constitution. Préambule qui précise l’orientation politique de la Conférence nationale de février 1990, pierre angulaire de la démocratie béninoise. Mais les déboires du ministre « griot », ne faisait que commencer. En effet, le 21 juillet, sur une autre chaine, ORTB, c’est son collègue ministre, François Adébayo Abiola qui la faisait passer sous les fourches caudines en déclarant que la ministre Amadou Djibril Fatouma s’était laissé aller, et que personne ne lui avait demandé de faire de telles déclarations. La servante de Yayi aura fait des mains et des pieds pour expliquer que son intention n’était pas d’inciter le peuple à un coup d’état constitutionnel, la Cour l’a sans ambages accablés. « (…)eu égard à tout ce qui précède, il échet pour la Cour de dire et juger que Madame Amadou Djibril, ministre de l’Agriculture, de l’Elevage et de la Pêche, a, dans ses propos tenus au cours de l’émission « Zone Franche » du 20 juillet 2014 sur la chaîne de Télévision Canal 3, violé les articles 34, 42 et 124 précités de la Constitution », a tranché la glaive politique. La Cour a surtout rappelé que la volonté du peuple dont la ministre évoque est déjà contenue dans la Constitution et il parait donc superfétatoire de la sollicité par voie référendaire. Il faut observer que depuis 1990, tous les chefs d’Etat ont respecté le mandat présidentiel et il était inconcevable que la Cour permette un recule démocratique en tordant le coup à l’alternance. Cette décision rendue le 19 août dernier impose au régime Yayi d’en tirer toutes les conséquences. On dirait que dans des cieux asiatiques, le ministre griot rendrait sa démission de sa propre initiative, mais on est en Afrique. Dans un contexte géopolitique marqué par des velléités de tripatouillage de la Constitution et par conséquent de manœuvres peu orthodoxe visant à instituer des pouvoirs personnels et à vie, la Cour constitutionnelle béninoise vient encore offrir « des leçons » en droit constitutionnel comparé. En tout cas voici à quoi l’on peut s’attendre quant, on s’exhibe, sans mandat pour inciter le premier président à enfreindre aux règles démocratiques, fusse-t-on ministre ou flagorneur d’un potentat 1

Par Roger Melchisédech KABRE
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