Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Femmes    Pratique    Burkina Faso    Publicité
NEWS
Comment

Accueil
News
Politique
Article



 Titrologie



L`Observateur Paalga N° 8584 du 21/3/2014

Abonnez vous aux journaux  -  Voir la Titrologie

  Sondage



 Nous suivre

Nos réseaux sociaux



 Autres articles


Comment



Politique

Municipales partielles : François et l’écureuil de Tanghin
Publié le samedi 22 mars 2014   |  L`Observateur Paalga


François
© Autre presse par DR
François Compaoré secrétaire national du Congrès pour la démocratie et le progrès CDP


 Vos outils




Imposition d’un bureau, désobéissance de certains conseillers, manifestations publiques, organisation de résistances, voilà le feuilleton digne de Metrepolitan film export que des camarades politiques d’hier ont servi à l’arrondissement n°4 de Ouagadougou pendant plus d’une année. D’un côté Issa Anatole Bonkoungou, qui ne voulait pas laisser sa chance lui échapper, et de l’autre, les bonzes du CDP qui tenaient à sanctionner «l’indiscipliné» pour l’exemple. C’était sans compter avec l’intervention de l’électorat qui a donné quitus à Anatole et à son équipe le 23 février lors des élections partielles. Avec sa réélection à la tête du conseil le 18 mars 2014, on peut revisionner ce film d’action pour voir qui est sorti perdant dans ce western, heureusement sans coup de feu.


Premier épisode. 2 décembre 2012, élections couplées sur toute l’étendue du territoire burkinabè. Avant la fin de la journée, des éléments de l’opposition dénoncent des irrégularités et portent plainte les jours suivants devant le Tribunal administratif de Ouagadougou.

Deuxième épisode. Mercredi 12 décembre 2012, annulation des résultats de l’arrondissement 4 par décision 18/2012 rendue par le Tribunal, suivie de l’attaque et de la défaite à nouveau du CDP.

Troisième épisode. Le 17 février 2013, reprise des élections dans l’arrondissement 4 de Ouagadougou. Le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) gagne 14 sièges contre 6 pour les autres formations politiques.

Quatrième épisode. Le 6 mars 2013, élection du bureau du conseil municipal dudit arrondissement avec, à sa tête, Issa Anatole Bonkoungou, alors que la veille, les patrons du CDP avaient désigné Modeste Compaoré comme successeur de Zakaria Sawadogo. Cette élection sera suivie de manifestations de ceux qui sont contre Anatole, entraînant un retard de l’installation du bureau.

Cinquième épisode. Le 7 mars, le secrétaire exécutif national du Parti, Assimi Kouanda, signe le décret de suspension du «Camarade Anatole Issa Bonkoungou, secrétaire à l’organisation et à l’administration de la sous-section de l’arrondissement n° 4 de la commune de Ouagadougou de tous les organes, instances et structures du parti pour indiscipline et manquements graves aux principes fondamentaux du CDP».
Sixième épisode. Mercredi 27 novembre 2013, dissolution des conseils municipaux par décret pris en Conseil des ministres dans 7 localités dont l’arrondissement numéro 4 de Ouagadougou. Cette décision gouvernementale occasionne des protestations de la part des pro - Anatole pendant plusieurs jours.

Septième épisode. Le 23 février 2014, élections municipales partielles dans les arrondissements concernés. Anatole, parti entre-temps à l’ODT, rafle 14 sièges de conseillers contre 5 au CDP et 1 pour le Faso Autrement.

Huitième épisode. le 18 mars 2014, Anatole Bonkoungou est réélu maire, cette fois avec 15 voix contre 11 le 6 mars 2013.

Maintenant que l’ancien-nouveau bourgmestre, vient de retrouver de la plus belle des manières son fauteuil, on peut rediffuser le film pour voir qui est le grand perdant dans cette épopée.

1 - Zakaria Sawadogo ? Ex-maire de l’arrondissement, il fut le seul opposant en son temps de la Convention nationale des patriotes progressiste, Parti démocrate socialiste (CNPP/PSD), à être élu conseiller de Tanghin, secteur 23, contre 5 de l’Organisation pour la démocratie populaire /Mouvement du travail (ODPMT), aux élections municipales du 11 février 1995. A la faveur de la création du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) en mars 1996, il entre dans le cercle restreint des plus proches collaborateurs du secrétaire de la sous-section de ce parti à Nongr-Maasom et en même temps maire, Dieudonné Marie Compaoré.

C’est ainsi qu’il va vite se faire une place au soleil en succédant à son mentor, à la tête de l’arrondissement, pendant 12 ans (2002-2012) au détriment des ex-Odpmtistes devenus ses adversaires politiques depuis 2010. Mieux, il est élu deuxième adjoint au maire de Ouagadougou le 11 mars 2013. Quand on lit son parcours, de l’opposition à la majorité, et les avantages qu’il a eus pendant son exercice, lui qui traîne une réputation sulfureuse et qu’on accable volontiers de tous les péchés de l’arrondissement, il n’est pas, malgré tout, le grand perdant.

2 - Modeste Compaoré ? Candidat officiel du parti au poste de maire le 6 mars 2013, il est battu à la régulière par Anatole Bonkoungou, candidat autoproclamé. Depuis sa défaite, l’homme est resté calme, même pendant les manifestations organisées en sa faveur. Il a gardé espoir jusqu’au 23 février dernier. On ne peut pas le considérer comme le grand perdant étant donné qu’il n’était pas maître de son destin pendant la lutte pour la conquête de la mairie. Il peut toujours revenir pour le travail.

3 - Congo née Alizèta Sané ? Pressentie pour être la première adjointe de Modeste, elle a multiplié les actions pour que ce dernier récupère son fauteuil, mais en vain. Considérée comme la plus proche collaboratrice de Zakaria, beaucoup la trouvent battante et disent qu’elle pourrait toujours tirer son épingle du jeu, même sans son poste de conseillère municipale qu’elle a perdu le 23 février .

4 - Ambroise Tapsoba ? Le premier à démissionner du bureau d’Anatole le 10 mars pour être dans la dynamique du parti, même si les mauvaises langues disent qu’il n’avait pas d’autre choix. En effet, Ambroise est connu comme un grand ami et compagnon de lutte d’Anatole Bonkoungou depuis de longues années, mais il ne pouvait pas nager à contre-courant des bonzes du parti qui font et défont tant les carrières. Arrivé quatrième le 17 février 2013 sur la liste du CDP, il vient de perdre sa place avec la reprise des élections. Mais entre ce qu’il gagne dans ses activités d’animation et de traduction dans les cérémonies organisées par le pouvoir et les avantages d’un conseiller municipal, c’est le jour et la nuit. Ce savanarole du mooré gagnerait donc à être dans le camp des premiers responsables du pouvoir.

5 - Bibata Kalmogo ? Première adjointe au maire dans le bureau d’Anatole, on la range dans le camp des rebelles, et de ce fait elle a subi également la pression. Mais elle est restée sereine. Elle aussi vient de récupérer son poste.

6 - Albert Bouda ? Deuxième adjoint au maire dans le bureau dissout, il était le seul élu UPC du secteur 17. On peut dire que sa place de deuxième adjoint au maire était inattendue, car le parti du Lion n’a eu que 2 sièges dans tout l’arrondissement. D’ailleurs, par manque d’entente dans ce parti, Bouda va rejoindre le Parti pour la Renaissance (PAREN). Un parcours qui n’est pas étonnant quand on sait qu’il est compté parmi les nomades politiques de l’arrondissement. Toutefois, on peut considérer qu’il n’est pas le grand perdant.

Assimi Kouanda, secrétaire exécutif du CDP, Arthur Kafando, Directeur de campagne au Kadiogo, François Compaoré, Secrétaire chargé des mouvements associatifs du parti ? Voici les trois principaux responsables du CDP qui ont joué un rôle important dans ce processus. Sentant la concurrence entre Cdpistes venir, ils ont multiplié les rencontres pour finalement choisir eux-mêmes, les membres du bureau qu’ils ont porté à la connaissance des candidats la veille même des élections. Après la «désobéissance», les 5 conseillers CDP, dont Anatole Bonkoungou, qui ont fait coalition avec les 6 élus des autres partis pour former le bureau, les responsables ne vont pas tarder à sanctionner «l’indiscipliné» pour l’exemple. En effet, dès le lendemain, Assimi Kouanda, signait un arrêté portant sa suspension. Ce document est photocopié et distribué comme de petits pains aux militants, avec un message clair : Anatole ne doit plus mettre les pieds à la mairie, car il n’a plus de parti. Ce message a créé une polémique entre les inconditionnels d’Anatole, qui ne comprenaient pas, et les pro-Zakaria qui se réjouissaient de la mesure prise.

Et Assimi d’enfoncer le clou dans une interview qu’il a accordée à L’Observateur Paalga le 18 juin 2013 : «Quand on adhère à un parti, y affirmait-il en effet, c’est pour respecter ses principes, défendre et concrétiser ses idéaux. La population a accordé sa confiance à la liste du CDP lors des élections. Ensuite, le parti a donné des consignes pour la composition de l’exécutif local de l’arrondissement 4. Anatole Bonkoungou a choisi de ne pas les respecter. Ce n’était pas la première fois qu’il agissait à l’encontre des décisions du parti. C’est une récidive qui a entraîné sa suspension».

Effectivement, Bonkoungou avait tenté une première fois en, 2006, alors que Zakaria Sawadogo l’avait battu aux primaires du CDP. Mais un petit rappel s’impose : l’imposition des membres de bureau a toujours eu des conséquences. Par exemple, Tiga Pascal Ouédraogo avait battu Babou Jean Pierre Ido, candidat officiel du CDP à Sig-noghin en 2000, tandis que Zénabou Drabo, dans la même année, à Bogodogo, barrait la route à Salifou Tiemtoré, qui avait l’aval du parti. Pour ne citer que ces deux cas. Alors un système de primaire entre les élus du CDP fut instauré pour éviter ce genre de désagréments. C’est des primaires qu’Anatole fut battu par Zakaria en 2006. Après les échéances électorales du 17 février 2013, chaque candidat battait sa campagne pour les primaires quand le sommet du CDP a décidé de concocter un bureau la veille des élections.

La suite, on la connaît. Bonkoungou et 5 autres conseillers du CDP n’ont pas suivi les consignes. Contrairement aux autres «rebelles» qui ont été pardonnés après leurs actes, Anatole sera combattu jusqu’au bout. Avec la dissolution des conseils municipaux intervenue le 27 novembre 2013, le trio a gagné une bataille et a mis sa machine en marche pour la victoire finale. Grands moyens matériels et financiers, campagne à haute intensité, meetings exceptionnels, à la hauteur de l’enjeu, avec des propos optimismes. Morceaux choisis : François Compaoré, «Lorsque vous poursuivez un écureuil qui se retrouve sur un rocher (1), réjouissez-vous, car il n’a plus d’endroit pour se cacher». «Si vous voyez une souris qui pourchasse un chat, c’est que ce dernier meurt d’envie de courir.

Sans quoi, il n’y a pas match nul entre les deux». Arthur Kafando : «Sachez que seul le CDP a les moyens pour gérer l’arrondissement. Ne vous trompez pas. Si l’arrondissement 4 échoit dans les mains d’un autre parti, il n’aura pas de sources de financement et l’arrondissement souffrira encore plus. C’est nous qui sommes aux affaires, c’est nous qui pouvons ouvrir ou fermer le robinet. Vous avez donc intérêt à voter le CDP». Malgré les pagnes du 8-Mars, les motos 135, les vélos, les promesses d’emplois, les bourses pour permis de conduire et même les espèces sonnantes et trébuchantes la victoire échappa au CDP qui n’a eu que 5 sièges contre 14 aux élections précédentes.

Que signifie donc sanctionner pour l’exemple ? On peut dire que les plus hauts responsables ont manqué l’occasion de garder un militant populaire et rassembleur par le seul fait du manque de pardon. En effet, il fut un moment où l’intéressé ne demandait plus qu’une occasion de faire son mea culpa et se prosterner devant qui de droit avec une demande de pénitence en main. Anatole fuyait même la presse à un moment donné pour éviter de prononcer un mot compromettant. A ce moment-là, c’était une belle occasion de le mettre aux pas avec des recommandations fermes qui feront de lui désormais un militant très discipliné du CDP. Etant majoritaires, les conseillers du CDP auraient pu dicter leur loi lors des sessions du conseil. Mais vu les titres, les positions et les poids politiques des décideurs du parti, on a préféré montrer à un "simple militant" qu’on ne contredit pas son patron quelle que soit la situation. Pourtant, Anatole a boycotté une décision ponctuelle d’un parti au profit de l’article 253 du code électoral qui stipule que : «Le conseil municipal élit le maire et les adjoints du maire parmi ses membres au scrutin secret et à la majorité absolue des membres composant le conseil». On dit souvent qu’un mauvais arrangement vaut mieux qu’un bon procès. Maintenant que l’exemple est donné, que vont faire les 5 élus du parti avec, à leur tête, l’ancien maire, Zakaria Sawadogo ? Siègeront-ils ou pas ?


Emmanuel Ilboudo
Un observateur de la scène politique de l’arrondissement 4


Notes : (1) Comme par hasard, Tanghin, du mooré, signifie en français "là où il y a la montagne" ou le rocher si vous préférez

 Commentaires