Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Femmes    Pratique    Burkina Faso    Publicité
NEWS
Comment

Accueil
News
Editorial
Article



 Titrologie



L`Observateur Paalga N° 8569 du 28/2/2014

Abonnez vous aux journaux  -  Voir la Titrologie

  Sondage



 Nous suivre

Nos réseaux sociaux



 Autres articles


Comment



Editorial

Bonnets rouges : la fracture coutumière
Publié le lundi 3 mars 2014   |  L`Observateur Paalga


Assemblée
© aOuaga.com par A Ouedraogo
Assemblée générale des commerçants du grand marché en présence des chefs coutumiers
Vendredi 28 septembre 2012. Ouagadougou


 Vos outils




 Vidéos

 Dans le dossier

C’est particulièrement criard en cette période où dans le Plateau central, les chefs traditionnels célèbrent leur fête coutumière communément appelée nabasga ou carrément râayûuga pour montrer que ce sont des moments de fortes libations. Quelques exceptions mises à part, on ne se fréquente plus que par coterie, par affinité. La politique est passée par là, et les clivages entre les dépositaires de la tradition, qui étaient déjà palpables, se sont accentués depuis que les repentis du Congrès pour la démocratie et le Progrès (CDP) ont quitté la majorité présidentielle avec armes, bagages et…bonnets rouges.

Pensez donc, avant même d’officialiser leur rupture, qui est-ce que Roch Marc Christian Kaboré, fer de lance des croquants, est allé voir ? Des coutumiers rassemblés par et chez le Larlé Naaba le 3 janvier 2014 à qui il est allé dire merci pour le soutien dont il a bénéficié durant les dix ans qu’il a passés au perchoir et à la tête du CDP. Et il n’en espère pas moins de leur part maintenant qu’il a largué les amarres.

En partant, Roch et Cie n’ont pas seulement emporté une partie du parti, ils ont aussi fait main basse sur nombre de têtes couronnées qui tapissent dorénavant la moindre de leurs rencontres. A l’heure où on compte ses amis, les frères ennemis en viennent ainsi à répertorier les grands électeurs qui roulent pour eux et ça semble à qui aura le plus de sang royal ou princier dans ses rangs. On comprend dans ces conditions qu’Assimi Koanda, François et les autres aient jugé utile, quoi de plus légitime, de battre le rappel de leurs naabas chez le Baloum le jeudi 27 février dernier. La guerre des bonnets rouges est désormais déclarée entre les anciens camarades mais pas seulement.

L’UPC s’enorgueillit aussi d’avoir le Poé Naaba dans ses filets. Et que dire du RDS dont l’une des têtes de pont n’est autre que le Dima de Boussouma ou de l’ADF/RDA qui tire une légitime fierté de la présence du Kupiendiéli dans ses rangs ? On remarquera d’ailleurs au passage que ceux qui sont farouchement opposés à l’intrusion des coutumiers dans la scène politique ferment volontiers les yeux quand ces derniers fricotent avec l’opposition. C’est donc souvent plus l’allégeance avec le pouvoir qui dérange ceux qui sont en définitive contre les mascottes des autres.

En fait, ce remue-ménage dans la galaxie coutumière repose avec beaucoup d’acuité l’implication active en politique de ceux qui sont souvent considérés comme de grands électeurs, même si dans les grandes agglomérations leur influence sur l’électorat est de plus en plus limitée grâce au niveau d’éducation des populations. Puisqu’ils sont des citoyens à part entière et non entièrement à part, on ne devrait pas les empêcher d’exercer pleinement leurs droits civiques et leur statut est même aujourd’hui gravé dans le marbre de la Constitution.

Mais lorsqu’on voit le spectacle auquel on assiste actuellement, on se dit que les gardiens de nos us et coutumes gagneraient à s’éloigner d’un terrain où , à tous les coups, ils perdent leur âme. On aimerait tant voir nos leaders d’opinion s’investir dans des œuvres socialement méritoires telles les luttes contre le Sida, l’excision, les mariages forcés, la désertification, bref pour le développement socio-économique de leurs communautés, au lieu de s’adonner au spectacle affligeant qu’ils nous donnent à voir !

On était coutumier de chefs ciment de leur société, on les découvre vecteurs de division en leur propre sein et, partant, chez leurs sujets. Le Baloum au CDP, le Larlé au MPP, le Poé naaba à l’UPC, le moins qu’on puisse dire est que le gouvernement du Moogho Naaba (à l’image de celui de la République ?) est miné par les dissensions et il ne manquerait plus qu’un de ces vendredis ils se crêpent le chignon, ou plutôt le bonnet, lors du rituel faux-départ de l’Empereur dont on en vient même à se demander dans quel camp il est. Les notabilités de premier rang sont donc clivées, leurs sous-fiffres aussi et on ne vous parle pas des chefaillons les plus obscurs. En vérité, c’est essentiellement en milieu moaga à la chefferie tellement fragmentée que le phénomène est le plus perceptible et le plus inquiétant.

En réalité, la «féodalité» sait gré à Blaise Compaoré de les avoir libérés après les années de plomb de la Révolution mais, à l’évidence, cette libération n’était pas exempte de desseins politiques et nombre de responsables coutumiers particulièrement impécunieux, se sont révélés des proies faciles face à un régime dont ils sont très vite devenus des obligés. Le bonnet rouge est de ce fait devenu une monnaie d’échange plutôt rentable dans bien des cas.

Le drame est que la fracture coutumière qui s’est creusée davantage depuis le début de cette année risque de laisser de graves séquelles dans le corps social, que le locataire de Kosyam ait son lenga ou non. Et il n’aura pas rendu un grand service à ce pays dont les cautions morales sont plus que jamais atteintes. N’avait-on pas déjà assisté à des mésintelligences inter et intra-confessionnelles entre musulmans, catholiques et protestants au sujet du Sénat et, d’une manière générale, de cette transition qu’on veut pourtant apaisée ? Alors, s’il vous plaît, arrêtez le massacre.


La Rédaction

 Commentaires