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Journées parlementaires du Groupe ADJ : le rapport général des travaux
Publié le jeudi 20 fevrier 2014   |  Partis Politiques


Groupes
© aOuaga.com par A.O
Groupes parlementaires : l`ADJ fait son bilan
Mardi 21 janvier 2014. Ouagadougou. Les députés du groupe parlementaire de l`Alliance pour la démocratie et la justice (ADJ) ont animé une conférence de presse pour faire le bilan de leur action à l`Assemblée nationale. Photo : Ibrahim Koné, président du groupe parlementaire ADJ


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Les samedi 15 et dimanche 16 février 2014 se sont tenues à Dori, dans la salle de conférence de l’Hôtel Kuin Deni, les premières journées parlementaires de l’année 2014 du Groupe parlementaire Alternance - Démocratie et Justice (ADJ).
Placées sous le thème «Article 37 ; l’inopportunité d’un referendum», ces journées ont constitué pour les députés membres du Groupe et leurs militants, une opportunité pour échanger sur la question de l’inopportunité d’un referendum demandé par Blaise COMPAORE et ses partisans dans le but de modifier l’article 37 de la constitution de juin 1991 pour se maintenir au pouvoir.
Débutée le samedi 15 février à 10h 10 minutes, la cérémonie d’ouverture a connu la participation d’un représentant du Ministère chargé des relations avec les institutions et des Réformes politiques; de deux représentants du Groupe parlementaire UPC ; d’un représentant du groupe parlementaire CDP ; d’un représentant du Chef de file de l’opposition politique ; du président du Conseil régional du Sahel ; des membres du Conseil municipal de Dori, des journalistes et de nombreux militants et militantes des partis membres du Groupe parlementaire et de l’opposition.

Elle a été, en outre, marquée par trois interventions ;
➢ le mot de bienvenue du député-maire de la ville de Dori ;
➢ le message du Chef de file de l’opposition et
➢ le discours d’ouverture du président du Groupe parlementaire, le député Ibrahima KONE. Dans son mot de bienvenue, le député-maire de Dori s’est dit heureux du choix porté sur la ville dont il a la gestion pour abriter les travaux des premières journées parlementaires de l’année 2014 du Groupe parlementaire ADJ. Il a, par la suite, émis le vœu que le séjour de ses hôtes du jour soit le plus agréable possible et a rassuré ses collègues députés de son engagement et de son entière disponibilité à poursuivre la lutte avec le vaillant peuple burkinabè pour une alternance démocratique en 2015.

Le mot du Chef de file de l’opposition politique au Burkina Faso [CFOP-BF] a été livré par son représentant, le camarade Bruno NABALOUM, par ailleurs premier secrétaire national de l’ADR [Alliance des Démocrates Révolutionnaires]. Il a, d’entrée de jeu, excusé l’absence du Chef de la file à la cérémonie, absence liée aux contraintes de la campagne électorale qui se déroule en ce moment dans notre pays pour la reprise des élections communales partielles. Il a aussi traduit l’appréciation positive que le CFOP porte aux actions politiques du Groupe parlementaire ADJ et formulé ses vœux de succès éclatants à l’endroit du Groupe parlementaire dans ses actions. Le Chef de file s’est également réjoui du choix du thème par le Groupe parlementaire comme sujet de réflexions qui contribuera énormément à la sensibilisation et à la mobilisation accrue de notre peuple. Le CFOP dans son message a, par la suite, rappelé que les dispositions de l’article 37 consacrant la limitation du mandat présidentiel font partie des clauses consensuelles qui fondent la démocratie burkinabè. Pour lui, ces dispositions traduisent clairement l’attachement républicain de notre peuple au principe cardinal et républicain de la limitation des mandats d’où la nécessité de son strict respect par tous.

Dans son discours d’ouverture, le Président du Groupe parlementaire, après les remerciements d’usage, a tenu particulièrement à féliciter le député-maire de Dori ainsi que l’ensemble de son conseil municipal pour la clairvoyance et le sens de responsabilité avec lesquels ils gèrent cette commune urbaine. Il a, en outre, rappelé le contexte dans lequel se tiennent ces journées parlementaires, contexte particulièrement marqué par ;
• la volonté affichée du président Blaise COMPAORE à recourir au référendum pour modifier l’article 37 de la Constitution et à mettre en place un sénat ;
• les démissions en cascade au sein de son parti le CDP ;
• la journée nationale de protestation organisée à l’appel de l’opposition et qui a mobilisé des centaines de milliers de personnes.

Pour le président du groupe, la position du groupe parlementaire sur la question de l’article 37 et sur la mise en place du sénat est connue de tous et cette position n’a pas varié. Par conséquent, le groupe parlementaire entend continuer la lutte avec l’ensemble de l’opposition réunie autour du CFOP et tous les démocrates et patriotes de notre pays pour l’avènement d’une démocratie véritable dans notre pays.

Le président a affirmé également que la médiation en cours et présidée par l’ancien président Jean Baptiste OUEDRAOGO n’est rien d’autre qu’une énième trouvaille de Blaise COMPAORE pour se donner du temps pour mieux s’organiser. Pour lui, Blaise se sent certainement affaibli et donne l’impression de reculer sans renoncer à ses ambitions de continuer après 2015, année du terme de son mandat constitutionnel. De l’avis du président, le problème est mal posé car la crise n’est pas née d’une haine particulière du peuple burkinabè contre Blaise COMPAORE mais plutôt du refus de ce dernier de respecter la Constitution de 1991 dont l’article 37 limite le nombre de mandats présidentiels à deux. C’est pourquoi, il a conclu en disant que la contradiction à résoudre n’est moins celle qui oppose naturellement en démocratie Blaise à son peuple mais plutôt bel et bien Blaise à la Constitution qui est notre loi fondamentale. Il a enfin exhorté et interpellé nos chefs d’Etats à faire preuve de lucidité et d’anticipation en respectant les dispositions constitutionnelles en matière d’alternance pour ne pas créer de précédents dangereux. Cela nous épargnera de nombreuses crises et contribuera sans doute à renforcer la confiance des peuples en leurs propres institutions.

Le discours d’ouverture du président a fait place à des échanges directs entre les députés et leurs militants. Ces échanges ont permis aux députés de donner de plus amples informations à leurs militants sur un certain nombre de question touchant à la vie de la nation.

La séance de la matinée a été suspendue aux environs de 11h 45 minutes et suivie de la visite de quelques infrastructures réalisées ou en réalisation dans la commune de Dori. Ainsi les députés ont tour à tour visité la cité des forces vives, la grande marre en construction et le barrage de Yakouta situé à une douzaine de kilomètres de Dori.

Les travaux ont repris dans l’après-midi avec l’unique communication sur le thème «Article 37 ; l’inopportunité d’un referendum», livrée par le Professeur Séni OUEDRAOGO, agrégé de droit public et spécialiste des questions constitutionnelles. En introduction, le communicateur dira en substance qu’après la prise de position de spécialistes du droit constitutionnel comme les professeurs Augustin LOADA, Abdoulaye SOMA, Luc Marius IBRIGA et lui même sur l’inopportunité du référendum, en principe, il ne devrait plus avoir de débat sur la question.

Pour traiter le thème à proprement parler, le communicateur a développé deux arguments essentiels pour expliquer l’inopportunité, voire l’illégalité d’un référendum au Burkina Faso pour modifier l’article 37 de la Constitution. Il s’agit d’une part, d’arguments politiques et d’autre part, d’arguments juridiques.

Pour les arguments politiques, le professeur OUEDRAOGO invoque ;
• le coût élevé du référendum dans un contexte national marqué par la baisse continue des recettes minières ;
• les modalités d’organisation même du référendum qui cristallisent davantage la division du peuple sur la question avec tout ce que cela comporte comme risques ;
• la formulation de la question à poser par rapport à un éventuel référendum sur l’article 37 sans vider le concept ``peuple’’ de sa charge idéologique qui voudrait que personne ne soit exclue sur pareille question.
• la façon dont sera posée la question qui présagera de la réponse à donner. S’il s’agit de demander au peuple burkinabè s’il veut que Blaise COMPAORE continue de gérer le pouvoir d’Etat, la réponse risque d’être évidemment oui. Par contre, si dans la formulation de la question, l’on demande au peuple s’il souhaite que le nombre de mandats présidentiels ne soit pas limité, la réponse sera probablement non.

Pour le professeur, la question fondamentale qui demeure est de savoir comment valider un référendum dans un contexte où aucun critère de validité n’est clairement défini. Il a terminé son propos en ajoutant que la question de l’inopportunité du référendum sur l’article 37 est aussi une question de morale politique caractérisée par le non respect de la parole donnée par les autorités de notre pays.

S’agissant des arguments juridiques, le professeur a rappelé que le législateur burkinabè depuis les années 70 avait déjà clairement fait le choix de la limitation du nombre de mandats présidentiels et remettre aujourd’hui en cause cette coutume serait un recul démocratique pour notre pays. Pour le professeur, organiser aujourd’hui un référendum pour modifier l’article 37 par une consultation directe ne serait pas conforme à la Constitution. C’est pourquoi il refuse que l’on fasse une lecture partielle de notre Constitution, notamment les défenseurs de la thèse révisionniste de l’article 37 qui oublient que l’article 168 de la même constitution interdit le pouvoir personnel. Aux termes de la Constitution, l’on ne devrait recourir au référendum que lorsqu’il s’agit de questions d’intérêt national. Pour le professeur, toute modification de la Constitution à l’état actuel doit nécessairement s’appuyer sur l’article 143 de la constitution qui, en matière de procédure, exige deux étapes. La première étape consiste à soumettre l’acceptation du principe même de la révision au vote des députés. C’est seulement après cette étape que le président pourra consulter soit directement le peuple, soit passer le parlement. Ce qui rend matériellement impossible la révision de l’article 37 de la constitution vu l’état actuel des forces en présence.

A ces dispositions de la Constitution, Il faut ajouter les textes communautaires que le Burkina Faso a ratifiés et qui condamnent tout changement anticonstitutionnel, il s’agit ;
• La déclaration d’Alger de 1999 sur les changements anticonstitutionnels de gouvernement ;
• L’article 4 de l’acte constitutif de l’Union africaine ;
• La charte africaine sur la démocratie et la bonne gouvernance de 2007 et ratifiée par le Burkina Faso en 2010 ;
• le protocole de la CEDEAO sur la démocratie et la bonne gouvernance adoptée en 2001;
• la déclaration de Bamako de l’OIF de 2012 ;
• l’article 6 du traité de l’UEMOA qui consacre la suprématie du droit communautaire sur le droit national ;
• l’avis 001/2003 de la Cour de justice de l’UEMOA qui consacre la primauté du droit communautaire sur le droit national y compris la Constitution.

Le troisième argument d’ordre juridique vient du droit comparé [jurisprudence]. Pour le communicateur, de nombreux juges constitutionnels se sont déjà prononcés sur ces genres de question et leur réponse a toujours été négative, le juge constitutionnel burkinabè devrait également aller dans ce sens.

Au cours des débats qui s’en sont suivis, les participants ont unanimement remercié le communicateur pour la qualité de son exposé fort enrichissant. Ils ont tous aussi réaffirmé leur ferme volonté pour le changement. Ils disent ne pas comprendre la démarche du président Blaise Compaoré, celui-là qui avait dit au président Mamadou Tandja qu’il fonçait droit au mur. Pour eux, Il n’est pas question que la Constitution soit modifiée pour permettre à une seule personne de régner à vie. Les participants se sont également interrogés sur comment faire prévoir l’argument juridique dans une situation où la plupart de nos juges constitutionnels sont des ``juges acquis’’. Ils ne comprennent pas non plus la démarche des médiateurs dans la situation actuelle du pays. Ils ont exhorté l’opposition à travailler davantage pour faire adhérer l’écrasante majorité des Burkinabè à la cause qu’elle défend. Des témoignages ont également été faits sur la stratégie de Blaise qui consiste à toujours renier ses propres engagements dans le seul but de se maintenir au pouvoir.

Ils se sont également interrogés sur les possibles sanctions internationales que Blaise COMPAORE encourt au plan international en cas de passage en force. Beaucoup de participants ont également dit ne pas comprendre le contenu de la notion de transition apaisée évoquée par le groupe de médiateurs. Les participants ont, par ailleurs, cherché à savoir s’il n’était pas possible à l’opposition de saisir des juridictions appropriées sur la question avec l’appui de techniciens. Pour les participants, le président a été élu sur la base d’un programme et nulle part dans ce programme il n’a parlé de sa volonté de réviser l’article 37 si jamais il venait à être élu. Dans sa méthode de lutte, l’opposition gagnerait à allier les deux arguments [juridiques et politiques] et ce, en fonction des cibles pour mieux faire passer son message. La CENI pourrait jouer un rôle important car selon les textes internationaux, tous ceux qui contribuent à mettre en place un régime non démocratique ne pourront plus occuper des responsabilités dans leur pays. Les sanctions peuvent être individuelles ou collectives. L’opposition pourrait consulter des cabinets [la SBDC] à cet effet. Pour le communicateur, une médiation est toujours à saisir mais chacun doit y aller avec ses objectifs et ses stratégies. Dans ce sens, il propose que le président COMPAORE saisisse l’amnistie prévue par l’article 168, alinéa 1 qui protège les anciens chefs d’Etats pour préparer une sortie honorable
Avant de clore leurs travaux, les participants ont adopté trois motions et deux recommandations ;
• une motion de félicitations au maire et au Conseil municipal de Dori ;
• une motion de remerciements aux militants et militantes de l’opposition de Dori pour l’accueil au Groupe parlementaire ADJ ;
• Une motion de soutien et de félicitations au Chef de file de l’opposition politique pour sa prise de position dans le cadre de la médiation interne ;
• Une recommandation pour l’élaboration d’une stratégie sur le plan juridique pour empêcher toute éventuelle modification de l’article 37 par référendum ;
• Une recommandation sur le rejet total de l’organisation d’un référendum et la prolongation du mandat présidentiel après 2015.
Les travaux ont pris fin aux environs de 19h.


Fait à Dori le 16 Février 2014

Le Rapporteur

Député Jérémie Alexandre SANKARA


Recommandation pour l’élaboration d’une stratégie sur le plan juridique pour empêcher la modification de l’article 37 par voie référendaire

- Considérant les dispositions des différentes chartes communautaires et internationales qui condamnent tout changement anticonstitutionnel ;
- considérant l’article 168 de la loi fondamentale qui proscrit toute idée de pouvoir personnel ;
- considérant la lutte actuelle menée par l’opposition affiliée au Chef de File de l’Opposition Politique contre la modification de l’article 37 :
- considérant le caractère consensuel de l’article 37 révisé en 2000.

Nous, participantes et participants aux premières journées parlementaires de l’année 2014 du Groupe parlementaire « Alternance - Démocratie et Justice (ADJ) tenues les 15 et 16 février 2014 à Dori,

Recommandons au Chef de File de l’Opposition Politique la mise en place d’une cellule de réflexion pour l’élaboration d’une stratégie de lutte sur le plan juridique afin de contraindre Monsieur Blaise Compaoré à abandonner son funeste projet.


Fait à Dori, le 16 février 2014
Les Participants



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