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L`Observateur Paalga N° 8558 du 13/2/2014

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Coût de la vie: «Nous avons des arguments qui prouvent que le minimum vital au Burkina est de 48 255 F CFA» (Moussa Diallo à propos du coût de la vie)
Publié le jeudi 13 fevrier 2014   |  L`Observateur Paalga




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Suite à la publication des résultats, le 8 février dernier, de l’étude sur le coût de la vie des ménages au Burkina Faso, commandité par la Confédération générale du travail du Burkina (CGTB), nous avons rencontré Moussa Diallo, secrétaire confédéral chargé du suivi de la législation du travail et des normes sociales de ladite fédération à la Bourse du travail à Ouagadougou le 12 février 2014. Cet enseignant de philosophie de profession, dans l’entretien qui suit, parle de cette étude et des attentes du monde syndical que le gouvernement doit prendre en compte si tant est qu’il se préoccupe du bien-être des citoyens.

Vous avez mené une étude sur le coût de la vie dans les ménages au Burkina Faso ; qu’est-ce qui justifie cette étude ?

• Elle fait suite à une autre que nous avons faite en 2011 qui s’intitule «l’étude sur le panier de la ménagère au Burkina Faso». Il vous souviendra qu’en 2008 il y a eu les émeutes de la faim, qui nous ont amenés à interpeler le gouvernent sur la vie chère et les mesures sociales qu’il fallait envisager. A l’époque le gouvernement avait jugé que nos arguments étaient pertinents mais il ne semblait pas bouger sur cette question. Cette première étude avait démontré que la population n’arrivait plus à assurer le minimum vital pour la simple raison qu’au moment où le prix des produits de grande nécessité flambait, le salaire stagnait. Certain même ont connu une situation de recul avec des licenciements dans le cadre du PAS (NDLR : programme d’ajustement structurel). Après cette étude, nous avions demandé au gouvernement de revoir le salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) à la hausse. Nous ne pouvons pas comprendre qu’on continue à soutenir que 30 684 F CFA puisse suffire à assurer le minimum à un travailleur burkinabè fût-il célibataire. Dès lors on se demande sur quelle base on a fait les calculs pour en arriver là. C’est pourquoi nous avions demandé au ministère de la Fonction publique, du Travail et de la Sécurité sociale d’avancer ses arguments. C’est après avoir attendu en vain que nous avons, avec le concours d’autres institutions, décidé de travailler à déterminer le contenu du salaire minimum vital, et là, vous voyez qu’on ne parle même pas de SMIG.

Quels sont les résultats auxquels vous êtes parvenus ?

• Nous avons constaté que le revenu minimum vital identifié montre clairement que le SMIG est insuffisant pour tenir le coût de la vie, qui est élevé alors que le pouvoir d’achat est faible. En termes clairs, ceux qui ont le SMIG comme salaire ne peuvent pas se nourrir, se loger, s’habiller et se soigner.

C’est une étude qui a pris comme échantillon 3 000 ménages dans 11 villes du Burkina Faso, et comme c’est une démarche statistique, nous avons pris la moyenne, étant entendu qu’il y en a qui n’ont même pas le SMIG. C’est au regard des trois nécessités citées plus haut que nous avons conclu que le salaire minimum vital ou, si vous voulez, le SMIG doit être de 48 255 F CFA.

Donnez-nous plus de détails sur le mode de calcul ayant abouti à ce chiffre.

• Voilà comment nous avons procédé : nous avons prix au niveau de la population cible uniquement les dépenses incompressibles, notamment les dépenses alimentaires, vestimentaires, et celles liées au logement avec les frais connexes d’eau et d’électricité. Pour les dépenses alimentaires d’une seule personne, la moyenne a donné 12 889 F CFA, pour le déplacement la moyenne remonte à 5 220 F CFA, pour la santé la moyenne est de 3 286 F CFA. Nous parlons de moyenne, car vous savez que pour soigner un palu, cela n’est pas suffisant, encore moins pour soigner certaines autres pathologies. Pour les dépenses vestimentaires, la moyenne est de 4 788 F CFA, et les dépenses hors loyer (électricité et eau) emontent à 5 398, le loyer lui-même s’élève à 15 673 F CFA et la sommation donne la moyenne de 48 255 F CFA.

Ça se voit qu’il y a un gap à combler ; quelles sont les solutions que vous préconisez ?

Nous avons fait des recommandations aux autorités dont la première est de revoir à la hausse le SMIG au montant indiqué plus haut. L’étude est scientifique, on ne doit pas tergiverser là-dessus si réellement on veut le bien-être de la population. Le processus de fixation du SMIG doit être participatif avec l’implication du monde syndical tel que recommandé par les conventions de l’OIT. La dernière recommandation, c’est que le pouvoir fasse une augmentation de salaire de 30%. Nous avons souligné qu’il ne s’agit pas seulement d’une simple augmentation sans fixer les prix des produits de grande consommation. En 2008 les autorités ont dit que dans une économie de marché on ne peut pas contrôler les prix, mais il a fallu attendre la crise de 2011 pour que le même pouvoir ressorte des textes qui lui permettaient de fixer des prix et de les contrôler, et ces textes étaient ici à la Bourse du travail. Il y a eu des mesures qui ont été prises, mais elles sont limitées dans leur nombre et dans leur application, faute de contrôle digne de ce nom.

Justement certains économistes doutent de l’efficacité de l’augmentation des salaires qui a pour pendant direct la valse des étiquettes, entraînant ainsi l’inflation ; qu’est-ce que vous en pensez ?

• Je précise que je ne suis pas un économiste, pour autant je n’ignore pas totalement les analyses économiques. Aujourd’hui l’économie libérale recommande que les gens aient un pouvoir d’achat pour que cette même économie tourne. Si vous produisez et que les gens n’arrivent pas à acheter, il se produit le phénomène qu’on appelle la mévente. Il est donc recommandé dans une économie libérale que le pouvoir d’achat des travailleurs soit au niveau du coût réel de la vie. Les économistes eux-mêmes le savent, nos produits ne sont pas compétitifs sur le marché extérieur, et si le marché intérieur n’arrive pas à les absorber on ne peut pas tenir. Au niveau de la Confédération syndicale, nous avons une juste lecture des choses, nous parlons d’augmentation du pouvoir d’achat des populations qui se fait de deux manières : ou on baisse le prix des produits, ce qui va permettre aux populations de satisfaire leurs besoins élémentaires avec leur maigre salaire, ou alors on augmente les salaires en fonction du coût de la vie. Mais justement si on augmente les salaires en fonction du coût actuel de la vie sans prendre des mesures pour maintenir les prix actuels, mais laisse libre court à la spéculation, on aboutit à l’inflation. C’est pourquoi nous avons toujours posé le problème de la fixation et du contrôle des prix.

Est-ce que vous avez les moyens d’amener l’Etat à prendre en compte vos recommandations ?

• Notre première attitude consiste à vulgariser l’étude comme nous sommes en train de le faire à travers cet entretien, ensuite nous avons des revendications fortes sur le relèvement du pouvoir d’achat, et dans le dialogue avec le gouvernement nous avons des arguments supplémentaires. Mais si le dialogue ne marche pas, nous n’auront pas d’autres choix que d’utiliser les moyens de pression. D’ailleurs le gouvernement a toujours trouvé que nos arguments sont pertinents, mais il dit que le pays manque de moyens pendant que nous voyons que la conduite des gouvernants nous démontre le contraire.

Abdou Karim Sawadogo

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