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De la souveraineté du peuple : la dictature de l’instant
Publié le vendredi 24 janvier 2014   |  L’Hebdomadaire




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Maintenant c’est sûr, le débat sur l’article 37 de notre constitution oppose définitivement les partis politiques de la majorité et ceux de l’opposition. La solution à cette contradiction principale appartient, non pas à la classe politique, mais bel et bien au peuple.


Il faut recourir à sa souveraineté, lui qui en est le seul et unique détenteur. Cela aura en pratique, pour effet, d’extirper la classe politique et tous les intellectuels de l’alternance, du formatage forcené des canons de la démocratie qui est, depuis le discours de La Baule, devenu le malheur des pays africains.

Aujourd’hui, nul ne peut feindre de ne l’avoir pas remarqué. A moins de jouer aux aveugles, pour les plus crédules, ou aux oiseaux de mauvais augure, pour les plus aigris. La baule a enfermé nos pays dans la dictature de l’instant. Ce qui s’est manifesté par les guerres incessantes et les conflits civils à n’en plus finir.

Discours de la Baule, source de l’instabilité en Afrique

On peut même parler de deuxième colonisation de l’Afrique, et cette fois-ci en plus dramatique. Le conflit ne nous oppose plus à l’envahisseur, mais oppose des frères et sœurs d’un même territoire. Pour en contrôler les reines. Au nom de quoi  ? Au nom, semble-t-il du bonheur de peuple  ! Vous avez dit absurdité, idiotie ou imbécilité  ?

A chacun son choix du mot juste ou pertinent. Que chacun pense ce qu’il veut, mais qu’il le dise de manière constructive à dit un penseur.

La démocratie, ce ne sera que ça à la réflexion, à savoir faire et dire pour construire. Encore faut-il que tous ceux engagés pour le bien de la cité, ou se disant tel, travaillent à en créer les conditions.

Ce qui veut dire autrement, qu’il faut au préalable des partis politiques faisant leur tâche d’éducation du peuple, ayant des projets crédibles, ayant une dynamique de fonctionnement interne propre à attirer de plus en plus de militants vers eux et surtout, qui agissent pour authentifier les résultats des consultations électorales…Cela demande plus de temps et de persévérance au dessus de l’engagement de certains, sinon qu’il ne cadre pas avec leur impatience à toucher au graal ultime.

On serait tenté à conclure que leur vision est trop facile de vouloir ainsi banaliser l’accession à la fonction suprême qui en réalité, et en régime de démocratie de surcroit, appartient à la catégorie du combat de toute une vie. Mais que voulez-vous, La Baule est passé par là, faisant croire à une certaine opposition et à certains individus qu’il faut forcer la marche vers les palais à coups d’appel à l’apocalypse.

Ce formatage, à marches forcées de la démocratie, a consacré la dictature de l’alternance, comme il fut dans les années quatre-vingt-dix, celle de droits de l’Homme, nommé pudiquement par certains «  les droits de l’hommisme  ». Il faut ici et maintenant que ce soit mon tour de goûter aux délices du pouvoir. Et pour cela, la fin doit forcément justifier les moyens.

Même à marcher sur des cadavres, soutient des intellectuels, l’essentiel est d’arriver à Kosyam.

Il est possible de faire mieux, beaucoup mieux. Il est possible de croire encore au peuple. En sa capacité au discernement, en sa capacité à savoir ce qui est bien pour lui, en sa capacité à faire le bon choix, si tant est que l’alternance à tour de rôle peut faire son bonheur.

Il faut croire qu’il aura la lucidité, sinon la force pour aller là où il faut qu’il aille. Il faut peut-être qu’on comprenne que le peuple n’est plus le paysan sans connaissance, ni celui qui ne vit que par mimétisme, comme l’a dit l’autre (1), mais qu’il vit lui aussi comme vous et moi à l’heure des TIC et que bien de choses ont profondément changé en lui.

Les peuples africains sont mûrs

Croire qu’on a toujours affaire au bon peuple docile, corvéable et taillable à volonté d’il y a quelques années c’est faire preuve d’une myopie politique et d’un manque de discernement graves. Et l’actualité internationale est là pour indiquer clairement que les discours seuls ne suffisent pas à ouvrir les chemins de la croissance ou du bonheur des populations.

Un sujet d’intérêt  ? Oui, de nombreux pays en ont sombré. On se rend compte, pour aborder l’actualité brûlante, que pas plus Michel Djotodia en Centrafrique, qui a même dû aller voire ailleurs, ou Salva Kiir au Soudan du Sud, après avoir pris les armes pour dénoncer la mal gouvernance et la dictature, n’ont réussi à changer quoi que ce soit dans le sens qu’indiquait alors leurs discours enflammés et même quelquefois grandiloquents.

Corps et biens, ils sont en train de sombrer, en faisant le dur apprentissage de la gestion d’un Etat au plus haut sommet. Et décidément, la pratique refuse obstinément de rejoindre le discours. Ce sont ces tristes et malheureuses expériences du «  ôtes-toi que je m’y mette  » qui doivent fonder les partis politiques du Burkina, toutes tendances confondus, pour l’option de la modération, l’option du recours au peuple pour trancher lorsque le dialogue devient inopérant.

Tout simplement parce que le changement, aussi beau soit-il ne signifie pas que tout deviendra subitement rose, surtout si, on veut contourner les règles établies et connues, de celles à l’origine de la démocratie.

Il faut que l’opposition en vienne à savoir que la mécanique de la violence qu’elle agite en sous main, n’a jamais conduit nulle part que dans l’impasse. Encore faut-il savoir si chacun de nos démocrates croient ou non au suffrage universel.

Que le peuple se prononce en toute liberté

L’article 37 étant de fait un sujet d’intérêt parce qu’il fait parler et qu’il divise, le pouvoir de décision ne peut venir que du peuple. Dès qu’il est établi le constat que personne ne remet en cause, qu’au Burkina sont bien réelles et effectives, la liberté des citoyens de s’exprimer, d’aller et venir, de se réunir, de mener leurs activités, … le pouvoir du peuple peut lui aussi s’exprimer librement, sans entraves, ni restriction.

Librement et autant qu’il est possible pour le peuple d’être libre. La seule question querellée, a dit un éminent professeur de philosophie, c’est que le peuple sera corrompu. Jamais selon sa conviction.

Il sera corrompu par les uns ou les autres  ! Décidément voilà un autre mot qui a la peau dure chez nous les Burkinabé  ; la corruption. Si le peuple est corruptible, c’est-à-dire donc tout le monde, alors chacun, c’est-à-dire pouvoir comme opposition, peut jouer au corrupteur. A moins que les deux camps qui voudront chacun gagner, ne soit, ou le pouvoir le plus bête de la terre ou l’opposition la plus bête de la terre.

Parce qu’il sera incongru que le pouvoir le fasse et que l’opposition debout comme un seul homme ne le fasse pas, d’autant plus qu’elle a à sa tête un chef de file qui dispose de grands moyens et qu’elle vient de recevoir un renfort non négligeable qui a débarqué du pouvoir avec armes et bagages. Les preuves existent à cet effet.

Dans notre pays de savane, pour paraphraser le citoyen lambda, tout se sait ou fini par se savoir  ; au grand dam des conspirateurs.

Si la démocratie est le pouvoir du peuple, voilà une question, celle, de la révision ou non de l’article 37, à propos de laquelle, il faut rendre au peuple son pouvoir. Sa souveraineté comme il est vrai, étant indivisible, chaque citoyen doit participer à dire son mot et ne devrait pas se le laisser confisquer par d’autres. Il faut même aller plus loin, me semble-t-il.

Il est venu le temps de légitimer notre loi fondamentale, en recensant toutes les dispositions pouvant générer des discordes pour un accord définitif. Si le référendum n’est pas acceptable, au motif que le peuple est ignare, ignorant et pas qualifié, la question est alors de savoir qu’est-ce qu’on a à se fatiguer avec la démocratie  ?

Quel intérêt il y a-t-il à l’appeler régulièrement aux urnes depuis 1991 puisqu’il n’y comprend rien à rien. Il serait mieux de se débarrasser de cette inutilité qui coûte perte de temps, d’énergie et d’argent. Au moins sur ce point tout le monde sera d’accord.

Que d’économies alors pour mieux nous consacrer aux priorités, comme aime à le rappeler l’opposition, parlant du sénat. La démocratie coute sans aucun doute possible plus cher que ce fameux sénat. N’est-ce pas  ? Sinon, nous devrons nous accorder sur la nécessité du référendum.

Apha Ben Y. BARRY

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