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L’Observateur Paalga N° 8541 du 21/1/2014

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Démissionnaires du CDP : Le Larlé Naaba sort du silence
Publié le mercredi 22 janvier 2014   |  L’Observateur Paalga


Politique
© L’Express du Faso par Evrard Ouédraogo
Politique : le Larlé Naaba explique sa démission du CDP à la presse
Mardi 21 janvier 2014. Ouagadougou. Le Larlé Naaba Tigré a animé une conférence de presse pour expliquer sa démission du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP, parti au pouvoir)


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«Feu à volonté ! Il n’y a pas de question tabou !» En introduisant la conférence de presse du Larlé Naaba Tigré en ces termes, le doyen (dans le journalisme) Raymond Edouard Ouédraogo (REO) ne croyait pas si bien dire. Pendant plus d’une heure en effet, le chef traditionnel démissionnaire du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) et de la Fédération associative pour la paix et le progrès avec Blaise Compaoré (FEDAP/BC) a été soumis au feu nourri des questions des hommes de médias mobilisés en masse pour la circonstance ; une occasion pour le ministre du Moro Naaba, Victor Tiendrébéogo à l’état civil, de revenir de long en large sur les raisons de son départ. A l’en croire, le divorce était inévitable, car ne partageant plus le «jusqu’au-boutisme» du parti au pouvoir au sujet de l’article 37 et de la mise en place du Sénat, il a «choisi d’être avec le peuple».


«C’est une conférence de presse ou une conférence publique même?» La question traduit toute la frustration du journaliste de la presse écrite publique de ne pas trouver une place assise sous le grand hangar en paille au milieu du palais du Larlé Naaba ce mardi 21 janvier 2014 alors qu’il est 10h moins le quart. Malgré les supplications au micro des organisateurs pour que le public, venu en masse, cède la place aux invités du jour, les journalistes, bon nombre d’hommes de média doivent se résoudre à rester debout. Même dehors sous les deux bâches qui ont été dressées, il n’y a pas une seule place assise tant il y a du monde concentré sur les sons qui sortent des haut-parleurs installés à cet effet pour relayer ce qui se passe sous le hangar. Des chaises sont apportées pour les «journalistes debout».

10h15, le maître des lieux fait enfin son entrée sous les applaudissements et les youyous au son d’un bendré. Sans qu’on puisse l’apercevoir du fait de la nuée de chasseurs d’images qui sont postés devant lui, le Larlé Naaba Tigré prend la parole pour donner l’ordre du jour : «Suite au récent développement de l’actualité au plan politique, nombreux sont les journalistes qui m’ont approché pour en savoir davantage. Aujourd’hui je me prête volontiers à vos questions». Il donne ensuite l’autorisation aux chefs traditionnels présents de porter leur bonnet pour qu’on puisse les distinguer. Et le MC du jour, Raymond Edouard Ouédraogo (REO), de dire : «Feu à volonté ! Il n’y a pas de question tabou !». Le doyen ne manque pas de faire au passage une précision à ses jeunes frères journalistes : «Il faut savoir qu’on dit Sa majesté pour le Roi mais on dit Son Excellence pour ce qui est des ministres du roi tels que le Larlé Naaba».

S’ensuit une longue séance de questions-réponses. Morceaux choisis :


Pourquoi le Larlé Naaba a-t-il pris autant de temps à quitter le navire du parti au pouvoir ?

«J’étais effectivement du CDP ! Ce qui a justifié ma démission, c’est qu’aujourd’hui tous les Burkinabè de l’intérieur comme de l’extérieur sont témoins des questions qui divisent notre peuple de façon profonde et sérieuse. Le CDP et la FEDAP/BC, dont je faisais partie, soutiennent la mise en place du Sénat et la révision de l’article 37. J’appartiens à l’institution traditionnelle de la chefferie coutumière qui, par ses premiers responsables que sont les rois et les chefs traditionnels, a eu une audience avec le chef de l’Etat à qui ils ont dit de façon audible qu’ils ne souhaiteraient pas une mise en place du Sénat dans un tel climat. Vous êtes également informé du fait les autorités religieuses, catholiques et musulmanes ont dit qu’elles ne souhaitent pas la mise en place du Sénat. Je suis un représentant du peuple à l’Assemblée nationale, peuple qui ne veut pas d’une institution alors que mon parti veut le contraire ; j’appartiens également à une institution qui n’est pas d’accord avec la mise en place de ce Sénat dans un climat de division ; c’est la raison pour laquelle j’ai donné ma démission du CDP parce que je ne partage pas leur jusqu’au-boutisme dans leur volonté de mise en place du Sénat et de révision de l’article 37 !»

Pourquoi avoir signé la lettre de démission Larlé Naaba et non Victor Tiendrébéogo ?

«Je pense avoir mis à l’en-tête de ma lettre de démission mon nom à l’état civil, mais si cela n’a pas été fait, il faut savoir que le Larlé Naaba Tigré et Tiendrébéogo Victor, c’est la même personne»

Oui ou non il y a eu altercation avec François Compaoré ?

«Sur la question de mon ami et frère François Compaoré, je ne souhaiterais pas descendre dans la boue. Il n’y a pas eu de prise de bec entre François et moi, on s’est vu il y a très longtemps. Je pense que ces propos ont été tenus devant au minimum 70 personnes. Je ne vais pas descendre dans la boue sur cette question comme je vous l’ai dit. Je souhaite que vous soyez indulgent parce que ça n’arrange personne de revenir sur cela. Mais ces propos ont été bel et bien tenus. Pas devant moi mais devant des témoins que je respecte.»

Comment la rencontre avec Roch Marc Christian Kaboré et des chefs coutumiers a été organisée, et le Moro Naaba en a-t-il été informé et a-t-il donné son autorisation ?

«Le 3 janvier, le camarade Roch Marc Christian Kaboré a souhaité dire merci aux notables du Centre qui l’ont accompagné durant ses missions au sein du parti et de l’Assemblée nationale. Ce jour-là, L’Observateur Paalga était là, et je leur ai dit qu’il s’agissait d’un simple remerciement et qu’il fallait nous excuser. Il faut savoir qu’il y avait au total 401 chefs qui étaient réunis pour cette rencontre qui consistait juste en des remerciements et des présentations de vœux. Naturellement, je ne peux rien faire même pour la présente rencontre sans l’en informer, j’ai le devoir d’en informer le Moro Naaba qui est mon supérieur. Il n’est pas dans un parti politique et il n’interdit pas à quelqu’un qui veut présenter ses vœux chez moi de le faire. Je dois également vous dire que le jour-là, les chefs coutumiers de façon libre ont voulu parler de politique mais M. Roch Marc Christian Kaboré a dit qu’il n’était pas venu pour cela mais juste pour les remercier et qu’en son temps, si une autre question devait les réunir, il le leur ferait savoir. Le Moro Naaba a toujours dit qu’il souhaite que chacun de nous, là où il est, fasse en sorte d’apporter la paix à notre pays mais il n’est pas partisan.»

Au regard de l’affaire des propos tenus par François, est-ce que la chefferie coutumière ne gagnerait pas à se départir de tout engagement politique pour qu’on continue de la respecter ?

«Avant la colonisation, il y avait un ordre social précis qui était établi dans le Mogho ici et les chefs jouaient un rôle politique traditionnel naturellement. Si de nos jours, la politique est le milieu où les chefs peuvent apporter leur contribution au bien-être de leur population, je ne vois pas pourquoi ils ne le feront pas. Si dans l’avenir, il y avait un statut particulier des chefs coutumiers qui leur interdisaient de faire de la politique, je pense que les chefs arrêteraient d’en faire. Pour le moment, les chefs coutumiers sont dans tous les partis politiques du Burkina, dans l’opposition comme dans la majorité, donc il n’y a point de problème. Ce n’est pas parce qu’aujourd’hui j’ai choisi d’être avec le peuple que ça va poser des problèmes à un parti.»

Qu’est-ce qu’il y a exactement derrière la démission du Larlé Naaba et quels sont ses rapports exacts avec Roch Marc Christian Kaboré, car on dit que si le Larlé a démissionné, c’est parce que Roch a démissionné, et que s’il est ce qu’il est, c’est grâce à Roch ?

«Ceux qui me connaissent savent que je suis un homme libre et j’aime dire ce que je pense et à qui veut l’entendre. Très honnêtement, j’ai quitté le CDP parce que, comme vous le relayez vous-mêmes, le peuple, dans sa majorité, et la marche historique du 18 janvier l’a démontré, dit non au Sénat et à la révision de l’article 37. Etant avec le peuple, je ne peux que m’aligner derrière lui. Il faut savoir que s’il y a crise dans ce pays, il y a des gens qui peuvent prendre l’avion pour fuir mais en tant que chefs, nous avons le devoir de mourir ici. Si les gens ont la chance de pouvoir prendre le large, nous, on n’en a pas le droit, on a le devoir de mourir ici, et personne ne souhaite mourir du reste. S’il y a des dégâts donc, c’est nous qui allons rester ici pour les gérer pendant que d’autres fuiront. Les rapports entre Roch et moi datent de 40 ans, c’est mon frère et ce n’est pas avec lui seulement que j’ai des rapports, j’en ai également et de meilleurs jusqu’à preuve du contraire avec François Compaoré et avec Blaise Compaoré. Dire que c’est Roch qui a fait de moi ce que je suis, je ne le crois pas parce que dans notre sagesse, il est dit qu’on peut aider quelqu’un à devenir roi mais on ne peut l’aider à devenir prince, car on naît avec. Ce n’est pas parce que j’ai quitté le navire CDP ou qu’une question me divise avec les autres amis que nous sommes devenus des ennemis. Nous avons des positions différentes mais nous ne sommes pas des ennemis. La politique est un art où chacun cherche à apporter le mieux pour les Burkinabè.»

La démission du Larlé Naaba signifie-t-elle la fin de sa carrière politique ou faut-il s’attendre à ce qu’il crée son propre parti ou qu’il rejoigne le parti annoncé de ses camarades démissionnaires ?

«On ne se met pas sur la pointe des pieds pour voir ce qui va arriver. Je ne vais pas devancer l’iguane dans l’eau. Les camarades démissionnaires ont une assemblée constitutive d’un parti qu’ils n’ont pas encore créé, attendez de voir si, quand il sera créé, je vais y être. Ça ne va pas tarder. D’ailleurs je profite de cette assemblée pour dire qu’on invite tous ceux qui sont partisans des démissionnaires le samedi à 16h à la maison du Peuple et non à la Maison des jeunes Jean-Pierre Guingané.»

Qui tient la conférence de presse ? Le Larlé ou un citoyen qui a des droits et qui les défend ?

«On ne peut pas mettre un mur entre Victor Tiendrébéogo et le Larlé Naaba. Le citoyen n’est différent en rien de l’autorité coutumière. A l’hémicycle, on m’appelait Victor Tiendrébéogo et en dehors on m’appelait Larlé Naaba. La personne qui anime cette conférence de presse a cette double casquette».

N’est-ce pas contradictoire de soutenir qu’on est contre le CDP mais qu’on n’est pas contre Blaise Compaoré ?

«C’est vrai que Blaise Compaoré est à l’origine de la création du CDP, mais ce n’est pas lui qui en est le président en exercice. C’est par délégation qu’il y a un président, et si je ne partage pas ses convictions, il est de mon plein droit de prendre mes responsabilités».

Il semble que les chefs coutumiers ont considéré comme un manque de respect le fait que le président du Faso les a fait recevoir par le Premier ministre en lieu et place de leur audience avec lui ?

«Si cela a été dit cela ne vient pas de moi et je ne l’ai pas entendu. C’est vous qui me l’apprenez ! Du reste, le premier ministre était avec 10 ministres. Son calendrier ne lui a pas permis de rencontrer en personne les chefs coutumiers, on peut le comprendre.»

Pourquoi vous a-t-on vu à la marche du 18 janvier sans votre bonnet ?

«Je suis allé sans le bonnet en tant que citoyen qui épouse la même conviction que ce peuple hétérogène».



Adama Zongo, président de la FEDAP/BC, a affirmé que votre démission est un non-événement, car vous n’étiez pas un membre actif. Qu’en dites-vous ?

«Je prends acte de ce qu’il a dit. Il faut savoir que je n’ai pas demandé à être membre de la FEDAP/BC. On m’a inscrit comme membre du fait de ma modeste contribution au rayonnement de l’image de notre chef d’Etat, Blaise Compaoré, que j’aime tant et que je respecte beaucoup, je le réaffirme. Mais on ne m’a jamais invité par une lettre à une réunion de la FEDAP/BC. Pourtant à toutes les cérémonies, on m’a convié, moi je ne suis pas un ornement. Lors de la dernière rencontre à Ouaga 2000, vous aurez remarqué que je n’étais pas présent. Pour le respect de celui que vous savez, nous devons faire beaucoup attention à nos faits et gestes.»

Vos anciens amis disent que c’est parce que vous êtes un opérateur économique que vous avez démissionné. N’avez-vous pas peur que l’on plombe vos affaires maintenant que vous n’êtes plus avec eux ? N’avez-vous pas d’ardoises qui puissent vous traîner devant la justice ?

«L’apparence trompe, pour une visibilité de dynamisme, on penserait que j’ai des ressources financières. Je peux vous dire que j’ai des ardoises et des traites à payer au niveau de la banque du fait de mes activités. Je ne suis pas pauvre mais je ne suis pas riche non plus. Je partage ce que je gagne avec la population. Annuellement nous organisons ici depuis près de 8 ans des actions en faveur des élèves, des étudiants, et c’est cela qui donne l’apparence que je suis un homme riche. Je suis un homme de partage et pas un homme de richesse. C’est ma philosophie et c’est le devoir de tout chef traditionnel. Je m’inscris modestement dans le registre d’opérateur économique avec Belwet qui est un projet futuriste. Je n’ai jamais géré une caisse publique, j’ai toujours géré mes modestes moyens et je me demande qui va m’intenter un procès. Je n’ai pas de compte à régler avec l’Etat. Si c’est les banques, c’est possible mais en général elles saisissent les biens et je n’ai qu’une seule maison. Du reste, je manifeste ma bonne volonté d’honorer mes engagements».

Si jamais le CDP revient sur ses positions, est-ce que vous repartiriez avec eux ?

«Il n’est pas possible pour moi de repartir au CDP. J’ai décidé de le quitter définitivement et vous savez que j’ai rendu mon tablier de député parce que je le devais au CDP. Je l’ai fait pour être libre parce qu’on ne peut pas jouir des avantages et ne pas en subir les conséquences. Je ne peux plus y repartir».

On a vraiment du mal à comprendre que vous soyez contre le CDP et non contre Blaise Compaoré.

«J’ai beaucoup de respect pour Blaise qui m’a fait confiance pendant 21 ans. Dans le Kadiogo, je suis parmi ceux qui ont eu la confiance de cette haute personnalité qui fait la fierté nationale et celle de l’Afrique. C’est d’ailleurs pour cette raison que, quand on a un ami, on ne doit pas lui mentir. Pour moi, on va droit dans le mur. Un chef est une personne comme les autres, il peut se tromper. Comme on dit, l’homme est neuf et jamais dix. Seul Dieu est dix. Et avant de tenir cette conférence de presse, en bon croyant, j’ai demandé à Dieu de m’inspirer mes réponses, et j’ai trouvé un passage à la page 845 de ma Bible dans nouveaux proverbes de Salomon, où il est dit : la gloire de Dieu c’est de cacher les choses, la gloire des rois, c’est de scruter les choses. Je pense que le Président saura scruter les choses et savoir ce qui est le meilleur pour le Burkina Faso.»

Puis il a résumé l’ensemble de la rencontre en langue nationale mooré pour les chefs présents avant de prendre congé des journalistes sous les acclamations et dans un bain de foule alors qu’il était midi et demi.

Hyacinthe Sanou

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