Accueil    Shopping    Sports    Business    News    Femmes    Pratique    Burkina Faso    Publicité
NEWS
Comment

Accueil
News
Société
Article



 Titrologie



Le Quotidien N° 627 du 2/11/2012

Voir la Titrologie

  Sondage


 Autres articles

 Météo


Comment

Société

Lourdes peines pour le Directeur de publication de l’ouragan : La justice verse dans le règlement de compte
Publié le vendredi 2 novembre 2012   |  Le Quotidien




 Vos outils




Le directeur de publication du journal « L’Ouragan », Issa Lohé Konaté, a été condamné le lundi 29 octobre 2012 à 12 mois de prison ferme, 6 mois de suspension de la publication et 4 millions de F CFA de dommages et intérêts par le tribunal correctionnel de Ouagadougou pour « faits de diffamation, d’injures et d’outrages à magistrat par voie de presse » suite à une plainte déposée par le procureur du Faso, Placide Nikiéma. Cette condamnation judiciaire vient relancer le débat sur la dépénalisation des délits de presse. Jusqu’à présent, nous restons convaincus que la fin des peines de prison et des amendes exorbitantes pour les délits de « diffamation » , « injures» ou « calomnie », demeure l’une des étapes clés de l’amélioration générale de la situation de la liberté d’informer. Et le 3 mai de chaque année, l’humanité entière, à travers des manifestations diverses dans les différents pays, rappelle le principe sacro-saint de la liberté d’expression. Selon l’article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme « Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit ». Certes, il existe des restrictions comme celles interdisant les propos incitant à la haine raciale, nationale ou religieuse. Dans le cas d’espèce du feuilleton judiciaire qui a opposé le journal l’Ouragan au sieur Placide Nikéma, la sanction a été extrême et annihile tout d’un coup l’effort de lutte des organisations de défense des droits humains. En effet, plusieurs associations d’hommes de média appuyées avaient engagé un plaidoyer pour l’adoption d’une loi sur la dépénalisation du délit de presse au Burkina. Au-delà de l’effet de mode (bon nombre de pays ont déjà voté cette loi), cette loi permet non seulement de protéger le journaliste mais aussi et surtout la société toute entière. Une certaine opinion soutenait à tort que cette loi n’était pas opportune car, dans les faits, aucun journaliste n’avait jamais été condamné à des peines privatives de liberté. Hélas, cela vient de se produire.

Aujourd’hui, la contribution de la presse à plus de justice sociale et économique, à plus de démocratie n’est plus à démontrer.

La justice burkinabè caractérisée par sa lenteur légendaire dans les dossiers sensibles de la République s’est pourtant rabattue sur un journaliste pour montrer aux yeux de l’opinion nationale qu’il existe une justice au Burkina. Ce que l’on peut qualifier de « farce judiciaire » ne saurait contenter les Burkinabè qui attendent que justice soit faite dans les affaires Thomas Sankara et Norbert Zongo. On pourrait simplement convenir avec une certaine opinion que la justice burkinabè n’est pas toujours crédible d’autant plus qu’elle est caractérisée par la corruption en son sein. On se rappelle que suite à des décisions très sévères de la justice impliquant des militaires en 2011, la paix sociale au Burkina a été mise à rude épreuve. Pour le cas du directeur de publication de l’Ouragan, cela n’est ni plus ni moins qu’un simple règlement de compte, car celui-ci s’est toujours illustré dans les dénonciations des failles de la justice burkinabè. Plusieurs fois, il a été l’objet de menaces par des agents de la justice. Maintenant que Issa Lohé Konaté est tombé dans l’escarcelle de la justice, il fallait par tous les moyens le réduire à néant. L’objectif visé ici n’est point de le sanctionner mais de faire disparaître à jamais son journal de la place du marché. C’est ce qu’il faut dénoncer avec toute la véhémence. Des exemples dans la sous-région notamment en Côte d’Ivoire montrent que malgré la virulence de certaines presses partisanes, des sanctions pareilles à celle de l’Ouragan n’ont jamais été prises. Et chaque jour que le bon Dieu fait, la presse abidjanaise est inondée de diatribes à l’endroit du pouvoir actuel. C’est bien cela la liberté d’expression.

Avec la condamnation du directeur de publication de l’Ouragan, c’est la démocratie burkinabè qui fait plusieurs pas en arrière. Si les acteurs de la justice reconnaissent eux-mêmes souvent que le procès a une valeur pédagogique, ils devraient se rendre à l’évidence que dans l’affaire l’Ouragan, la barre a été trop montée. C’est la première fois que l’on assiste à une telle peine au Burkina, surtout celle allant à la privation de liberté d’un journaliste pour ses écrits. Cette condamnation vient-elle sonner l’heure du musellement des hommes de médias ?

Cet acharnement procédurier sera-t-il suffisant pour effrayer les ouvriers de la plume et du micro ? Assurément pas. C’est pourquoi, il faudrait que le procès du 29 octobre 2012 au lieu de servir de jurisprudence serve surtout de point de départ d’une prise de conscience de la nécessité de protéger le journaliste dans l’exercice de son travail. La dépénalisation du délit de presse ne signifie aucunement que le journaliste n’est pas responsable civilement. Il s’agit ici de proscrire les sanctions pénales dont la privation de la liberté. « La dépénalisation des délits de presse est conçue et promue pour donner un contenu plus objectif à la liberté de la presse, et qu’elle ne consacre ni l’irresponsabilité, ni la déresponsabilité, encore moins l’impunité », soutient la Société des éditeurs de la presse privée du Burkina

La Rédaction

 Commentaires