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Sidwaya N° 7576 du 7/1/2014

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Route Dédougou-Nouna-Djibasso-frontière du Mali : Entre doutes et assurance
Publié le mardi 7 janvier 2014   |  Sidwaya


Route
© Autre presse par DR
Route Dedougou-Nouna-frontière Mali


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Le 7 décembre 2013, les travaux de la route Dédougou-Nouna-frontière du Mali sont déclarés exécutés à 80%, et la fin de la construction du pont sur le fleuve Mouhoun, prévue dans trois semaines. Le 30 décembre de la même année, soit trois semaines après, la réalité semble différente sur le terrain, avec deux grands ponts inachevés et trois portions non bitumées.

La réalisation de la route Dédougou-Nouna-Djibasso-frontière du Mali est en phase très avancée. Toutefois, la portion Dédougou-Barakuy (20km au Nord-Ouest de Dédougou) n’est pas bitumée, tout comme celle qui traverse la ville de Djibasso (65 km de Nouna). Situation identique également sur le tronçon Kolonkan-frontière du Mali, où des travaux de remblayage étaient toujours en cours, le 28 décembre 2013. Par ailleurs, le pont en structure métallique-béton sur le Mouhoun, est encore en construction. Quant à celui de Soniko au poste frontière de Madouba, en structure mixte également, il est en stand by. Mais les techniciens du tandem Société des routes et bâtiments et l’Africaine des travaux publics
(Soroubat-ATP), commis à la tâche, se disent confiants.

Cette route, longue de 143,7 km, est un projet de désenclavement de la Boucle du Mouhoun. Le financement estimé à plus de 35 milliards de FCFA est assuré par le Millennium challenge account (MCA). C’est aussi un projet intégrateur avec le Mali. Le gouverneur de Ségou (Mali) avait pris part au lancement des travaux de construction, le 19 janvier 2012, par le Premier ministre, Luc Adolphe Tiao. Deux années plus tard, on constate que la voie est rechargée. Le 29 décembre 2013, le directeur du projet au sein de Soroubat-ATP, Lofti Mazouz, a évalué le taux d’exécution à 87%.

Dédougou-Nouna partiellement bitumée, Djibasso sauté

Mais sur le terrain, tout commence par des déviations, dès Dédougou. A partir du rond-point Nazi Boni, les usagers doivent sillonner les ruelles avant de déboucher sur une autre déviation, en dehors de la ville. Les ouvriers sont à pied-d’œuvre avec un rouleau compresseur. Les voies de déviation sont poussiéreuses et périlleuses à proximité du fleuve. Les motocyclistes deviennent tout ocres et couverts de masques de poussière. Vu de loin, le pont en construction sur le Mouhoun est à l’étape de charpentage. Comme ce pont, il reste pas mal de travaux à parachever.

De Dédougou jusqu’au fleuve Mouhoun et au-delà, il n’y a point de bitume, ce 27 décembre. On y voit plutôt de nombreux petits ponts en simple ou en double. La voie est barrée à plusieurs niveaux de troncs d’arbres et de cailloux. Il faut atteindre le village de Barakuy, après 20 km de parcours, pour voir un mince enduit superficiel. C’est la couche d’accrochage sur laquelle on posera la couche de revêtement, expliquent les techniciens.

Plus loin, on aperçoit enfin, le goudron, en enduit superficiel bicouche. De part et d’autre de la largeur de la chaussée, les gravillons ne sont pas tous fixés et crépitent au contact des pneus de véhicules. Et c’est ainsi jusqu’à Nouna.

Faisant chemin entre Nouna et Djibasso le lendemain, le constat n’est guère différent. Sauf que des groupes d’employés s’affairent à réaliser les caniveaux comme à Bomborokuy et dans la quasi-totalité des villages traversés ; d’autres installent la signalisation horizontale, aménagent les bordures de la voie et construisent des descentes d’eau.

On constate aussi beaucoup de déchets d’animaux sur la voie. La route, toujours en construction, est déjà prise d’assaut par des charretiers tractés par des ânes, mais aussi par des chevaux, en compagnie généralement de chiens. Des camionnettes, dont une porte l’inscription « Ançar edine », y circulent aussi. Les panneaux de signalisation sont inexistants.
A l’intérieur de Djibasso, pas de goudron, mais des caniveaux en construction. Le domicile du maire et plusieurs autres locaux sont coupés de la voie par un de ces caniveaux. Le bourgmestre rase les murs de ses voisins pour accéder à sa porte.

La couche de bitume pas assez épaisse

Dès la sortie de Djibasso, en direction du Mali, le bitume refait surface. La voie toute neuve, fait penser plutôt à une grande allée de jardin remplie de pierres concassées. Les véhicules passent en soulevant de la poussière et en projetant les gravillons. Le goudron « s’arrête » à une dizaine de kilomètres de la frontière, laissant la place à des travaux de remblayage. Des camions continuent d’arroser la voie rouge et d’autres passent au damage. A ce niveau aussi, le pont de Soniko, en texture mixte, n’est pas construit.

Sur ce projet routier, il reste encore des tâches qui, mises ensemble, deviennent assez importantes. L’on se demande à juste titre si le délai de 24 mois sera respecté. La maire de Nouna, Mariam Fofana, étant absente, c’est son premier adjoint qui s’est exprimé à ce sujet. Il s’en inquiète et son lapsus en dit long. "Le délai risque d’être respecté par l’entreprise", a affirmé Pascal Symboro, par ailleurs ancien maire de Nouna (2000-2005). Mais, il craint surtout pour la durabilité de la route. "J’ai déjà vu une voiture qui a brûlé là-bas (en allant vers Dédougou, ndlr). Je ne sais pas si cela est dû à l’effet de chaleur, mais le goudron s’est décollé, presqu’aussitôt", s’inquiète-t-il.

"Pour le profane que je suis, je ne peux pas... en dire plus. Mais, des gens disent qu’effectivement, la couche est assez mince", a-t-il poursuivi, avant de s’interroger : "je me demande si avec les gros porteurs maliens qui transitent souvent ici (...) le bitume va tenir longtemps". Son avis est partagé par plusieurs usagers. "La voie est large, mais il y a des endroits où elle n’est pas bonne. Je ne suis pas un technicien, mais je constate qu’elle fait danser par endroits, on dirait que ce n’est pas bien nivelé", fait savoir Assami Ouédraogo, agent à la perception de Djibasso. Par rapport à ce qu’il voit ailleurs, il estime que la voie n’est pas lisse. "Mais ça dépend peut-être du financement", ajoute-t-il.

Par contre, beaucoup de villageois dont certains découvrent le bitume, sont tout enthousiastes. Lombo Dakuy trouve la voie "très bonne", depuis son village de Barakuy jusqu’à Nouna et un peu moins, en repartant vers Dédougou, c’est-à-dire là où la route n’est pas encore bitumée. A Konankoïra (25 km au Nord de Nouna), les villageois ont peu de commentaires à faire. "C’est un peu bon, on est contents", déclare Didier Traoré, un jeune cultivateur de 19 ans. Sans doute sorti prématurément du circuit scolaire, il parle peu le français et explique qu’aucun de ces 13 autres camarades présents avec lui, n’a déjà vu de voie bitumée, auparavant. Amadouba Dabré Diarra, du village frontalier de Madouba, est, lui aussi, ravi du bitume, qui n’est « même pas » totalement couché dans son village.

Soroubat-ATP reste serein

Alors que certains s’inquiètent de la qualité de la route, le groupement d’entreprises Soroubat-ATP se veut être rassurant. Selon Forat Bassen, coordonnateur des travaux d’ouvrage, le délai prévu sera respecté. Sur le retard dans la réalisation du pont sur le Mouhoun, il explique que cela n’est pas imputable à son entreprise, mais plutôt à des modifications introduites dans le plan initial d’exécution. Retrouvé sur le chantier en mission routinière, il dit comprendre les inquiétudes des uns et des autres concernant la qualité du goudron. Mais, il précise qu’il s’agit d’un revêtement de chaussée, en enduit bicouche et non en bitume enrobé. En clair, il ne faut pas s’attendre à voir un goudron lisse.

Les ouvriers n’ont pas dit le contraire. Chaabane Kamel, conducteur de niveleuse et finisseur, Noureddine Scimi, centraliste ou Mohamed Souid, responsable transport, se disent sereins pour le respect du délai imparti. De l’avis de ces techniciens retrouvés à leur lieu d’hébergement de Nouna, des pelles (Caterpillar) viendront creuser d’autres caniveaux à Djibasso. Ce qui explique, selon eux, que l’intérieur de la ville ne soit pas encore goudronné par crainte que les machines n’endommagent le bitume déjà couché. Quant au pont de Soniko, il requiert les mêmes compétences que le pont sur le Mouhoun et sera exécuté après celui-ci.

L’ingénieur qui dirige le projet à Souroubat-ATP donne des détails et rassure, lui-aussi : « Le pont du Mouhoun n’est pas en retard », dit Lofti Mazouz. Il assure que la charpente du pont sera achevée, d’ici à fin janvier 2014 pour laisser place aux travaux de génie civil (béton et équipement). Les travaux de charpentage sur le pont Soniko démarreront, le 8 février prochain. Il faudra ensuite, un mois pour la partie génie civil et équipement.

En ce qui concerne les trois portions non bitumées, elles ne constituent pas du tout, un souci pour lui. "Ce qui importe, c’est l’achèvement de ses ponts", fait-il savoir.
Enfin, sur la qualité de la voie, il affirme qu’il n’y a "pas de problème" et rappelle que la plupart des voies bitumées au Burkina Faso sont en revêtement bicouche, à l’instar de la voie Koudougou-Dédougou. Les graviers non fixés finissent par disparaître pour laisser apparaître une surface plus unie. « Il faut circuler (dessus) pendant un bout de temps pour voir apparaître l’uni », a-t-il renseigné. Cette voie peut demeurer en bon état pendant dix ans, selon l’ingénieur, et supporter des véhicules dont la charge à l’essieu va jusqu’à 13 tonnes. Il reconnaît néanmoins, qu’il y a moins de confort sur la voie en bicouche que sur celle en bitume enrobé car il s’agit de son avis, d’une voie structurante à vitesse limitée.

Des travaux hors marché

Le groupement d’entreprises Soroubat-ATP semble avoir conquis le cœur des populations bénéficiaires de cette infrastructure. "C’est déjà très bon. On est désenclavé. Pour rallier Dédougou à Nouna, il fallait 3 heures, maintenant, il en faudra 40 minutes", s’est réjoui le premier adjoint au maire de Nouna. Aussi, les habitants de Nouna ont obtenu du groupement un engagement à effectuer des travaux de reprofilage des voies urbaines, à titre gracieux. En plus du remblayage des ruelles, ces travaux non prévus dans le marché, permettront de drainer l’eau de ruissellement, car les locaux de la gendarmerie, d’Ecobank et de l’ONEA entre autres, ont déjà connu l’inondation. Mais Soroubat/ATP qui a dit oui, tarde à s’exécuter. De plus, des caniveaux, bien que non achevés au secteur N°6, drainent l’eau vers un cimetière, suscitant des inquiétudes chez les populations.

Pour M. Mazouz, le reprofilage sera fait à la fin des travaux, mais précise-t-il, il faut que la mairie de Nouna fasse des études, afin d’éviter que le drainage occasionne d’autres désagréments. Outre le chargement des ruelles pour Nouna, le groupe rappelle que la trentaine de locaux réalisés pour abriter son administration dans cette ville, sera rétrocédée à la commune. Il évoque aussi 25 mille plants mis en terre et le réaménagement des sites détruits par les travaux. L’ingénieur Mazouz estime que son groupe fait bien son travail pour mériter la confiance dans ce marché qu’il juge "très exigeant".

Aimé Mouor KAMBIRE

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