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Le Quotidien N° 953 du 28/12/2013

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Aide alimentaire au burkina : les grains de la honte
Publié le samedi 28 decembre 2013   |  Le Quotidien




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Ne continuons pas à donner raison à René Dumont. En 1962, cet agronome, fin connaisseur des brousses africaines, avait jeté un pavé dans la mare à travers son ouvrage « L’Afrique noire est mal partie ». Sur le plan agricole, son analyse reste pertinente, plus d’un demi-siècle après. Les images de grandes puissances offrant des vivres à un pays africain sont tellement fréquentes qu’elles en deviennent banales. L’Afrique, ou du moins certains de ses pays, se complait toujours à tendre la sébile pour demander des grains de maïs ou de riz. Le Burkina fait partie de ce groupe de pays qui ne sont pas encore sortis de la logique de l’aide alimentaire, donc de l’assistanat.

On y est tellement habitué que même sans catastrophe naturelle, on reçoit de l’aide. Récemment encore, c’est le Japon qui se vantait d’offrir des tonnes de riz au pays dit des hommes intègres. L’empire du Soleil levant est dans une stratégie qui fait son affaire. On ne peut donc pas lui en vouloir. C’est plutôt le Burkina qui doit changer sa vision de la coopération avec ce pays, en lui demandant de lui apprendre à pêcher, plutôt qu’à lui donner du poisson.

L’aide alimentaire, aussi minime soit-elle, est la pire forme de dépendance. Il n’y a aucune gloire à demander, même dans la société, à manger. C’est l’expression achevée de la misère, que de ne pas pouvoir subvenir à ses besoins alimentaires, les plus primaires qui soient, dans l’existence de l’homme. Un Burkina digne ne devrait plus quémander un seul grain pour sa population. Ce, d’autant que le système de l’aide alimentaire a des effets pervers. Depuis 1983, des ONG comme Afrique Verte avaient en effet tiré la sonnette d’alarme :

« (…) L’aide alimentaire ne résout pas le problème de la faim, paradoxalement elle contribue à l’aggraver en créant une dépendance dangereuse. En effet, loin de correspondre à un geste de solidarité envers le Tiers Monde, cette forme de coopération n’est trop souvent qu’une arme des pays du Nord au service d’une stratégie d’écoulement de leurs excédents, de conquête de nouveaux marchés dans les pays du Sud. »

L’ONG expliquait que l’aide « ne profite pas aux plus défavorisés ; décourage les producteurs locaux par la concurrence qu’elle leur fait et provoque l’orientation vers les cultures d’exportation, au détriment des cultures vivrières ; dévalorise les produits locaux en introduisant de nouvelles habitudes alimentaires et en créant une demande pour des produits nouveaux qu’il faudra ensuite importer ». On peut se demander, en effet, si cette persistance à tendre l’écuelle, malgré son caractère avilissant, ne fait pas l’affaire de certains.

Les circuits de redistribution de cette aide aux populations défavorisées peuvent laisser passer les « fonctionnaires mange-mil ». Dans un passé récent, des scandales ont éclaboussé des responsables provinciaux, pour avoir dissipé l’aide destinée aux plus démunis. Ce qui est sûr, les Burkinabè n’ont plus entière confiance en leur Administration publique où sont tapis des fonctionnaires cleptomanes.


Une raison de plus pour nos dirigeants, de voir plus grand en se départant de cette forme d’aide qui nous mène nulle part. Face à une puissance économique et technologique comme le Japon, on a mieux à demander que des sacs de riz. Même si le pays nous en faisait la proposition, il nous revient d’exprimer notre vision de l’aide, qui n’est pas celle qui est en cours depuis un demi-siècle.

Le plus grand service que nous rendraient le Japon et tous les autres pays développés, qui se veulent si généreux, c’est de nous amener à nous passer de l’aide. Cela passe par une agriculture performante dont le premier objectif est l’autosuffisance alimentaire. Sinon, tant qu’un seul grain de céréale sera reçu au titre de l’aide, ce sera le témoignage de l’échec de nos politiquesagricoles.

Tout en reconnaissant les efforts des pays développés, des ONG et des institutions internationales, qui ont permis de sauver des vies lors des crises alimentaires, il faut se dire qu’il est temps de tourner la page. Les dirigeants burkinabè doivent enfin rompre avec l’aide alimentaire, par leur inventivité et leur génie .

La Rédaction

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