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Le Pays N° 5223 du 23/10/2012

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Sécurité alimentaire : Pour une meilleure gestion des retenues d’eau
Publié le mercredi 24 octobre 2012   |  Le Pays




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Au moment où la communauté internationale vient de célébrer la Journée mondiale de la sécurité alimentaire le 16 octobre, des efforts importants restent à fournir dans notre pays pour maintenir et améliorer les avancées enregistrées dans la gestion des multiples réservoirs d’eau ou barrages construits à travers le Burkina.

Le village de Boura, à environ 50 km de Léo, ne connaît pas a priori de gros problèmes de sécurité alimentaire. Les précipitations annuelles qui sont d’environ 1000 mm, permettent chaque année de pratiquer l’agriculture pluviale en saison des pluies. Il existe par ailleurs à Boura un barrage qui mobilise une importante ressource en eau qui répond à plusieurs besoins des populations et du bétail. Compte tenu des volumes disponibles (de l’ordre de 4 millions de m3), l’Office national des barrages et de l’irrigation (ONBI) a aménagé un périmètre irrigué afin que les populations puissent se servir de cette eau à des fins de production en toute saison et surtout en saison sèche. C’est ainsi que le périmètre irrigué en aval du réservoir du nom de Coopérative des riziculteurs Kama Nadié de Boura (CORIKAB) a vu le jour à partir de 1984. L’irrigation des parcelles du CORIKAB se fait par gravité : l’eau s’écoule du barrage par une vanne de fond située au pied de la digue dans des canaux cimentés situés de part et d’autre du périmètre, et surélevés par rapport aux parcelles ; l’excès d’eau est évacué par le marigot qui fait office de drain. En saison sèche, les parcelles sont consacrées à la culture de légumes, de maïs ou de riz, et en saison des pluies, à la culture de riz. D’une superficie initiale de 40 hectares, ce périmètre aménagé se révèle vite utile mais trop petit pour les populations qui demandent son extension. Ainsi, en 1993, CORIKAB est réhabilitée et étendue à 70 ha par le Bureau d’études et de recherche appliquée (BERA).

Pour plus d’espaces irrigués

Treize ans plus tard, c’est-à-dire en 2006, une autre réhabilitation-extension a lieu sur le même périmètre. En 2009, la FAO réalise le Projet d’intensification agricole pour la maîtrise de l’eau (PIAME) en amont du barrage pour répondre à un besoin exprimé par les populations de Boura d’avoir plus d’espaces irrigués : là, l’eau est pompée dans le réservoir puis distribuée dans les parcelles. Même si moins de 15% des ménages possèdent une parcelle sur les deux périmètres, aujourd’hui, CORIKAB et PIAME couvrent une superficie irriguée de 90 ha et occupent un certain nombre d’habitants du village. Les grandes plaines en amont et en aval du barrage permettent la culture pluviale du riz de plaine pendant l’hivernage. D’après une étude réalisée par le Volta Projet 3 : Gestion des petits barrages du programme de Défi pour l’eau et l’alimentation (CPWF) dans le bassin de la Volta (VBDC), les rendements ne sont pas très élevés, surtout pour les cultures maraîchères, mais ils permettent néanmoins de dégager un revenu. Selon M. Daouda Nadié, président de CORIKAB, « on ne peut dire jusqu’à quel point ce périmètre est important pour les populations. Cela permet de maintenir les jeunes qui partaient au Ghana. A ce jour, nous avons encore une centaine de demandes de parcelles que nous ne pouvons pas satisfaire ». Avec ces 317 occupants, le périmètre « est trop petit » pour accommoder tout le monde. Pour M. Nadié, « avec les deux campagnes que nous réalisons par an, on peut dire que le périmètre contribue à améliorer la situation des occupants ».

L’écoulement des produits ne pose aucun problème

L’écoulement des produits ne pose aucun problème à la fois sur le marché local et avec les commerçants venus du Ghana. De l’autre côté du barrage, à PIAME, autre son de cloche. De nombreuses difficultés parsèment le parcours de ce projet allant de la défaillance des machines à la tuyauterie « bouchée » par les riverains en passant par la divagation des animaux, qui reste un grand problème avec un énorme potentiel de conflit. Selon M. Aliassou Zallé, chef de zone, « la solution passe par la clôture du site, la résolution du problème avec les riverains qui veulent utiliser le site comme pâturage et aussi revoir l’installation des machines ». En plus, l’eau n’irrigue pas toutes les parcelles qui se trouvent sur les 20 hectares aménagés. De 160 exploitants au départ, ils ne sont plus qu’une vingtaine à ce jour. « Tout le monde est parti à la suite de nombreux problèmes. La campagne dernière, il n’y avait que 23 exploitants », déclare le technicien Zallé qui note, lui, des difficultés d’écoulement des produits de maraichage. « Ce sont nos voisins du Ghana qui viennent chercher nos produits. On nous impose des prix qui ne nous arrangent pas. » Pourtant, l’engouement était réel au départ dans la mesure où cela aide beaucoup, surtout les jeunes qui sont désœuvrés en saison sèche.

Quelle gestion de ces périmètres ?

A Boura, chaque périmètre est géré par un groupement du même nom, c’est-à-dire CORIKAB et PIAME. L’organe de gestion comprend de deux côtés une assemblée générale de 75 délégués, un conseil de gestion de 15 membres élus avec un bureau exécutif de 9 membres. On note également des commissions spécialisées : approvisionnements et crédits, gestion et entretien des ouvrages d’eau, commercialisation, formation et renforcement des capacités techniques et un comité de contrôle en plus du gérant. Des règles de fonctionnement établissent à CORIKAB une redevance annuelle de 2000 F CFA pour l’eau. Il ressort de l’étude réalisée par V3 que « le paiement et le non-paiement des cotisations ainsi que la participation aux travaux d’entretien du périmètre sont notés sur un cahier pour chacun des membres. La commission en charge de l’approvisionnement et des crédits doit veiller à l’établissement de cette liste. De la même manière, elle doit amender les membres ne respectant pas le règlement intérieur du groupement. Lors du non-paiement de la cotisation annuelle, deux rappels à l’ordre sont émis à l’exploitant par la commission avant que cette dernière ne l’invite à quitter le périmètre. Concernant la non-participation aux travaux d’entretien, l’amende s’élève à 1000 F CFA. Lorsque les absences répétées à ces travaux deviennent trop nombreuses, les membres sont invités à quitter le périmètre. » Mais à PIAME, c’est une cotisation annuelle de 15 000 F CFA qui est demandée pour participer à l’achat du carburant pour la motopompe et son entretien. Tout manquement est sanctionné par deux rappels avant une amende de 1000 F CFA. Dans les deux cas, les cotisations ne rentrent pas comme il le faut et aucune sanction n’est prise. « C’est quand la campagne approche que certains viennent payer », explique le président de CORIKAB, M. Nadié. Mais les mauvais payeurs continuent malgré tout d’exploiter leurs parcelles, relèvent, pour leur part, les chercheurs du projet V3. Le manque d’entretien des canaux d’irrigation, la déficience du réseau de drainage sont à la base du manque de desserte de certaines parcelles et d’inondations à CORIKAB.

Agir pour le futur !

Les dysfonctionnements relevés par l’étude du Projet 3 du VBDC ne sont pas spécifiques à Boura. C’est pourquoi les chercheurs du Projet tirent une conclusion sous forme d’interrogation. « Mettre en place une « organisation » ne signifie pas que celle-ci fonctionne. De même, définir un « règlement » ne signifie pas qu’il sera appliqué. Les paysans de Boura sont sans aucun doute conscients des conséquences de ces dysfonctionnements : la dégradation rapide des aménagements. Mais n’est-il pas plus facile de trouver un bailleur de fonds pour réhabiliter ces aménagements que d’appliquer des règles qui risquent de perturber le fonctionnement social ? » Pour la sécurité alimentaire, il va falloir certainement plus de rigueur et d’imagination au niveau de ce genre de périmètre dont l’apport à la stabilité sociale n’est plus à démontrer. Des efforts supplémentaires sont nécessaires pour maintenir et améliorer les bénéfices des infrastructures d’eau à des fins de production agricole afin de garantir des investissements durables.

Sidi Coulibaly, chargé de communication du GWP-Afrique de l’Ouest

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