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Sidwaya N° 7533 du 31/10/2013

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Mamadou Ouattara, directeur général du FER-B : « Le déficit d’entretien des routes sera comblé »
Publié le vendredi 1 novembre 2013   |  Sidwaya


La
© Autre presse par DR
La route Ouahigouya–frontière du Mali


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Il se nomme Mamadou Ouattara. Inspecteur du Trésor, ce diplômé de Hautes Etudes en gestion de la politique économique de l’Université de Cocody en Côte d’Ivoire est depuis le 15 juin 2011, le Directeur général (DG) du Fonds d’entretien routier du Burkina (FER-B). Précédemment directeur de l’administration et des finances (DAF) dudit Fonds, c’est un homme imprégné des réalités du FER-B que Sidwaya a reçu le jeudi 16 octobre 2013 pendant plus de 2 heures d’horloge. Mamadou Ouattara aborde dans cette interview l’éternelle question de l’entretien du réseau routier du Burkina Faso, les difficultés et les perspectives du Fonds. L’actualité nationale et internationale de cette période a par ailleurs été soumise à l’analyse de l’hôte des journalistes.

Sidwaya (S) : Dites nous qui est le DG du Fonds d’entretien routier du Burkina (FER-B) ?

Mamadou Ouattara (M.O) : Je tiens d’abord à remercier le directeur général de Sidwaya et toute son équipe pour l’opportunité qui est offerte au FER-B en vue de s’adresser aux lecteurs des éditions Sidwaya, se faire davantage connaître. Mamadou Ouattara est un inspecteur du Trésor. Il est également spécialiste en gestion de politique économique, précédemment directeur de l’administration et des finances (DAF) du Fonds d’Entretien Routier du Burkina (FER-B) avant d’en devenir le directeur général. Mamadou Ouattara est marié et père de trois enfants.

S : Peu de gens connaissent le FER-B. Quels sont ses statuts, ses missions, etc. ?

M.O : Le FER-B est un établissement public de l’Etat communément appelé EPE qui a pour mission principale d’assurer la collecte, la mobilisation des ressources et de financer l’entretien routier sur l’ensemble du territoire national, c’est-à-dire le réseau routier classé et celui de pistes rurales, en conformité avec la politique gouvernementale. Nous sommes aussi chargés de financer la gestion du réseau regroupant les activités telles que le suivi du réseau, le comptage du trafic, la surveillance des barrières de pluie et le contrôle de la charge à l’essieu. Le FER-B est placé sous deux tutelles ; une tutelle technique assurée par le Ministère des Infrastructures, du Désenclavement et des Transports et une tutelle financière assurée par le ministère de l’Economie et des Finances. Pour son fonctionnement, le FER-B s’appuie sur un Conseil d’Administration (CA) et une Direction Générale. Le CA est composé de 9 membres et de 4 observateurs dominés essentiellement par les acteurs privés et la société civile. C’est le secteur privé qui en assure la présidence, par l’entremise de la Chambre de Commerce et d’Industrie du Burkina.

S : Avec la prédominance du secteur privé dans la gestion du FER-B, pourquoi avoir gardé le statut d’établissement public de l’Etat ?

M.O : Ce ne sont pas deux choses contradictoires, dans la mesure où le FER-B est financé par l’Etat. Ce sont des ressources publiques qui sont mises à la disposition du FER-B, mais l’Etat a estimé qu’il faut davantage impliquer les usagers des routes, les opérateurs économiques dans la gestion quotidienne du Fonds pour des besoins de transparence et d’efficience. Du reste, nous avons bénéficié de deux dérogations en matière de gestion des ressources humaines et de mise en place d’une comptabilité privée. Cette réforme a eu pour conséquence la suppression des postes de contrôleur financier et d’agent comptable, comme c’est le cas dans une comptabilité publique. En revanche, nous avons un auditeur interne et un directeur financier et comptable recrutés directement du secteur privé. Notons également que le paiement des décomptes se fait au FER-B sans l’intervention d’aucune tutelle. Ce sont des dérogations que l’Etat nous a données sans pour autant nous retirer le statut d’EPE et cela pour nous permettre d’atteindre les objectifs essentiels qui nous sont assignés. Le statut du FER-B peut évoluer vers une société d’Etat selon les besoins. Tout est une question de souveraineté de l’Etat.

S : Avec tous ces besoins de financement, comment faites-vous pour alimenter votre budget ?

M.O : Notre budget est alimenté par la subvention de l’Etat et nos ressources propres, lesquelles sont constituées des recettes du péage routier. Chaque fois que les usagers de la route empruntent une route bitumée, cela donne lieu au paiement d’une taxe qu’on appelle le péage routier. Ces ressources sont collectées par le Ministère de l’Economie et des Finances qui reverse les montants au Fonds d’entretien routier du Burkina. Sur les cinq dernières années, ce sont en moyenne 13 milliards de F CFA par an que l’Etat a mis à la disposition du Fonds.

S : M. le Directeur général, venons-en au concept d’entretien routier. De quoi s’agit-il concrètement ?

M.O : Il faut percevoir la notion d’entretien à deux niveaux que sont l’entretien courant et l’entretien périodique des routes. Après la construction d’une route, elle vit, se détériore et finit par s’amortir. Afin de lui donner une durée de vie plus longue, la route a besoin de soins quotidiens pour tenter de la maintenir dans son état initial et d’offrir ainsi un certain niveau de service aux usagers. Malgré cet entretien courant qui consiste en de petites tâches presque journalières, la route finit par subir des dégradations accentuées sous l’effet du trafic et des intempéries auxquelles l’entretien courant à lui seul ne peut remédier. C’est en ce moment qu’intervient l’entretien périodique. Ce sont des travaux semi lourds, plus importants, qui s’effectuent tous les 5 à 7 ans pour les routes en terre et de 7 à 10 ans pour les routes revêtues. Cet entretien consiste à renouveler la couche de roulement tandis que l’entretien courant s’intéresse à la surface et aux dépendances de la route. Tous ces deux types d’entretien sont à distinguer de travaux de réhabilitation et de reconstruction qui sont des travaux neufs. Pour vous donner quelques exemples, le travail qui a été fait sur l’axe Ouaga-Sakoinsé n’est pas de l’entretien routier, de même que ce qui est en train d’être fait sur la route Sakoinsé-Boromo. Ce sont des travaux de réhabilitation et les ressources du Fonds ne doivent pas être affectées à cela.

S : Comment maintenir des routes qui dès leur construction posent problèmes ?

M.O : Il est possible que lors d’une réception provisoire, il soit constaté des anomalies ou des dégradations bénignes. Cependant, il est à signaler qu’une route nouvellement construite ou reconstruite fait l’objet de garantie sur une période de 12 mois. A l’expiration de ce délai, toutes les dégradations et malfaçons éventuelles sont obligatoirement corrigées aux frais de l’entreprise avant que la réception définitive soit prononcée. Par conséquent, il est normalement difficile qu’une route en mauvais état soit reversée à l’entretien. Cependant, force est de reconnaître que notre réseau routier n’a pas toujours bénéficié d’entretien adéquat ; ceci a accentué les dégradations rendant l’entretien courant quasi inopérant. Il y a tout de même un espoir à ce niveau dans la mesure où avec l’accompagnement du Millenium Challenge Corporation (MCC) un vaste programme d’entretien périodique est en cours de réalisation. C’est dire que dans quelques années, ce déficit d’entretien sera comblé.

S : Est-ce cette insuffisance de ressources qui justifie le mauvais état de la route Boromo-Sakoinsé ?

M.O : C’est une route dont le délai de réhabilitation est atteint et qui naturellement est en cours de reprise. L’entreprise chargée des travaux est actuellement sur le terrain.

S : Un projet d’entretien courant de l’axe Bobo-Faramana- frontière Mali vient d’être lancé. On n’a pas perçu pourquoi un projet pour l’entretien courant ?

M.O : Les travaux qui sont en cours de démarrage sur cet axe routier sont plutôt de l’entretien périodique. Ces travaux sont programmés dans le cadre du Fonds Incitatif pour l’Entretien Périodique (FIEP) justement mis en place avec l’accompagnement du MCC. L’Agence des Travaux d’Infrastructures du Burkina (Agetib) assiste le FER-B pour la réalisation des travaux du FIEP en qualité de Maître d’Ouvrage Publique Délégué.

S : L’entretien périodique de la route Bobo-Banfora a été annoncé puis annulé, aux dernières nouvelles. Y a-t-il des entreprises performantes capables de répondre à vos attentes ?

M.O : La route Bobo Banfora frontière Côte-d’Ivoire fait partie des projets du FIEP. Les procédures de passation des marchés sont en cours et la route va connaître un entretien périodique. Il est à noter que le FER-B sélectionne selon les procédures en vigueur au Burkina des entreprises détentrices d’agrément techniques délivrés par les autorités compétentes. Ces entreprises sont donc supposées compétentes pour exécuter ces travaux. Par ailleurs, le FER-B accompagne par des formations continues tous les acteurs intervenant dans l’entretien routier.

S : Vous est-il arrivé de retirer des marchés à des entreprises défaillantes ?

M.O : Il y a eu des cas où nous avons été obligés de résilier des marchés conformément à la réglementation en vigueur. En outre nous pouvons signaler que même les retards sont sanctionnés par des pénalités.

S : Ne vous arrive t-il pas souvent d’avoir affaire à des intouchables ?

M.O : Nous n’avons pas encore rencontré cela au FER-B. Il faut vous rappeler que nous assurons le financement, que nous ne sommes pas des agences d’exécution. Nous avons des conventions avec les structures centrales, les directions régionales, les bureaux de contrôle pour suivre ces entreprises sur le terrain. Ce sont ces acteurs-là qui donnent les informations au FER-B pour nous permettre de résilier les contrats. Mais pour le moment nous n’avons pas eu d’entraves ou d’autres problèmes.

S : Est-ce qu’il existe des routes considérées comme prioritaires en termes d’entretien ?

M.O : Le réseau routier classé composé de 15 272 km est systématiquement pris en charge dans le cadre de l’entretien. Quant aux 46 095 kilomètres de pistes rurales dont seulement 12 852 km sont aménagés, seuls quelque 3 000 km sont pris en charge au regard de la modicité des ressources du FER-B. Toutefois, eu égard à l’importance des pistes rurales pour notre pays, ce réseau mériterait d’être entièrement pris en charge.

S : Vous êtes sous tutelle de deux ministres, est-ce que cela vous permet véritablement d’agir en toute liberté ?

M.O : Jusque-là, le Conseil d’Administration du Fonds fonctionne normalement, le budget est voté normalement. Nous sommes l’un des rares établissements publics de l’Etat à disposer en totalité du montant de notre budget. Ces 5 dernières années, nous avons mobilisé 100% de nos recettes. Pour le moment nous n’avons pas eu d’entraves liées à aucune de nos tutelles.

S : Vous avez évoqué l’insuffisance des fonds au regard des besoins existant. Comment mobilisez-vous alors les fonds supplémentaires ?

M.O : Au stade actuel des choses, nous nous contentons des recettes qui sont les nôtres. Toutefois, des réflexions sont en cours en vue du passage du FER-B en un fonds de seconde génération avec donc la possibilité de procéder à des levées de fonds supplémentaires pouvant permettre de répondre aux besoins d’entretien.

S : Vous avez dit tantôt que vos fonds proviennent du système de péage routier. Pourtant nous avons entendu dire que ce système sera privatisé. Que renferme cela véritablement ?

M.O : Cela fait partie des reformes engagées. Aujourd’hui, le péage routier est collecté par le trésor public qui le reverse à son tour au fonds d’entretien routier. A l’avenir, il s’agira de confier cette tâche à des concessionnaires privés qui reverseront directement au FER-B la portion qui lui revient sans que cela ne transite par le Trésor Public comme c’est le cas actuellement ; ce qui constitue un avantage pour l’autonomie financière. La concession en cours constitue une phase pilote et ne concernera qu’une partie du réseau routier revêtue pour l’instant.

S : Pensez-vous que la privatisation va contribuer à augmenter ces fonds ?

M.O : C’est cela nos projections et cette phase pilote servira à confirmer ou à infirmer cette conviction. Nous nous sommes appuyés sur d’autres expériences concluantes dans des pays voisins comme le Bénin.

S : Comment une collectivité territoriale peut bénéficier de l’appui financier du fonds pour la réalisation des pistes rurales ou de route dans sa zone ? Qu’en est-il de l’entretien de la route Banfora-Gaoua ?

M.O : La route Banfora-Gaoua fait partie des routes répertoriées au niveau national et à ce titre, nous l’entretenons chaque année. L’étude pour le bitumage de cette route va bientôt commencer. Mais, ce processus pouvant prendre plusieurs années, le FER-B envisage un entretien périodique d’ici deux ans sur cet axe.
Le FER-B ne traite pas directement avec les collectivités territoriales. Ces dernières peuvent cependant s’adresser aux démembrements du Ministère des Infrastructures, du Désenclavement et des Transports (MIDT), chargés d’appliquer au plan local la politique du Gouvernement en matière d’infrastructures routières. Si le programme soumis pour financement au FER-B par les démembrements du MIDT est éligible, nous finançons.

S : Nous avons entendu sur les antennes d’une radio de la place une plainte d’un de vos clients mécontents à propos de retard de paiement de décomptes. Qu’en est-il M. le directeur général ?

M.O : Merci pour cette question. Je ne dirai pas que tout baigne au FER-B. Nous avons certes des limites, mais nous pouvons relever ici que les paiements se font dans un délai moyen de 16 jours. Pour le cas de l’entreprise dont il a été question dans cette émission sur le paiement des décomptes au FER-B, je dirais tout simplement qu’il y a eu un manque de communication. Nous aurions pu dans l’échange trouver une solution à ce problème. En réalité, à l’époque, des changements sont intervenus au sein de notre structure. En effet, depuis le 1er janvier 2013, la directrice financière et comptable n’était plus au FER-B parce que, appelée à siéger à l’Assemblée nationale. Elle ne pouvait donc plus continuer à exercer ses activités au FER-B. Vous vous rendrez compte qu’elle ne pouvait donc pas être responsable de retard de paiement de décompte à ce moment. Du reste, si cela était si vrai, d’autres plaintes s’en suivraient.

S : Les plaintes ne se limitent pas seulement au décaissement. Les gens se plaignent également de la sélection des entreprises. Comment se fait le choix des entreprises ?

M.O : Comment sélectionner les entreprises dans les règles de l’art et s’assurer que ces entreprises choisies exécuteront bien et à temps les travaux ? Tel est le challenge qui s’impose à nous. Je vous disais tantôt qu’il y a une relation entre le FER-B et les agences d’exécutions (entendez par là les différents directions centrales et régionales du MIDT (Ministre des Infrastructures, du Désenclavement et des Transports) qui montent des dossiers d’appels d’offres (DAO) que nous examinons et envoyons au Ministère de l’Economie et des Finances pour adoption conformément à la réglementation en vigueur en matière de passation de marché. Le FER-B n’a pas de procédures autres que celles des EPE.

S : Tout cela permet-il de juguler la corruption ?

M.O : La corruption est un débat permanent et nous essayons de mettre en place des garde-fous. C’est dans cet esprit que le FER-B a jugé bon d’impliquer le MIDT à travers ses démembrements au processus de dépouillement. Aussi, nous sommes en train d’élaborer une cartographie des risques dans l’entretien routier afin de prévenir les risques dans le processus de passation des marchés et d’exécution des travaux.

S : Il y a des situations qui font sourire ; des nids de poules peuvent durer des années sur une route et lorsqu’on apprend qu’une autorité doit y passer, on répare cette voie immédiatement sans forcément tenir compte de la programmation. Le citoyen lambda peut-il avoir le même droit ?

M.O. : Naturellement, autant quelqu’un peut se plaindre du paiement, comme celui qui l’a fait par la voix des ondes, autant tout usager peut se plaindre de la qualité des routes et des travaux. Dans ce cadre nous allons faire des sondages auprès de l’opinion nationale, dans notre plan de communication.
Dans le cadre de la programmation de l’entretien routier, ces cas sont prévus au moyen de travaux d’urgence. C’est dans ce même cadre que les interruptions de routes sont traitées. Ainsi se justifient les moyens que l’on déploie lorsque les autorités de ce pays doivent passer par une route dégradée pour se rendre dans des contrées éloignées.

S : Lorsqu’on voit aussi de petites fissures sur les routes, au fil des années qui s’aggravent, on se demande si vous avez les moyens de connaître de façon précise l’état même du réseau routier sous votre contrôle.

M.O. : Oui un inventaire de l’état du réseau est fait chaque année par les agences d’exécution, qui s’appuient d’ailleurs sur les résultats pour programmer les travaux d’entretien. Nous notons cependant qu’il s’agit d’œuvres humaines pouvant donc avoir des limites de divers ordres.

S : Par exemple sur l’Avenue Dimdolbsom, nous avons des nids de poules depuis le mois de mars et c’est maintenant qu’on a essayé de colmater. Est-ce qu’on ne peut pas vous taxer d’imprévoyance parce qu’au lieu de réparer un nid de poules qui nécessite peut-être quelques grammes de béton bitumineux, on attend 4 mois après pour mettre une charrette de béton bitumineux ?

M O : Vous avez parfaitement raison. Ces situations sont parfois dues à la lourdeur des procédures de passation de marchés qui ne permettent pas toujours d’intervenir à temps. Signalons que le FER-B n’assure pas pour l’instant l’ensemble de la voirie communale. En revanche, l’entretien des traversées des routes nationales est assuré par le FER-B dans le cadre de la programmation faite par le MIDT. Pour le moment, la voirie urbaine relève de la compétence des communes. Nous intervenons de temps en temps sur demande des autorités de tutelle.

S : A vous entendre, monsieur le directeur général, on se rend compte que tout n’est pas parfait au FERB. Quelles sont les difficultés que vous rencontrez ?

M.O. : En dehors des procédures de passation des marchés et des questions techniques relatives à la programmation des travaux dont j’ai parlé tantôt. On peut aussi relever l’insuffisance des ressources financières… Mais je pense que les reformes entreprises qui consistent à faire évoluer le FER-B vers un Fonds de seconde génération pourraient permettre de résorber cette difficulté à terme. L’entretien courant est un secteur particulier et, à ce titre, il doit avoir des réponses particulières... Nous pouvons aussi noter comme autres difficultés la faible capacité d’absorption du fonds, compte tenu d’un décalage entre l’exécution des travaux d’entretien routier et la programmation budgétaire. En effet, l’entretien routier se fait en deux temps au cours d’un même exercice ; la première partie de l’entretien se fait pendant les six premiers mois de l’année et concerne généralement des tâches légères. Quant à la seconde partie qui est la plus importante, elle se fait à la sortie de la saison des pluies et déborde nécessairement sur l’année n+1, parfois jusqu’en avril. Ceci constitue pour nous une difficulté pour laquelle nous avons engagé des discussions avec la tutelle financière pour trouver des solutions appropriées. Enfin, nous pouvons noter des difficultés de collaboration avec les nombreux partenaires que sont les structures du MIDT, les entreprises, les bureaux privés de contrôle etc. A ce niveau, nous essayons tant bien que mal de gérer au mieux ces relations à travers des cadres de concertations trimestriels que nous avons initiés depuis plusieurs années.

S : Quelles sont les perspectives du fonds pour améliorer l’état de nos routes ?

M.O. : Je puis vous dire que de nombreux défis ont été relevés déjà, parce que je vous disais que depuis 2010 nous sommes entrés dans des réformes. Le fonds d’entretien a été créé le 18 juillet 2007, mais très rapidement, on s’est rendu compte qu’il y avait une inadéquation entre ses missions et ses statuts. Il fallait modifier les statuts du fonds, il fallait entreprendre rapidement des réformes pour aller vers ce que l’on souhaite que le fonds soit. C’est pourquoi en 2010, nous avons entrepris ces réformes qui nous ont permis d’être aujourd’hui un fonds qui a engrangé des résultats. Le Burkina compte 12.107 km de routes en terre et 3.165 Km de routes bitumées. Le linéaire de pistes rurales est de 46 095 km dont 12 852 aménagés. A la naissance du FER-B, à peine 10 000 km de routes du réseau classé étaient entretenus. Les pistes rurales ne recevaient aucun entretien. A ce jour, la totalité du réseau classé et un linéaire de plus de 3 000 km de pistes rurales sont entretenus.
Nous devons continuer à améliorer la qualité des travaux à travers le renforcement des audits techniques et financiers et une amélioration du système de suivi-contrôle des travaux. C’est un gros défi auquel il faut ajouter la cartographie des risques de sorte à les minimiser. Une autre perspective qui constitue pour nous un défi à relever, est qu’il faut élaborer un plan stratégique de développement du FER-B, chose que l’Assemblée générale des EPE a fortement recommandée. L’autre défi à relever c’est que le FER-B doit s’adapter au contexte de démocratisation où de plus en plus les usagers veulent qu’on rende compte. Il faut que l’usager sache ce que nous faisons des ressources mises à notre disposition, car c’est l’argent du contribuable. Pour ce faire, nous sommes entrain d’élaborer également un plan de communication… Le fait d’être devant vous aujourd’hui est déjà pour nous un début de mise en œuvre de cette perspective et nous souhaitons pouvoir compter sur vous dans l’avenir. Nous sommes vraiment engagés à renforcer la communication à tous les niveaux : avec les partenaires techniques et financiers, avec les usagers, avec les entreprises, avec les autorités de tutelle. L’un des grands défis aussi, c’est d’aller vers un Fonds de seconde génération.

S : Qu’est-ce que le fonds de seconde génération ?

M.O. : Pour définir le concept de fonds de seconde génération, permettez-moi de parler d’abord des fonds dits de première génération qu’on a connus partout en Afrique et dans le monde. Lorsque ces fonds ont été créés, ils étaient gérés en régie et par le circuit de la dépense publique. Cela ne permettait pas de pérenniser les ressources pour l’entretien des routes. Pour le cas du Burkina, très rapidement, on a vu que les ressources affectées au fonds d’entretien routier n’étaient pas toujours disponibles, n’étaient pas pérennes, d’où des difficultés à honorer les entreprises. C’est alors que le concept de fonds de seconde génération est né pour pérenniser les ressources allouées à l’entretien routier. La démarche des Fonds de 2ème génération consiste à considérer la route comme un bien marchand. A ce titre, il est demandé à l’usager de la route de payer une redevance qui devra permettre d’en assurer l’entretien. C’est pourquoi, les ressources de ces fonds sont constituées essentiellement des recettes du péage routier et d’un prélèvement sur les produits pétroliers.

S : Est-ce que dans votre stratégie vous faites appel à la responsabilité des transporteurs routiers qui sont quand même à l’origine de beaucoup de dégradations des routes ?

M.O. : Dans la politique gouvernementale de sauvegarde du patrimoine routier national, on a créé une structure au sein du MIDT qui est l’Office national de sécurité routière (ONASER). Les questions de sécurité routière sont transférées au niveau de cette structure. Ces questions sont d’autant plus importantes qu’elles sont également gérées au niveau de l’UEMOA à travers le règlement 14. Tous les pays sont tenus au respect de cette règlementation. C’est pourquoi un plan de communication digne de ce nom ne peut pas ne pas s’intéresser aux transporteurs routiers qui se trouvent être les usagers professionnels des routes.

S : Vous avez suivi l’organisation du hadj 2013 qui semble avoir été une réussite. Faut-il, selon vous, que l’Etat soit le principal responsable de l’organisation du hadj ?

M.O. : Effectivement cette année nous avons constaté avec une grande joie la possibilité offerte à nos fidèles musulmans de pouvoir aller en Terre sainte à des moments bien indiqués. Il faut saluer et encourager toutes les initiatives que l’Etat a développées pour rendre cela possible.
On ne peut pas aller de l’avant sans se servir de ce qui s’est fait par le passé. C’est pourquoi nous devons voir ce qui a permis au voyage de bien se passer cette année et en tirer profit pour l’avenir. S’il est vrai que l’Etat est laïc, mon avis est qu’au regard de l’importance de la situation, l’Etat s’implique pour encadrer et faciliter le déroulement de cette activité.

S : Le Sénat divise les Burkinabè. Pourquoi tant d’agitation autour d’une institution constitutionnalisée ?

M.O : De mon point vue, je crois que le Sénat tel que conçu, s’est inspiré de ce qui s’est fait ailleurs en la matière. Les textes au niveau du parlement ont été votés avant cette année. C’est la mise en œuvre du Sénat qui a divisé les Burkinabè. Tantôt on parle des quotas au niveau des collectivités territoriales, tantôt de quota au niveau des plus hautes autorités, mais le principe en lui-même ne semble pas avoir été remis en cause. Pour ma part, je trouve qu’on devait y aller si ça doit porter un plus pour notre démocratie. Sa mise en place devait permettre à une partie de la société de s’exprimer. Il faut toujours continuer la concertation, mais il est nécessaire de mettre en place le Sénat dans le cadre du renforcement de notre démocratie. Il faut le faire vraiment dans un cadre participatif élargi. C’est ce que les autorités sont en train de faire avec les entretiens au plus haut niveau avec toutes les couches sociales. Je souhaite que dans l’avenir nous arrivions vraiment à trouver un consensus général autour de la question afin d’aller vers un Sénat qui apporte un plus pour la démocratie dans notre pays.

S : Le 26è anniversaire de décès du leader de la Révolution d’Août 1983 a été commémoré le 15 octobre dernier. Que gardez-vous comme souvenir de la période révolutionnaire ?

M.O. : Pour moi, la période révolutionnaire renvoie à l’époque où nous étions effectivement les acteurs au plus petit niveau dans les lycées et collèges. C’est une période qui a apporté ce qu’elle devait apporter pour notre pays à une époque où l’environnement et la géopolitique n’étaient pas les mêmes qu’aujourd’hui. Ce que je peux retenir de la révolution burkinabè, c’est qu’elle a permis à notre pays de se faire connaître davantage. Elle a changé un certain nombre de choses, de valeurs dans notre pays, elle a fait du burkinabè quelqu’un de fier de lui même et fier d’être burkinabè. La révolution a indéniablement cultivé des valeurs d’intégrité. Du reste, par certains écrits, des économistes avertis ont prouvé que la révolution a permis d’améliorer sensiblement les conditions de vie des populations par un certain nombre de grandes décisions qui avaient été prises. Malheureusement, cette période a montré aussi ses limites, parce qu’au moment où on a engrangé les bons résultats, de l’autre côté des espaces de libertés se sont vus limités.

S : Aujourd’hui l’incivisme se manifeste violemment par la dégradation des routes. Comment contrôler cette situation ?

M.O : Effectivement, ce que vous posez comme problème se vit même au niveau international. Aujourd’hui, quand vous regardez un peu à travers le monde, il y a l’incivisme qui se manifeste à travers des révoltes, des rebellions un peu partout. Nous devons travailler dans notre pays à renforcer la paix sans laquelle il n’y a pas de développement possible. L’incivisme est la conséquence de plusieurs facteurs ; il peut être lié à la pauvreté, à l’injustice, mais aussi à un problème de communication... . Nous pouvons constater avec bonheur que les autorités de ce pays sont entrain de prendre des mesures pour de plus en plus rendre compte. C’est cet exercice que j’ai tenté de faire avec vous. Pour revenir au cas de l’entretien routier, je ne vous dis pas combien de fois nous recevons des plaintes à tort ou à raison. C’est pourquoi nous avons décidé de changer la stratégie d’approche dans le cadre de l’entretien routier. Je prends cet exemple : Vous êtes une entreprise sélectionnée pour aller faire un reprofilage léger sur une route dégradée par ce qu’on appelle des « tôles ». Vous remplissez votre contrat à exécuter à un endroit bien précis. S’il se trouve qu’au même endroit, un ouvrage (un pont) est cassé, bien que l’entreprise n’ait pas été sélectionnée pour reconstruire l’ouvrage, si elle y exécute le reprofilage léger conformément à son contrat en laissant le pont cassé qui devra être reconstruit dans un autre cadre, le manque de communication peut amener les populations à taxer et l’entreprise, et l’agence d’exécution et le FER-B de détournement. Pour les populations, c’est le pont qui les préoccupe. Vous voyez par là que la communication revêt une importance capitale.
C’est pour cela que nous demandons à ce que les autorités locales soient désormais impliquées dans tout le processus de l’entretien routier. C’est pourquoi au niveau du MIDT, nous sommes entrain d’aller vers la création de comités au niveau local pour prendre part aux réceptions des travaux d’entretien routier.

S : Ce que vous dites est de recourir aux institutions républicaines pour réclamer ces droits mais lorsqu’il y a une crise de confiance entre le justiciable et la justice n’est ce pas ce qui pourrait justifier ces réactions ?

M.O : C’est l’une des raisons. C’est pourquoi, j’ai dit tantôt qu’il faut que nous travaillions à ce que l’ensemble des acteurs jouent pleinement leur rôle en respect des règles en vigueur. Nous avons tous intérêt à ce que cette confiance revienne entre l’Etat et le citoyen lambda.

S : Vous avez tantôt parlé de la pauvreté, l’Etat vient de prendre un certain nombre de mesures pour lutter contre ce phénomène, comment vous appréciez cela ?

M.O : Ces mesures sont salutaires. C’est un effort consenti, sinon on sait que dans notre pays, nous avons des ressources très limitées. En tant que travailleur, ce geste améliore mes conditions de vie et je me sens soulagé comme tous les autres travailleurs. D’ailleurs, ce geste a été dirigé vers toutes les autres couches sociales de ce pays. Je me réjouis encore que d’autres avantages restent à venir en fonction des disponibilités des ressources de l’Etat.

S : Le weekend dernier, les chefs d’Etat se sont retrouvés à Addis Abeba et ils ont décidé que le président kenyan Uhuru Kenyatta ne soit pas livré à la Cour pénale internationale. Omar El Béchir qui est également poursuivi n’aura pas à répondre à la justice internationale, quel commentaire cela vous inspire ?

M.O : Ces deux présidents sont justement poursuivis au niveau de la CPI. Il y a d’autres présidents qui y sont déjà. ça pose un problème parce que lorsque nous regardons ce qui se passe à la Cour pénale internationale, on a l’impression qu’il y a deux poids deux mesures. On a l’impression que quand il s’agit de l’Afrique, les choses s’accélèrent, on prend des sanctions très rapidement. Si c’est ailleurs, ce n’est pas trop évident ; c’est le cas par exemple du Président Syrien qui nargue le monde entier sans être inquiété outre mesure. La justice doit être la même pour tout le monde. Et puisque cela ne semble pas être le cas à la CPI, quand bien même la position des chefs d’Etat africains peut laisser entrevoir une certaine impunité, je comprends et soutiens cette position unitaire. Il faut effectivement examiner le fond des dossiers et prendre des décisions justes. Autrement dit, je pense qu’il faut repenser la cour pénale internationale dans ses démarches.

S : Faut-il ou non livrer ces chefs d’Etat africains à la justice internationale ?

M. O : Je m’en tiens à la décision des chefs d’Etat de ne pas les livrer. Cependant, il faut que nous restions prudents là-dessus pour ne pas aussi encourager l’impunité. Il faut observer ces chefs d’Etat, voir comment ils vont se comporter dans le temps parce qu’ils ont le privilège d’être toujours en exercice et peuvent donc poursuivre les exactions contre leurs populations. Donnons leur une chance de se racheter.

S : Mais ne pensez vous pas que c’est la faiblesse de nos institutions judiciaires qui fait qu’on a tendance à transférer ces chefs d’Etat dans les instances judiciaires internationales ?

M.O : Je dirais oui et non, parce que personne ne pose le problème de la qualité de nos institutions judiciaires. Le personnel qui y travaille s’efforce de faire son travail. Pensez-vous que c’est les bons juristes qui manquent en Afrique pour véritablement dire le droit pour nos chefs d’Etat ? Personnellement, je crois que non. Souvent, il y a des implications à un autre niveau. Par exemple cela n’est possible que quand ça arrange l’Occident. Sinon je ne crois pas tellement qu’il manque des cadres en Afrique pour pouvoir juger convenablement et de façon indépendante nos responsables.

S : Que faut-il faire quand on sait qu’il y a cette parade qui consiste à voter une loi d’amnistie pour la justice à l’intérieur ?

M.O : Si on veut voter une loi d’amnistie ça veut dire qu’on croit à nos institutions, d’ailleurs pour moi la loi d’amnistie peut s’inscrire dans la quête d’une paix sociale et favoriser l’alternance.

S : L’Egypte, un pays qui a fait sa révolution arabe mais malheureusement les violences se poursuivent, est-ce que c’est un échec de cette révolution que nous sommes entrain de vivre au pays du pharaon ?

M.O : C’est vraiment regrettable effectivement de noter qu’en Egypte, nous notions encore beaucoup de pertes en vies humaines. A mon avis, il faut faire attention à ce qu’il est convenu d’appeler les révolutions arabes. Chaque pays, chaque zone a sa culture. Nous prônons tous la démocratie, et il ne faut pas que la démocratie soit une théorie, il faut que nous l’adaptions à notre culture, à nos manières de faire avant tout. La démocratie doit être au service des populations. Au regard de ce que nous vivons aujourd’hui en Egypte, on a l’impression que cette révolution n’a pas marché, c’est ça la vérité. La dernière fois une partie de la population demandait que l’armée soit au pouvoir, en ce moment la démocratie est où ? Peut être que cette partie de la population pense que si l’armée accédait au pouvoir ça pourrait permettre d’assurer la paix sociale et de développer le pays. Or ce n’est pas ça la démocratie pour moi. En résumé, la révolution arabe qu’on a connue est un peu difficile à maîtriser. De mon point de vue ce sont des choses qui ne pourront pas être gérées facilement à court terme. Attendons donc de voir. Je crois que le peuple va connaître des moments difficiles, puis des moments d’accalmie, mais il faut dire quand même que la révolution n’a pas atteint les résultats escomptés.

S : Aux Etats-Unis, il y a un bras de fer entre le président Barak Obama et les membres du congrès, majoritairement républicains pour voter, adopter le budget et lui permettre de travailler. Comment voyez-vous l’issue de ce bras de fer ?

M.O : Il faut qu’on trouve une solution très rapidement. D’ailleurs, une solution, ne serait-ce que partielle, a été trouvée. On peut dire sans se tromper que les Etats-Unis ne vont pas proclamer le non paiement de leur dette. De mon point de vue, cette situation sera définitivement réglée d’ici février 2014. La raison doit prévaloir car, lorsqu’on pose les actes au niveau des Etats-Unis, on les pose pour tout le monde entier parce que les implications et les conséquences sont très fâcheuses au niveau de l’économie mondiale.

S : Quelle représentation faites-vous de ces mots ?

O.M : Route = transport.
Développement = bien-être.
Pauvreté = souffrance, manque de moyens.
Corruption = détournement de deniers publics.
Nids de poule = dégradation.
Entretien = amélioration de l’existant.
Sanction = discipline.
Travaux publics = développement de la cité.

La Rédaction

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