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Sens du mot » CAILLASSER «
Publié le lundi 21 octobre 2013   |  laborpresse.net




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Les faits divers qui impliquent les agressions contre la police semblent se multiplier, et l’on parle de plus en plus de guets-apens dans lesquels des policiers sont attirés. Des inconnus alors s’en prennent à eux, mais en général, tout ça commence par un bon « caillassage ».

Drôle de mot, même s’il correspond à une réalité qui l’est moins. Son sens est facile à deviner : il s’agit d’une pluie de pierres et de cailloux qui sont projetés sur les voitures qui se sont hasardées dans le piège.

Le mot est relevé depuis une quinzaine d’années en France, même s’il semble qu’on l’ait employé bien avant, au début des années 60 en Nouvelle-Calédonie.
Il se décompose sans problème : bien sûr, il dérive de caillou… Pourtant le verbe employé n’est pas caillouter, mais caillasser : il faut donc passer de caillou à caillasse.

On sent bien avec cette terminaison qu’on est dans l’expressif, et le familier… La caillasse désigne d’abord les cailloux qu’on n’est pas content de rencontrer ! La pierraille qui empêche de marcher confortablement, qui coupe les semelles et ralentit la marche.

Le suffixe « –asse » marque bien l’impatience, il est en tout cas péjoratif, et le verbe qui en dérive endossera sans difficulté un écho de violence. D’autant qu’il a été formé sur un modèle productif : on dit par exemple « rafaler » une voiture, ce qui est d’une certaine façon un degré nettement supérieur au caillassage. Rafaler, c’est-à-dire tirer une rafale de mitraillette. Là encore, le mot n’est pas attesté dans les dictionnaires.
Alors pourquoi inventer un mot, alors qu’on avait déjà « lapider » ? Ce verbe en effet semble répondre aux mêmes besoins, et parfois d’ailleurs, on l’a vu employé dans les mêmes circonstances. Plus encore : l’image qui le nourrit est la même, puisqu’il est construit sur la racine lapidem qui signifie pierre en latin. Mais le mot n’est pas très fréquent, il est ancien, et parfois réservé à des usages précis.

En effet, s’ils s’agit bien de lancer des pierres, elles sont d’ordinaire lancées directement sur quelqu’un. Et on a bien l’idée d’une foule, d’un geste collectif et haineux, qui cherche à atteindre une seule personne. La plupart du temps d’ailleurs, la lapidation se termine par la mort de la victime. Comme un lynchage de masse !
Le mot renvoie volontiers à de vieilles traditions, et en particulier à la Bible, puisqu’il y est question de la femme adultère. « Que celui qui n’a jamais pêché lui jette la première pierre ! » dit Jésus. Et la parole du Christ reprend donc le sens littéral du mot, quelle que soit la langue dans laquelle elle a été prononcée.
Et si nous revenons au « caillou », on voit que le mot est bien peu fréquent dans des expressions populaires, au regard de « la pierre ». C’est que la pierre est grande et noble, alors que le caillou est petit et populaire.

Mais la pierre se prête aussi au travail humain : c’est le résultat bien souvent de l’artisanat et du savoir-faire. Il n’y a pas loin de la pierre à la pierre polie, ou taillée… Alors que le caillou est la masse brute qui parsème les routes. A peine peut-on s’en servir pour marquer son chemin comme a fait le Petit Poucet. De là l’expression « semer des petits cailloux », l’une des rares à faire apparaître ce mot…

Yvan Amar

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