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Économie : Le secteur minier au Burkina Faso très éprouvé par le terrorisme

Publié le mardi 22 novembre 2022  |  Libreinfo.net
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© Autre presse par DR
Exploitation d`une mine d`or, au Burkina Faso.
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Le terrorisme au Burkina Faso affecte énormément tous les secteurs socio-économiques du pays. Le phénomène est tel que le secteur minier burkinabè en souffre beaucoup. De nombreuses sociétés minières ont dû suspendre dans la foulée leurs activités. Selon un document exclusif consulté par Libreinfo.net, plusieurs sociétés industrielles ont fermé en 2022 pour cause d’insécurité.

Le terrorisme s’est profondément enraciné au point de toucher certains domaines stratégiques et vitaux du Burkina Faso, quatrième producteur d’or en Afrique.

Le secteur minier est l’un d’eux, principale sève nourricière de l’économie du pays depuis 2009. La production minière industrielle annuelle du pays était d’environ 5 tonnes d’or en 2008. En 2020, le pays enregistre 62 tonnes d’or produites 66 tonnes en 2021.

En si peu de temps, le Burkina Faso s’est hissé au top 5 des pays miniers du continent africain aux côtés de pays de tradition minière comme le Mali, le Ghana, l’Afrique du Sud.

Les sites miniers comme ceux de Karma, Boungou, Taparko qui étaient épargnés depuis le début des attaques terroristes sont aujourd’hui touchés par ce phénomène.

Les intérêts miniers sont de plus en plus menacés par les groupes armés terroristes. Ils semblent vouloir déstabiliser l’économie du pays, faisant ainsi des mines des cibles potentielles.

Les sites miniers fermés à cause de l’insécurité
Les attaques terroristes ont contraint certains sites miniers produisant de l’or à fermer leurs portes, fin septembre 2022, car ne pouvant plus travailler. Ils sont au nombre de quatre, selon un document consulté par Libreinfo.net.

Il s’agit d’abord de la mine de Taparko qui a débuté sa production en 2007. Elle est située dans le département de Yalgo,province du Namentenga dans la région Centre-Nord.

La compagnie minière russe Nordgold ne produira donc plus d’or à sa mine Taparko jusqu’à nouvel ordre, avait annoncé sa filiale locale SOMITA.

Or, Taparko a produit 53 500 onces d’or au cours des neuf premiers mois de l’année 2021, contre 74 800 onces sur la même période en 2020. Elle est la première mine privée du Burkina Faso et la première mine africaine de Nordgold, qui exploite une autre mine d’or à Bissa-Bouly, également dans le Centre-nord.

Ensuite, il y a la mine d’or de Youga dans la province du Boulgou, région du Centre-Est, exploitée par la société Burkina Mining Company.

La mine est entrée en production en 2008 et dispose d’assez de réserves minérales pour soutenir une exploitation jusqu’en 2031, selon Avesoro Ressources, la société mère qui l’a annoncé après réévaluation des réserves.

La société devrait maintenir sa production d’or au-dessus de 200 000 onces par année, indiquait le directeur général Serhan Umurhan.

La mine d’or de Netiana fait partie des mines qui sont fermées pour cause d’insécurité. Située dans la province du Nahouri, région du Centre-Sud, elle est gérée par Netiana Mining Company SA. Son exploitation a débuté en février 2017.

Il y a aussi la mine de Riverstone Karma SA qui a connu une attaque terroriste meurtrière et qui tourne au ralenti. Située à Namissiguima dans la province du Yatenga, région du Nord, cette mine a été rachetée par le consortium Néré Mining en 2022.

A l’issue d’une audience en avril dernier, avec le président de la Transition d’alors, le lieutenant-colonel Paul Henri Damiba, le président de la Chambre des Mines du Burkina, M. Adama Soro déclarait ceci : « Les mines qui ont fermé ne l’ont pas fait de gaieté de cœur… ».

C’est dire à quel point le phénomène du terrorisme pourrait avoir de graves conséquences sur l’avenir de la nation, puisque cela pourrait jouer sur la part contributive de l’or dans le budget national.

L’impact socio-économique de la fermeture des mines
L’exploitation d’une ressource non renouvelable entraîne une désorganisation du milieu social et naturel sans précédent.

Si les impacts sont perceptibles déjà durant la phase d’exploitation, ils n’en sont souvent que plus importants à la phase de fermeture d’un site minier.

L’ensemble de l’activité disparaît brutalement, laissant derrière elle une localité en ruine et une mine abandonnée en l’état.

L’arrêt des activités minières industrielles entraîne les impacts socio-économiques qui se traduisent par la dégradation des services sociaux de base et la diminution des revenus.

Il y a également la baisse du pouvoir d’achat et le chômage qui s’installe. En plus, si les mines venaient à fermer définitivement, ce sont des milliers d’emplois directs et indirects qui seront menacés. Selon certains experts du domaine, on parle de 2 500 à 3 000 emplois directs et entre 5 000 et 7 500 emplois indirects.

Cela pourrait impacter négativement le budget des collectivités territoriales. Selon les données de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives(ITIE), depuis 2019, la somme de 144,002 milliards de francs CFA a été versée aux collectivités territoriales, dans le cadre du Fonds minier de développement local (FMDL).

Les mines d’or en production
Les mines fonctionnelles du Burkina Faso fin septembre 2022 sont au nombre de neuf. Ce sont les mines de Mana (province des Balé, région de la Boucle du Mouhoun) ; Essakane (Elle chevauche la frontière entre les provinces de l’Oudalan et du Séno, dans la Région du Sahel) ; Bissa Zandkom (province du Bam, région du Centre-Nord); Nioka Nogbele (dans la région des Cascades, chef-lieu Banfora), Bagassi (province des Balé, région de la Boucle du Mouhoun) ; Houndé (province du Tuy, région des Hauts-Bassins), Boungou (province du Gourma, région de l’Est), Bouere Dohoun (province du Tuy, Région des Hauts-Bassins), Sanbrado (province du Ganzourgou, région du Plateau-Central) et de Sanmatenga (provinces de l’Oubritenga et du Sanmatenga, respectivement régions du Plateau Central et du Centre-Nord).

Contribution du secteur minier dans l’économie du pays
En 2020, les 17 sociétés minières en activité ont contribué à 16,2 % dans la formation du Produit intérieur brut (PIB) et ont contribué aux recettes d’exportation à hauteur de 83,90%, selon le président de la chambre des mines Adama Soro. Ces mines industrielles sont à l’origine de la création de 10.000 emplois directs et 51.000 emplois indirects.

L’Etat entendait à l’époque, augmenter la production de 2000 milliards de francs CFA en termes de recettes d’exportations. Le secteur minier représente en moyenne 15% des recettes directes du budget de l’État, disait l’ancien ministre des Mines Oumarou Idani.

En décembre 2021, les recettes minières cumulées des deux semestres ont dépassé les 376 milliards de francs CFA. Pour ce qui est du premier semestre 2022, soit du mois de janvier à celui de juin, les recettes minières s’élèvent exactement à 26 milliards 235 millions 819 milles 292 francs CFA.

Cela a été récolté par les trois régies, la Direction générale des Douanes (DGD), la Direction générale des impôts (DGI), et la Direction générale du trésor et de la comptabilité publique (DGTCP).

Les investissements miniers
Les sociétés minières ont investi des milliards de francs CFA pour ce qui est de la production de l’or au Burkina Faso. Il y a quelques années, la société ESSAKANE SA a investi, par exemple, 228 milliards de francs CFA, selon la Chambre des mines du Burkina qui suit l’évolution des investissements miniers.

Il y a aussi SEMAFO-Burkina Faso SA qui a mis 140 milliards de francs CFA, suivi de Bissa Gold SA et des Sociétés des mines de Belahouro (SMB) qui ont respectivement investi 125 et 121 milliards de francs CFA dans leurs activités.

Avec le phénomène du terrorisme qui ne fait que se répandre sur le territoire, affectant au passage le secteur minier burkinabè, les investisseurs étrangers risquent de se retourner vers certains pays voisins et stables de la sous-région, comme le Ghana et la Côte d’Ivoire. Le transfert des capitaux vers ces pays est déjà perceptible.

Un risque de baisse de la production d’or
Les attaques terroristes qui ont visé directement ou indirectement certains sites miniers, la fermeture des sites miniers industriels et artisanaux ainsi que les difficultés des travailleurs des sociétés minières à rallier leurs postes font craindre une baisse de la production d’or.

L’activité économique 2022 est fortement impactée par la baisse de la production de l’or comparée à 2021. La production d’or est en baisse ainsi que le cours de l’once.
Or, en 2021, le Burkina Faso a connu une hausse du taux de production de l’or qui s’est chiffrée à 66,858 tonnes, contre une production de 62,138 tonnes d’or en 2020, soit une hausse de 4,72 tonnes de la production nationale.

Dans le secteur des mines, en mars 2022, la production industrielle d’or fin s’élève à 5,227 tonnes, en hausse de 28,1% en rythme mensuel, selon le ministère de l’Economie, des finances et de la prospective (MEFP). Cependant, par rapport au même mois de l’année 2021, la production d’or est en baisse de 20%.

A fin mars 2022, toujours selon le ministère, la production totale d’or fin a été évaluée à 15,002 tonnes contre 17,174 tonnes à fin mars 2021, soit un recul de 12,6%.

De janvier à décembre 2021, le cumul de la production de l’or au Burkina Faso est de plus de 66, 858.45 kg. Et, dans le premier semestre 2022, malgré les conséquences du terrorisme, le pays a pu produire 38,737.49 kg d’or.

Les réformes compliquent davantage l’importation de plusieurs produits nécessaires dans le fonctionnement des mines industrielles. Ces réformes sont liées au contrôle des importations des produits parfois destinés à des actions terroristes. Conséquence, des mines ne fonctionnent plus à plein régime.

Les mesures prises pour lutter contre l’insécurité dans le secteur minier
Les attaques terroristes contre certains convois miniers ont provoqué une onde de choc dans le secteur, obligeant les sociétés minières à revoir leurs modes de transport de matières et de personnel.

C’est ainsi que depuis, plusieurs entreprises organisent le transport de leurs employés par voie aérienne depuis la capitale jusqu’aux sites miniers. D’autres ont fait le choix de renforcer les escortes de leurs convois de travailleurs.

L’Etat est censé assurer « la sécurisation des activités minières et des sites miniers » comme le stipule le code minier burkinabè. C’est ce qui explique le recours à l’armée pour assurer les escortes minières, le plus souvent, et pour effectuer des patrouilles dans les zones sensibles du pays.

Il y a même l’Office national de sécurisation des sites miniers (ONASSIM) qui a été créé en 2014. C’est un établissement public de l’État à caractère administratif, dont la mission est d’assurer la sécurité et de contribuer à l’amélioration des conditions sécuritaires d’exploitation des sites miniers. Début novembre 2022, le conseil des ministres a nommé le commandant de gendarmerie, Serge Alain Tapsoba, Directeur général de cette structure.

Malgré le dispositif sécuritaire mis en place, les groupes terroristes parviennent souvent à mener des attaques. Ainsi, en 2019, un convoi du personnel de la mine de Boungou, située dans la province du Gourma, région de l’Est, avait subi une attaque ayant fait 37 morts et 60 blessés, selon le gouvernement. Les harcèlements des groupes armés terroristes n’ont jamais cessé, obligeant ainsi beaucoup de sociétés à renforcer leurs dispositifs de sûreté.

Les perspectives risquent de s’assombrir pour l’industrie aurifère burkinabè à cause de la montée fulgurante des incursions et attaques terroristes constatées actuellement. Le pays avait pourtant affiché dans les années antérieures, une nette croissance de sa production d’or.



Par Nicolas Bazié
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