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L’Observateur Paalga N° 8454 du 10/9/2013

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Emmanuel Beth ex-ambassadeur de France : "Je suis un des moins bien placés pour parler du Sénat"
Publié le mercredi 11 septembre 2013   |  L’Observateur Paalga


Emmanuel
© L’Observateur Paalga par DR
Emmanuel Beth ex-ambassadeur de France


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Le vol AF d'Air France de ce samedi 7 septembre 2013 qui a atteri à Ouagadougou avait à son bord le nouvel ambassadeur de France au Burkina-Faso, Monsieur Gilles Thibault, qui, on le devine, aura à présenter ses lettres de créance au Président du Faso dans les prochaines semaines. C'est le même avion qui, le même jour, a ramené à Paris celui qu'il remplace, Monsieur Emmanuel Beth. Avant de s'envoler pour l'Hexagone, le partant a bien voulu répondre à quelques-unes de nos questions relatives à la coopération bilatérale Franco-burkinabè, au Sénat, à l'alternance au Burkina, au retour à une vie constitutionnelle au Mali, à la Côte d'Ivoire où dans une vie antérieure, il a dirigé la Licorne...

Excellence Monsieur l'ambassadeur, vous avez présenté vos lettres de créance au président du Faso le 28 octobre 2010. Après 3 années de service au Burkina, vous repartez en France. Vos sentiments à l'orée de ce départ ?

E.B : Mon mandat aura été effectivement de trois ans. J'ai quasiment découvert votre pays à cette occasion, et je puis vous dire que je quitte votre pays avec énormément de regrets, du fait des relations que j'ai établies avec les autorités politiques, la majorité et l'opposition, l'administration, mais aussi avec la société civile à savoir les associations, les coutumiers et les religieux, le Burkinabè de la ville et du village.

J'ai beaucoup apprécié la gentillesse de toutes ces personnes, leur sourire aussi bien dans la joie que dans l'adversité.

La Coopération franco-burkinabè est-elle vraiment au beau fixe ? On aura remarqué ces derniers mois, une présence notable de militaires français au Burkina Faso. Sur quoi interviennent-ils et dans quel cas ?

E.B : S'agissant de la Coopération bilatérale, je confirme qu'elle est excellente pour plusieurs raisons :

- d'abord le rôle du président du Faso comme Médiateur de la CEDEAO dans la crise malienne qui a permis les avancées que nous connaissons ;

- ensuite, c'est également des résultats tous azimuts, notamment dans le domaine culturel et en matière de défense et de sécurité. Dans le cadre de l'engagement de la France au Mali, le Burkina a été une plate-forme relais et logistique d'une qualité exceptionnelle. Dans cette crise malienne, la France a toujours bénéficié d'un appui sans faille de la part de votre pays.

En ce qui concerne la présence des militaires ici au Burkina Faso, elle s'explique dans le cadre des opérations au Mali. Ils sont là au titre des mouvements administratifs, logistiques et opérationnels. Ils se reconditionnent ici au Burkina Faso, soit avant un retour en France, soit avant un réengagement. De plus, un grand nombre de "détachement d'instruction opérationnelle" (DIO) a lieu au profit des forces armées burkinabè.

La sécurité a été renforcée autour de l'ambassade et des écoles françaises, au Burkina Faso. Est-ce que vous redoutez des attaques contre des intérêts français ?

E.B : Il faut situer ce renforcement sécuritaire dans le cadre des événements de janvier 2013 au Mali. En janvier 2013, la France s'engage massivement et avec des résultats exceptionnels au Mali, à la demande des autorités de transition de l'époque. Dans ce cadre-là, la France a pris des dispositifs généraux dans toute la région, de la Mauritanie au Tchad en passant par le Sénégal, le Niger, le Mali, jusqu'au Burkina Faso, pour éviter éventuellement des actions terroristes dans la région.

Ce que je tiens à souligner, c'est que ces mesures ici au Burkina Faso étaient prises à la demande des autorités burkinabè qui ont pris en compte le contexte régional, et vous avez même pu voir que y compris à Ouagadougou et sur les routes, dans le Nord, des moyens supplémentaires ont été déployés de façon à prévenir, c'est le rôle fondamentale des forces de sécurité, la prévention, plutôt que la réaction.

Observateur privilégié de la vie nationale, quelles appréciations faites-vous sur les débats relatifs à la mise en place du Sénat ?

E.B : J'ai déjà eu l'occasion de m'exprimer sur cette question. Vous devinez qu'un Français est sans doute un des moins bien placés pour donner un avis de fond sur cette question du Sénat burkinabè. Pour deux raisons :

- la première est qu'en France, nous avons deux chambres, l'Assemblée nationale et le Sénat. Nous vivons au quotidien avec ces deux institutions et ça fonctionne de cette façon ;

- la deuxième raison est qu'il s'agit avant tout d'un problème de politique intérieure, et il n'appartient pas à la France et à son représentant de se prononcer sur l'opportunité ou non du Sénat.

Ce que j'ai pu constater est qu'il y a un débat politique sur cette question entre la majorité et l'opposition. Des propositions ont été faites et ce problème doit être réglé maintenant par les politiques dans les conditions qui satisfassent tout le monde.

Dans votre discours du 14 juillet 2013, parlant de l'alternance au Burkina, vous avez évoqué deux possibilités sous forme interrogative : la continuité dans la rupture ou la rupture dans la continuité. Quelle est la perspective la plus plausible selon vous ?

E.B : Là aussi, comme la question précédente sur le Sénat, il ne m'appartient pas d'entrer dans le débat politique interne du Burkina Faso. Le choix qui sera fait le sera dans le cadre d'un débat politique. Sur ce sujet, je n'ai pas d'avis à donner. Je souhaite simplement que la priorité soit donnée au bien commun et à la stabilité intérieure du pays.

Pourtant dans le même discours vous avez affirmé que cette alternance devra s'effectuer" en privilégiant la cohésion sociale". N'est-ce pas déjà une prise de position ?

E.B : M'échappant du débat politique, je crois effectivement que la solution qui devra être trouvée à ce problème, c'est de donner la priorité à la cohésion sociale, à l'unité nationale, afin de préserver les acquis fondamentaux du Burkina Faso qui sont le dialogue et la tolérance. Toute solution doit se fonder sur ces valeurs chères au peuple burkinabè.

Le 4 septembre dernier, le président élu du Mali, Ibrahim Boubacar Keita (IBK), a prêté serment, marquant ainsi le retour du pays à une vie constitutionnelle normale. Pensez-vous que l'ex-Soudan français est définitivement sorti des dunes de sables dangereux dans lequel il était enlisé depuis plus de 18 mois ?

E.B. : Je me garderai bien d'avoir un avis définitif sur une question internationale, car nous savons bien que le monde est agité, et je ne peux pas avoir un avis ferme sur le long terme. Ce que je peux constater est que des avancées notables ont été faites à la suite de l'Accord préliminaire de Ouagadougou signé le 18 juin. L'élection d'un président accepté par tous, la formation d'un gouvernement vont être une réalité. Les législatives qui se dérouleront bientôt sont aussi de bons signes. Il y a surtout ce qui est important à mes yeux, l'annonce d'un dialogue inclusif qui doit aussi se faire. Nous avons donc fait des pas considérables, et on ne peut que s'en féliciter, parce que personne ne s'attendait à ce que ça aille aussi vite et bien.

"La France restera au Mali, mais avec un effectif réduit de soldats". C'est le président français, Hollande, qui l'a dit. Est-ce qu'à terme il faut s'attendre à un accord militaire visant à protéger les institutions maliennes de toute agression ?

E.B. : Très clairement, je crois que ceci n'est plus dans l'air du temps. Vous savez par contre qu'il y a une mission des Nations unies qui est en train de se déployer et qui doit s'achever, selon les experts, en fin février- début mars 2014, la France situera sa présence en appui à cette force des Nations unies forte de plus de 10 000 hommes. Je crois savoir que tant que ce dispositif international sera là, la France ne fera que l'accompagner.

Vous êtes un retraité militaire, mais pas encore au niveau du Quai d'Orsay. Où pensez-vous atterrir après le Burkina Faso ?

E.B. : A l'heure où je vous parle, il m'est quasi impossible de vous préciser avec exactitude où j'irai. Je serai un retraité à l'heure où j'aurai quitté le Burkina Faso. Mais en même temps je suis à la disposition de mon pays.

Vous avez servi comme patron de la Licorne à Abidjan. Avec quel œil le militaire et le diplomate regarde-t-il la situation dans la Côte d'Ivoire d'aujourd'hui ?

E.B. : Comme pour le Mali, je ne peux que faire le constat d'une évolution positive en Côte d'Ivoire. En effet, en décembre 2010, qui aurait dit qu'on en serait là aujourd'hui ?

Cette évolution, on la doit à la sagesse de l'ensemble des partenaires ivoiriens, à la qualité des relations bilatérales entre la France et la Côte d'Ivoire, mais aussi à l'action de la Communauté internationale qui, dans sa globalité, a accompagné le processus dans ce pays. La Côte d'Ivoire évolue bien et nous le constatons sur le plan de l'économie, de la reconstruction... Il y a certainement des problèmes à régler. Je pense notamment à la question sécuritaire qui doit être résolue dans la durée de façon à ce que la Côte d'Ivoire retrouve toute la place qui était la sienne, il y a plus de 10 ans. C'est-à-dire un pays stable et économiquement performant.

Interview réalisée par

Zowenmanogo Dieudonné Zoungrana

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