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Procès du putsch: Les détails des écoutes téléphoniques

Publié le jeudi 21 mars 2019  |  Sidwaya
Conversation
© AFP par CAMILLE MILLERAND/SIA KAMBOU
Conversation téléphonique entre Guillaume Soro et Djibril Bassolé
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L’audience du 20 mars 2019 a été consacrée à l’écoute d’appels téléphoniques interceptés, que le parquet militaire attribue, d’une part, au colonel Abdoul Karim Traoré et à différents interlocuteurs et, d’autre part, au général de gendarmerie, Djibrill Yipènè Bassolé.

Alors que les parties au procès du putsch s’étaient donné rendez-vous, ce mercredi 20 mars 2019 pour commencer l’écoute des éléments sonores contenus dans le dossier, l’un des avocats du général Djibrill Bassolé, Dieudonné Bonkoungou, est arrivé dans la matinée avec une nouvelle requête. Il ne souhaitait pas que le tribunal autorise l’examen des écoutes téléphoniques en ce qui concerne son client.

Pour lui, le principe du contradictoire a été violé, du fait qu’en droit, la forme tient le fond en l’état. L’avocat a argumenté que l’origine des écoutes n’ayant pas été jusque-là établie, alors que la loi prévoit comment des interceptions téléphoniques doivent être faites pour une exploitation judiciaire (677-20 du code de procédure pénal), le tribunal devrait simplement les écarter du dossier. «Les écoutes téléphoniques n’ont ni père, ni mère.

Qui les a réalisées ? Est-ce que vous, juridiction de ce niveau, vous pouvez accepter une telle violation des droits de la défense ?», a-t-il demandé au tribunal, se basant sur les dispositions de l’article 427 du Code pénal. Me Bonkoungou a également exprimé des craintes de voir des éléments de la vie privée des accusés divulgués en public. Insistant sur sa ligne de défense, le conseil de Bassolé a laissé entendre qu’il se retirera de la salle d’audience si le tribunal autorise l’examen des écoutes.

Le parquet et les avocats de la partie civile l’adjureront de ne pas mettre cette menace à exécution, selon Me Prosper Farama. «Des gens ont dit des choses, si on passe ces éléments certains voudront entrer sous le tapis», a estimé l’avocat de la partie civile. S’il reconnaît le droit de Me Bonkoungou de quitter l’audience, il a toutefois critiqué ses arguments tendant à exclure les écoutes du dossier.

Car, selon Me Farama, le principe du contradictoire ne signifie pas de donner l’origine des pièces du dossier, mais plutôt de permettre à toutes les parties au procès d’en discuter. Le parquet a abondé dans le même sens, estimant que l’avocat s’est certainement rendu compte que les éléments sonores compromettent sérieusement son client, c’est pourquoi il a entrepris de refuser leur examen.

«Me Bonkoungou, permettez-nous d’avancer», a déclaré le parquet, soulignant que la chambre de contrôle de l’instruction a rejeté cette même prétention de l’avocat de Bassolé. Le président du tribunal, Seydou Ouédraogo, a considéré que la demande de Me Bonkoungou est une exception et la décision y relative sera jointe à celle sur le fond avant la clôture des débats. Il a alors autorisé le parquet militaire à lancer l’examen du contenu des clés. Le premier fichier audio écouté, intitulé «AKT» était relatif au colonel Abdoul Karim Traoré.

Me Bonkoungou quitte la salle
L’élément rapporte des conversations téléphoniques relatives à la présence d’acteurs de la rébellion malienne à Ouagadougou et à leur participation aux événements. Dans l’une des conversations, notamment un intervenant dissuade son interlocuteur d’intervenir pour le moment. «Si vous intervenez maintenant tout est gâté», a-t-on pu entendre.

Le parquet expliquera qu’il s’agit d’une conversation téléphonique entre le colonel Abdoul Karim Traoré et un certain Djéri, responsable du Mouvement de libération de l’Azawad (MLA), entré en rébellion au Mali. Le fichier contenait également une conversation en langue Tamachek entre l’accusé Sidi Lamine Oumar et le dénommé Djéri.

Les avocats des prévenus mis en cause s’en sont offusqués. Me Dieudonné Wili s’est plaint de n’avoir pas été confronté à ces documents aux étapes précédentes de la procédure, malgré toutes ses démarches. Son confrère, Timothée Zongo fera remarquer que c’est seulement des SMS qui leur ont été opposés jusque-là, et que c’est seulement à cette audience qu’ils prennent connaissance de cet appel supposé de leur client.

«Il y a manifestement une violation des droits de la défense, on ne nous permet pas de nous défendre. Ce n’est pas un jeu de poker où on cache ce qu’on a sous sa robe pour le sortir au moment opportun pour surprendre l’autre», s’est insurgé Me Timothée. Dans la même verve, l’avocate de Sidi Lamine Oumar, Me Zaliatou Aouba a soutenu que cet appel est opposé pour la première fois à son client.

D’ailleurs, a-t-elle poursuivi, le langage employé est plutôt du Sonraï et non du Tamachek comme l’a prétendu le parquet. Et de laisser entendre que Sidi Lamine Oumar ne comprend pas le Sonraï et ne se reconnaît pas dans cet appel. Appelé à la barre, l’accusé déclarera ne même pas reconnaître sa voix. Le second fichier mis en écoute concerne le général Bassolé en interaction téléphonique avec plusieurs interlocuteurs (plus de 50 appels).

Cette écoute s’est effectuée en l’absence de l’accusé (évacué en Tunisie pour des soins) et de ses conseils (Me Dieudonné Bonkoungou ayant quitté la salle un peu plus tôt). On y entend par exemple celui qui est censé être le général sur ces éléments sonores promettre le feu sur la tête de certaines personnes, s’intéresser à la situation au sein des troupes de l’ex-RSP ou mettre en doute la tenue même des élections de novembre 2015. Très enthousiaste sur l’une des bandes, on l’entend encore dérouler un plan de conquête du pouvoir à une dénommée Rebecca, ce que le parquet interprétera dans ses observations comme un coup d’Etat dans un coup d’Etat.

«Ce n’est pas ma voix»
Dans l’après-midi, le parquet a diffusé deux conversations téléphoniques supposées entre le général de gendarmerie Djibrill Bassolé et l’ancien président de l’Assemblée nationale, Guillaume Soro. Durant 13 minutes, les deux hommes échangent sur l’aide militaire et financière à apporter aux éléments de l’ex-RSP, pour la réussite du coup d’Etat. Au regard de cette «preuve», il n’y a pas de doute sur la complicité d’attentat et de collusion avec l’extérieur de Bassolé, selon le procureur militaire.

«Il a appelé à frapper son propre pays», a soutenu le parquet. Me Prosper Farama s’est dit «touché dans sa fierté» quand un général de l’armée burkinabè reçoit des instructions d’un civil. «Avec cet élément, la responsabilité pénale de Bassolé est établie», a soutenu Me Hervé Kam. D’autres éléments audio avec une dame et un monsieur, respectivement Thérèse Diawarra et le journaliste Adama Ouédraogo Damiss selon le parquet accablent le général Djibrill Bassolé.

La dame en question a fait part de l’impatience des soldats à rentrer en possession d’une somme, 20 millions FCFA aux dires du procureur, et son interlocuteur de la rassurer que l’argent leur sera versé. Ensuite, elle demande au général, de se méfier du capitaine Abdoulaye Dao qui «balancerait les informations de l’autre côté». «Quelqu’un m’a dit qu’il faut qu’on laisse tomber les officiers», lui a répondu son interlocuteur à l’autre bout du fil. Pour Me Farama de la partie civile, c’est la preuve que le général Bassolé était en contact avec l’ex-RSP, contrairement à ce qu’il a affirmé à la barre.

Avec le nommé «Adam», on entend les deux hommes échanger sur une somme d’argent à remettre aux journalistes pour la diffusion de la réaction du «général» sur les ondes de la radio Oméga. Le procureur militaire désigne Adama Ouédraogo Damiss comme étant l’interlocuteur de Bassolé. «Le 29 septembre (date de l’appel, ndlr), je n’étais pas au pays. (…) Dans l’élément, nulle part il n’est dit qu’il est journaliste. Je n’ai pas eu de contact avec les confrères… Ce n’est pas ma voix», a rétorqué l’accusé.

Mais Me Séraphin Somé est formel : «c’est bel et bien sa voix». Toujours dans l’audio, «Bassolé» informe «Adam» de son passage à Oméga FM, où il dit avoir «sonné le gouvernement». «Ils ont dissous le RSP, il faut dissoudre le gouvernement aussi. Ce gouvernement, c’est le RSP», a-t-il dit. Adama Ouédraogo crie à l’acharnement et déclare : «Les montages et manipulations ont eu lieu dans une villa au quartier Petit Paris de Ouagadougou». La défense, en l’occurrence Me Mamadou Sombié, a demandé que cette piste soit prise au sérieux.
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