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Sidwaya N° 7481 du 19/8/2013

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Une mystérieuse montagne à Fada : source de « bonheur » pour ceux qui y croient
Publié le lundi 19 aout 2013   |  burkina24.com


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© Autre presse par DR
Une mystérieuse montagne à fada
Fada N`Gourma est une ville située dans l`est du Burkina Faso, à 219 km à l`est de Ouagadougou


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En plus de leur science à prédire l’avenir, les « tapeurs de sable » du Gulmu détiennent un fétiche, le « Nalambou » (la langue de bœuf en gourmantchéma), censé ouvrir les portes du « bonheur » aux hommes qui se confient à lui. Une visite en mi-juillet, sur la montagne qui abrite le fétiche, a permis de rencontrer des guides et des témoins.

Après quelques embardées par des pistes enchevêtrées dans la brousse, à un jet de pierres de la ville de Fada N’Gourma, on se retrouve au pied d’une montagne, celle qui abrite le fétiche de la fortune, le Nalambou. Un habitant qui s’est confié à cette montagne est devenu chef et a 17 enfants déjà.
A 9h30 ce jeudi 18 juillet 2013, l’endroit est paisible et l’atmosphère rafraîchissante après la pluie tombée au cours de la nuit précédente. Nalambou grouille de monde chaque jeudi nuit jusqu’au vendredi matin, jours propices aux sacrifices et autres rites pouvant vous rendre heureux. « Il y a des jours favorables aux sacrifices chez les gourmantché », explique Laurent Nassouri, un guide local par ailleurs secrétaire général de l’Association pour la défense et la promotion de la culture gourmantché (ADPCG).
Sur sa demande, l’on procède ensemble à la purification préalable des lieux. M. Nassouri conseille alors à chacun de ramasser trois cailloux qu’il lancera un à un sur la montagne, rite supposé chassé les mauvais esprits selon lui. L’homme, manifestement volubile, maîtrise bien cet endroit comme sa poche. « La force de la chose c’est le contenu et non pas ce que vous voyez », prévient-il tout en rassurant de l’efficacité et de la fiabilité du fétiche : « De la manière que la montagne est grande, la puissance aussi est grande comme ça ».
Une flopée de mystères entoure naturellement cette montagne. « Le plus souvent, quand nous arrivons ici, nous trouvons des pintades sauvages ou des troupeaux de singes, ou encore d’autres animaux sauvages. Mais si nous entourons immédiatement la montagne avec nos chiens de chasse et que nous fouillons jusqu’au sommet de la montagne, nous ne trouvons rien », relate le guide, visiblement acculé par ces choses à la limite étonnantes.

Le Nalambou lui a donné la chefferie et 17 enfants

Pour le guide, il ya beaucoup de mystères autour de la montagne mais qu’il ne convient pas d’en parler à tout le monde.
Il fait visiter en effet une cabane où se trouve un canari contenant des objets sacrés. « C’est tout ce que nous pouvons vous montrer » dit-il, interdisant sans doute de prendre des photos. Il fait comprendre qu’il existe encore de petits endroits sacro-saints, dissimulés quelque part au sommet de la montagne, que seuls les initiés sont autorisés à visiter. On peut cependant se consoler des témoignages de ceux qui ont eu recours à la montagne et à ses esprits.
Le sexagénaire chancelier de Fada, Onadja Tiédano est devenu un chef épanoui grâce au fétiche. « Si de nos jours, tu as le pouvoir et les enfants, tu as également l’argent, donc le bonheur t’a souri ; j’ai 17 enfants et je continue d’en faire », se confie-t-il en souriant. « Si tu mets l’argent en priorité, tu perdras certainement ta dignité », ajoute-il, assis devant sa case en train de humer l’air frais de la matinée.
Et comme dit l’adage, qui tient les rênes tient la bourse, ce chef traditionnel se refuse en l’occurrence de demander de l’argent au fétiche et s’estime à tout le moins heureux.
Il ne doute pas en tout cas de l’authenticité du Nalambou, source de bonheur pour tous ceux qui y croient. « C’est un fétiche de protection. Il m’a procuré plusieurs fois ce que je lui ai demandé », rassure-t-il.
Le directeur régional de la culture, Saïdou Sinini partage lui aussi, l’avis du chef. Il est convaincu que si des gens continuent à fréquenter les lieux, c’est qu’ils y trouvent réellement leur compte. En tous les cas, il affirme avoir du respect pour tout ce qui touche au sacré. « La montagne, c’est comme la kaaba, quand vous regardez c’est un caillou, où les gens partent prier et sont exaucés (…) Toute personne qui se confie aussi à la montagne et à ses esprits, si elle croit, ce qu’elle veut, comme par coïncidence, ça se réalise ».

Des esprits capables de faire plier l’armée

Un autre avantage de cette montagne du bonheur, c’est quand un problème surgit dans la communauté. Il suffit d’immoler un bœuf dans le respect des règles, pour trouver la solution, selon le guide Nassouri. Mais, reconnaît-il, les esprits ne répondent plus systématiquement comme autrefois à cause de la négligence de leur roi. Sinon, le manque de pluie ne constituait pas une menace réelle. « Il suffit de venir demander la pluie seulement et avant même que les gens ne quittent les lieux, la pluie tombe », de son avis.
Toutefois, le guide Nassouri raconte encore que pendant la révolution, l’armée burkinabè aurait voulu ériger un champ de tir à partir de la montagne, en dépit de la désapprobation des habitants. Mais dès l’entame des travaux, le Caterpillar s’est coupé en deux. Les soldats ont vite reculé et les travaux ont donc été abandonnés.
« Il y’avait toujours les carcasses du Caterpillar ici. C’est récemment qu’elles ont été emportées par des gens », révèle le guide. Il poursuit en disant qu’un commandant français et son épouse s’entêtant eux aussi à déposer leurs pénates sur la montagne, ont dû quitter dare-dare ce lieu hanté lorsqu’une nuit, leur maison a été envahie par un essaim d’abeilles, envoyé par les esprits de la montagne. La maison abandonnée par le couple a évidemment disparu, mais ses traces demeurent toujours.

Le roi protestant ne croit pas à toutes ces choses

Par ailleurs, il y a des problèmes au sein même des dépositaires de la tradition. On reproche à l’actuel roi gourmantché de s’éloigner des valeurs et croyances coutumières en cristallisant toute son énergie sur ses occupations professionnelles. Moussa Thombiano se veut clair : « Pourtant, c’est grâce à son statut de roi qu’il est parvenu là où il est aujourd’hui (député) ».
La plupart de nos interlocuteurs s’accordent à dire qu’il doit falloir que les Gourmantché votent tôt ou tard, un autre roi, de préférence un illettré, qui va s’occuper véritablement de ce a trait aux traditions. De plus, ils estiment que le roi actuel étant protestant, n’est pas prédisposé à regarder dans la même direction qu’eux parce que sa religion et les croyances coutumières n’ont pas les mêmes obligations. De leur point de vue, cela constitue un frein à la perpétuation des traditions au sein de la communauté.
Pour mieux valoriser ces richesses sacrées, ou du moins ce qu’il en reste, le directeur régional de la culture et du tourisme, Saïdou Sinini propose que les projets de construction de routes aménagent des bretelles en direction des sites touristiques environnants. « C’est ce que j’aurais fait si j’étais Premier ministre », lâche-t-il. Il propose aussi que l’accès à ces sites soit payant pour générer des frais qui seront réinvestis sur place.
Le guide Nassouri souhaite pour sa part que les collectivités territoriales s’impliquent davantage dans la gestion et la promotion des sites touristiques et culturels. Il dit avoir effectué des démarches en ce sens, mais que ses interlocuteurs tergiversent toujours dans leur choix. Le souhait de tous est que les convictions du roi soient favorables avec le bonheur de son peuple, lequel ne peut se retrouver juste qu’au pied d’une montagne.
Ouamtinga Michel ILBOUDO

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