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Karidia Zongo/Yanogo, députée UPC/RD : « Rien ne dit qu’on ne va pas nous exclure du parti au prochain congrès »

Publié le mardi 20 mars 2018  |  Le Pays
Mouhoun
© Partis Politiques par D.R
Mouhoun : la députée Karidia Zongo rend compte de ses activités à la base
Après une première rencontre de redevabilité qu’elle a tenue le 22 février 2017 à la place « Melon gare » de Dédougou pour faire le bilan de la première année de la législature 2016-2020, l’honorable Karidia Zongo/Yanogo est allée encore rendre compte à la base. C’était le 9 juillet 2017 dans la salle de réunions de la Maison de la femme de Dédougou
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« J’essayerai de parler sans passion, dans l’unique objectif d’éclairer l’opinion tout en sachant que malgré ma bonne foi, je ne pourrai pas convaincre tout le monde. Mais j’observerai vis-à-vis d’eux, ce minimum de respect qu’ils sont en droit d’attendre de moi. Je voudrais néanmoins rassurer chaque lecteur/lectrice que je ne dirai rien que la vérité. Si certains termes paraissent durs, c’est sans doute pour amener ceux qui m’ont accusée, dans leurs derniers retranchements, à laver leur propre honneur en présentant les preuves de leurs allégations ». Voilà ce que nous a déclaré, en guise d’introduction, Zongo/Yanogo Karidia, députée à l’Assemblée nationale, élue sur la liste nationale de l’Union pour le Progrès et le Changement le 29 novembre 2015. Engagée dans les années 1990 avec le Mouvement démocratique pour le progrès (MDP), elle était devenue par la suite membre de l’Alliance pour la démocratie et la fédération (ADF). En 1997, elle a abandonné la politique pour se consacrer à son cabinet d’études tout en restant très active au niveau de la société civile pour la défense et la promotion des droits des femmes. A la faveur de la création de l’Union pour le progrès et le changement (UPC), elle a renoué avec la politique parce qu’elle trouvait en ce parti, la réponse à ses aspirations pour un développement harmonieux de notre pays. Mais depuis quelques mois, une crise est née au sein de l’UPC, mettant sur la sellette la députée et certains de ses camarades. Nous abordons le sujet avec elle dans « Mardi Politique ».

« Le Pays » : Comment qualifierez-vous les relations entre les députés de l’UPC-RD et les militants et ce, après les menaces et bagarres autour des mandats ?

Karidia Zongo/Yanogo : A mon humble avis, la confiance n’a jamais été ébranlée entre nous, députés du groupe parlementaire UPC-RD, et nos sympathisants. Je ne peux pas parler pour tous, pour ce qui concerne les circonscriptions électorales de l’ensemble de mes collègues. Je peux me tromper, mais en rapport avec ce que j’ai pu voir sur place, ce que j’ai entendu et compris de leurs propres commentaires, et les images relayées par les médias lors des meetings et assemblées générales organisés dans les provinces, je déduis que la mobilisation et l’enthousiasme ne laissent aucun doute quant à la qualité des relations entretenues entre les députés du groupe UPC-RD et leurs sympathisants. Pour ma part, aussitôt après l’accalmie qui a suivi les durs moments de la crise, je suis allée à la rencontre de mes sympathisants pour leur donner la vraie version de la crise. J’ai été comprise. Du reste, je n’ai jamais douté de leur confiance. Les sages avaient souhaité un règlement pacifique à travers un dialogue franc. Malheureusement, l’évolution s’est faite dans le sens contraire. C’est le lieu de saluer la maturité et la sagesse des militants et leur haut niveau de discernement. L’époque du suivisme aveugle est révolue. C’est une maturité politique, conséquence d’une avancée démocratique à encourager.

On constate que malgré les menaces et intimidations, vous et vos camarades de l’UPC-RD gardez toujours vos mandats électifs. Est-ce à dire que finalement, ceux qui vous réclamaient les mandats ont abandonné la lutte ?

Comment pouvait-il en être autrement ? Nous sommes dans la légalité et dans l’exercice légitime de notre mandat. Si on devait tout céder sous la contrainte ou les menaces, il y a lieu de craindre l’instauration progressive et insidieuse d’une dictature qui ne dit pas son nom. Force doit rester à la loi. L’exercice de nos droits et prérogatives doit se faire sans compromission et c’est à travers cette pratique quotidienne que nous allons renforcer l’Etat de droit et mettre tous les citoyens à l’abri de l’arbitraire. On n’en a pas toujours conscience, mais, c’est en défendant le droit en tout temps et en tout lieu que l’on est soi-même à l’abri des abus et des violations de nos propres droits. Ont-ils abandonné ou non la lutte ? Je ne saurais vous apporter la confirmation. Depuis l’appel à l’apaisement de certains responsables du parti et les dispositions prises pour notre sécurité, les militants instrumentalisés ont été dissuadés et nous assistons à une certaine accalmie. C’est le lieu de témoigner à ces personnes notre sincère gratitude. Ce que j’ai déploré, c’est cet acharnement autour de nos mandats comme si les tortures morales que nous subissions déjà, du fait de leurs allégations, injures et mépris, ne suffisaient pas au point qu’il faille « réclamer » nos mandats. Cela me rappelle les propos d’une ministre du Président Jacques Chirac: « On ne tire pas sur une ambulance ». Je pense, en toute honnêteté, que sous le coup de l’émotion, de la désinformation et de la manipulation, beaucoup ont agi sans comprendre les raisons de la crise. Ils sont nombreux ceux qui ont changé d’opinion par la suite et nous l’ont avoué. Cette crise qui a cristallisé les positions et divisé les citoyens, on le verra, avec le recul, va contribuer à la formation d’un nouveau consensus au sein des partis politiques, et exigera des responsables politiques un peu plus de considération vis-à-vis de leurs cadres et de leurs militants. Au bout du compte, elle servira à renforcer la démocratie. Comme le disait Montesquieu : « La nature des lois humaines est d’être soumise à tous les accidents qui arrivent et de varier à mesure que les volontés des hommes changent… ». La leçon à retenir, est que les partis politiques doivent s’investir dans la formation de leurs militants, notamment les jeunes. L’Etat doit exiger cela d’eux, du moment où ils bénéficient des financements publics. Ce manque de formation a toujours été déploré au sein de l’UPC. Au niveau de l’Union nationale des femmes, nous avons élaboré des plans d’action, qui ont été révisés à plusieurs reprises avec des thématiques identifiées par les femmes ; mais ces plans d’action ont toujours eu du mal à être mis en œuvre. A défaut d’organiser des sessions formelles de formation en raison des contraintes financières, former un militant, à mon avis, c’est aussi le rendre conforme à l’image que le parti souhaite représenter à travers lui. L’enjeu n’étant rien de moins que la définition du « bon » représentant, à travers la transmission de savoir-faire et savoir-être de représentation. En la matière, ces apprentissages informels s’effectuent lors d’interactions ponctuelles, de mimétisme des dirigeants : on regarde ce que le responsable fait, on mémorise ses mots, ses comportements et on les reproduit. Ce qui nous a été donné de voir dans la gestion de cette crise par les responsables du parti, nous inquiète quant au contenu des messages qu’ils véhiculent. Heureusement, pour nous, très vite, les jeunes, malgré la désinformation et l’incitation à la violence, ont fini par comprendre le ridicule qui entourait cette fébrilité. On les poussait à commettre des actes dont ils allaient endosser seuls la responsabilité et les conséquences. La preuve, suite aux plaintes que nous avons déposées et à la convocation des intéressés pour audition, la plupart ont tout simplement nié les faits ! Il est important que face à n’importe qu’elle situation, la sagesse puisse nous guider.

« Je crois que même en politique, on ne doit pas perdre son âme »

Finalement, comment la crise née de la création de votre groupe parlementaire a-t-elle été gérée au niveau de votre parti ?

Ce n’est pas la création du groupe qui a donné naissance à la crise. C’est la crise qui a eu pour corollaire, la création du groupe parlementaire. Le groupe parlementaire est la conséquence et non la cause. Je ne parlerai même pas d’une mauvaise gestion, parce que la crise a visiblement été concoctée au sein du parti. Bien entendu, ceux qui ont envoyé la note accusatrice au Courrier confidentiel, ne se doutaient pas un instant que Dieu, dans son infinie bonté, allait changer le cours de leur plan machiavélique et nous réserver une consolation à la hauteur de leur entreprise. Ne me demandez pas pour quelles raisons le parti peut prendre un tel risque, de salir, vilipender, accuser, injurier et chercher délibérément à nuire à ses députés. Je ne saurais vous répondre. Je note, comme vous, la coïncidence avec le décès du président Salifou Diallo, les démarches entreprises par les responsables du parti pour participer au gouvernement et les promesses qu’ils auraient obtenues pour leur participation au cours du remaniement qui devrait intervenir. Je n’invente rien, c’est un secret de Polichinelle. Du reste, le président lui-même nous l’a affirmé lors d’une rencontre. Tout compte fait, puisque le parti n’a jamais reconnu publiquement qu’il est l’auteur de la note, nous attendons que la procédure de la plainte que nous avons déposée, suive son cours et l’opinion sera située. En rappel, suite à la parution du 10 septembre 2017 du Courrier confidentiel, m’accusant avec six autres de mes collègues, de traîtres faisant parti d’un complot avec feu Salifou Diallo, nous avons, avant d’envoyer une note au Courrier confidentiel, réagi par correspondance adressée au président du parti, en exprimant nos inquiétudes face à son silence assourdissant. Sa réponse a été sans équivoque : c’est une affaire personnelle relatée par un journal qui a pignon sur rue ! En clair, il fait une bonne appréciation de la publication. La suite, on la connaît : création du groupe UPC-RD, conférence de presse du parti pour inviter les jeunes à « réclamer leurs mandats ». Pendant que des missions de bons offices tentaient de rapprocher les positions, les premiers responsables continuaient leur travail de désinformation, de manipulation de l’opinion, de diffusion de propos haineux, violents, mensongers à travers les médias sans pour autant apporter la preuve de leur acharnement. Il s’est trouvé des prétendus honorables qui, toute honte bue, sans aucun respect pour leurs familles, leurs militants et les populations, crachaient des mensonges grossiers à la limite de la démence. On me dit que c’est la politique ; je crois que même en politique, on ne doit pas perdre son âme. Je dirais qu’en raison de notre représentation, nous devons savoir raison garder et exprimer nos désaccords dans le respect de notre propre personne et de nos électeurs. Je rappelle que le règlement de l’Assemblée nationale a prévu un code de déontologie du député vis-à-vis de ses collègues. Je dois dire que je n’étais pas de ceux qui voulaient qu’on participe au gouvernement. Suite aux explications du président du parti qui disait que nous n’avions pas été approchés malgré nos 33 députés, je me suis alignée du côté de la majorité. Ils ont cherché et continuent de chercher, par tous les moyens, des indices, des occasions pour laver leur honte, en brandissant des interviews et que sais-je encore, qui n’ont aucun lien avec leurs accusations. Mais ils le savent très bien, jusqu’à leur dernier souffle, ils n’auront pas ces « preuves », pour la simple raison qu’elles n’ont jamais existé. Au final, ce « cas pratique » a apporté une contribution à l’analyse du façonnage organisationnel et du management au sein des partis politiques. Que l’on ait approuvé ou non la création du groupe parlementaire UPC-RD, on a été amené, à un moment donné, à remettre ses propres convictions et jugements hâtifs de côté, pour s’informer, analyser et se rendre à l’évidence de ce qui suit: cette crise n’en valait pas la peine.

Que ce soit à travers la presse ou les réseaux sociaux, nous avons beaucoup appris de certains analystes politiques sur la crise. Sur la base des lois en vigueur, ils ont parlé des mécanismes institutionnels, des exemples pratiqués ailleurs en la matière, des enjeux, et ont fait des propositions. On pouvait même imaginer qu’ils n’étaient pas forcément pour la création d’un deuxième groupe parlementaire, du moins, sont-ils restés dans une objectivité. C’est tout à leur honneur. Par contre, d’autres « analystes politiques » se sont lancés dans des débats hâtifs en foulant au pied le B.A.-BA des principes d’une simple analyse situationnelle. Ils ont très vite désigné les coupables, expliqué leurs motivations et sont arrivés à la conclusion que c’est le « tube digestif ». Pas plus que les débats de cabarets, gratuits, sans frais ni enseignement !

Il est évident qu’en 2020, l’aile adverse au sein de l’UPC va vous combattre pour éviter que vous et vos camarades ayez la possibilité de vous représenter aux législatives. Avez-vous envisagé cette hypothèse et comment allez-vous répondre à vos adversaires ?

Vous parlez de 2020 ? Rien ne dit qu’on ne va pas nous exclure du parti au prochain congrès ! Dans les faits, nous n’avons plus notre place au sein du parti. Nous sommes prévenus et en personnes avisées, nous avons déjà pris nos dispositions. Même si nous sommes naïfs, nous ne souffrons pas de surdité ni de malvoyance. Voyez-vous, bien avant la crise, peut-être même un élément déclencheur de la crise, une liste « noire » de seize (16) députés déjà identifiés comme non inscrits aux prochaines élections de 2020, circulait et donnait lieu à des commentaires. Cette information n’a pas été démentie à la rencontre du Secrétariat exécutif national en septembre, lorsque le débat a été soulevé. Vous voyez avec quel mépris nous étions traités. Soit, on peut ne pas avoir des considérations pour ses députés ; mais de là à réunir soi-même tous les ingrédients explosifs nécessaires pour démanteler son propre parti, je reste sans explications. Il leur reste à tirer toutes les conséquences de cette gestion.

Que retenez-vous de votre expérience politique en tant que militante ?

Ma première expérience, partie sur la base d’une simple curiosité, d’un hasard de parcours, m’a complètement désillusionnée. Cette fois-ci, c’est par conviction, pour défendre un idéal et porter une ambition de changement partagée, que je me suis engagée. La tournure des évènements ne va pas, pour autant, me conduire à raccrocher une seconde fois. J’ai vécu l’expérience de la souffrance en politique. J’ai compris que la logique politique est aux antipodes de mon esprit cartésien. Le peuple a un réel pouvoir de gestion à travers la pratique démocratique. Il est important qu’individuellement et collectivement, nous nous engagions, que nous agissions afin de façonner notre développement comme nous l’entendons et pas comme une poignée d’élites le désire. Nous devons faire en sorte que chaque citoyen se sente concerné et participe aux scrutins électoraux. La représentation développe en nous un sens moral de capacité de se mettre à la place des populations pour juger par anticipation les attentes vis-à-vis d’un projet de loi, avant de donner notre caution. C’est extraordinaire et la grande majorité des citoyens n’a pas conscience que sa voix compte effectivement dans la gestion de la chose publique.

Que faites-vous en dehors de la politique ?

Je suis ingénieure hydrogéologue de formation. J’ai créé depuis 1995, un bureau d’études dans le domaine de l’eau potable et de l’assainissement, qui marche toujours, même si je n’ai pas fait fortune (rires). Disons que j’ai été, pendant plusieurs années, la seule femme qui dirigeait un bureau dans ce domaine. Dieu merci, nous avons été plus souvent appréciée par nos partenaires. Je suis membre d’associations professionnelles dans le domaine de l’eau potable et de l’assainissement, membre de l’Association des femmes scientifiques et militante dans des organisations de la Société civile de défense des droits des femmes. J’avoue que j’ai du mal à m’occuper de tout cela à présent. Heureusement, pour moi, des jeunes dynamiques assurent le bon fonctionnement de mon cabinet et me laissent le temps de me donner presqu’entièrement au travail parlementaire.

A titre personnel, quelles sont vos perspectives pour 2020 ?

Vous savez, la politique partisane n’est pas une fin en soi pour moi. Je l’ai dit plus haut, de 1997 à 2010, j’ai fait une parenthèse pour m’occuper de mon cabinet. En même temps, je me dis que je n’ai pas le droit « d’abandonner » toutes ces personnes qui ont accepté de s’engager à mes côtés et qui trouvent l’énergie nécessaire pour m’encourager et susciter l’espoir en moi. Dans la réalité, vis-à-vis des militants et sympathisants, le contrat de redevance morale c’est le député, surtout pour un élu de l’opposition. Les instances du parti sont si loin et si abstraites aux yeux de la base, que c’est à vous que les militants s’adressent. Je suis pour l’instant dans l’expectative quant à la manière de poursuivre. Il reste après tout que nous sommes une équipe, au-delà d’être un simple groupe parlementaire, en raison justement des conditions de notre création. Nous devons vaincre ensemble.

Comment analysez-vous l’initiative du gouvernement, de réformer les règles de traitement en matière de salaire à la Fonction publique ?

Nous avons été témoins, courant 2017, de l’intensité des activités syndicales à travers des grèves et sit-in pour réclamer de meilleures conditions de travail et de traitement salarial. Ces multiples débrayages ont mis à rude épreuve notre économie, en amont, par la perte considérable de recettes, et en aval, par l’incidence budgétaire induite par les augmentations de salaires. Face à une situation aussi préoccupante, l’initiative du Chef de l’Etat est un geste d’ouverture, un signal à l’endroit du peuple burkinabè qu’il est à l’écoute et se préoccupe de trouver une solution pérenne à ses problèmes. Ce dialogue social est nécessaire pour apaiser le climat social, recentrer les actions du gouvernement sur les objectifs du PNDES, instaurer une forme de communication avec les citoyens et inviter les citoyens sur des chantiers autres que ceux de la contestation. Au vu des enjeux actuels, notamment celui de la sécurité, il est urgent que nous puissions nous accorder sur un minimum indispensable pour assurer la stabilité afin de permettre au gouvernement de travailler dans la quiétude. Ce cadre de dialogue ne se limitant pas aux seuls fonctionnaires de l’Etat, sera l’occasion pour le secteur privé de donner de la voix. En suivant de loin toute cette fronde sociale, nous avons le sentiment que nous sommes des laissés-pour-compte. Pourtant, on dit que le secteur privé est le moteur de l’économie. Pour qu’un moteur tourne, il faut des lubrifiants et des entretiens périodiques sinon, il peut se gripper. La réalité des PME-PMI aujourd’hui, c’est tout autre chose. Naguère, on se bousculait pour être employé dans le privé. Aujourd’hui, la tendance s’est inversée. On vient au privé, faute du public, exception faite des sociétés minières et de quelques grandes entreprises. Je souhaite que cette initiative rencontre l’adhésion de tous les acteurs, après les faux-pas observés. Que de l’ensemble des réflexions, il découle des conclusions consensuelles pour la satisfaction de tous et la fin des remous sociaux.

« Parvenir à une gouvernance vertueuse va, sans doute, prendre du temps, mais cela doit impérativement être amorcé sous la conduite des Institutions en combattant les mauvaises habitudes et à enseigner par l’exemple »

Notre pays a eu à essuyer plusieurs attaques terroristes ; la dernière en date est la double attaque du 2 mars dernier à Ouagadougou. Selon vous, comment doit-on lutter contre le terrorisme ?

Je voudrais rendre hommage aux soldats qui ont été fauchés en ce triste jour du 2 mars 2018. Je présente mes condoléances aux familles et prie pour que Dieu accorde ses bénédictions à leurs proches en les mettant à l’abri de tout besoin et en les armant de courage. Un auditeur d’une radio proposait que l’Etat trouve de l’emploi aux veuves ou, à défaut, les accompagne pour initier des activités génératrices de revenus. Je souhaite que tous les blessés recouvrent la parfaite santé. Que dire de plus, qui n’a pas été dit sur les stratégies et les moyens à mettre en œuvre pour lutter contre le terrorisme : renforcement des FDS en formation, moyens matériels, humains et financiers, développement d’un service de renseignement efficace et proactif, etc. J’ai des limites certaines pour parler des stratégies géopolitiques sous-régionales, bien que la lutte contre ces terroristes se mène à ce niveau avec la mise en service du G5 Sahel. Ce que je peux dire, c’est que cette guerre va au-delà de la sous-région, car elle implique une lutte contre les bras armés et financiers qui financent les terroristes. Le Burkina doit joindre sa voix à celle de la communauté internationale pour contraindre ces pays à arrêter leurs soutiens à ces groupes. En plus de la lutte pour éradiquer le mal, je pense que quelques dispositions peuvent être prises : 1) renforcer et durcir les contrôles d’identité aux postes à l’entrée des villes. Il semble que des individus proposent de payer la contravention à défaut de présenter leur pièce d’identité. J’estime que même si la loi le permet, en raison de la situation qui prévaut, on peut décider de surseoir au paiement des contraventions jusqu’à nouvel ordre. 2) Le système de vidéosurveillance doit être renforcé et repensé. Les simples caméras ne suffisent plus. Un poste de surveillance doit être installé dans les bâtiments stratégiques et le tout mis en réseau. De chaque poste, les surveillants doivent avoir la possibilité de condamner les portes d’entrée qui, elles-mêmes, doivent être blindées. 3) Il faut contrôler systématiquement les véhicules qui circulent sans plaque d’immatriculation ainsi que les véhicules aux vitres fumées. 4) Il faut développer une stratégie de communication prenant en compte de nouveaux réflexes que la population doit avoir lorsqu’on se trouve au mauvais endroit au mauvais moment. 5) Vérifier régulièrement l’état de fonctionnalité des systèmes de sécurité installés dans les bâtiments privés. J’ai eu la désagréable surprise de constater que le portique des RX ne fonctionnait pas bien.

Pensez-vous que le MPP répond aux attentes des populations ?

C’est aux populations de répondre à cette question. De prime abord, si le candidat à la présidentielle du 29 novembre 2015 du MPP est au pouvoir, c’est parce que les populations ont estimé que son programme répondait à leurs attentes. S’il faut évaluer le niveau d’atteinte des résultats par rapport aux prévisions, on se réfère au PNDES qui a été élaboré sur la base du programme présidentiel. La revue annuelle 2017 du PNDES a fait ressortir des acquis importants pour 2016. Une amélioration de 47% du taux de croissance, une maîtrise de l’inflation et une réduction de la balance courante. En termes simplifiés, on assiste à une relance de l’économie. Il s’agit, ensuite, de comparer ces chiffres avec ceux initialement prévus pour 2016. Tout compte fait, il ressort de l’évaluation que le contexte sécuritaire et les mouvements sociaux n’ont pas permis l’atteinte des résultats. Le constat général est que les attentes sont si fortes, au sortir de l’insurrection, que les progrès enregistrés ne sont pas forcément perceptibles. Sans comprendre grand-chose des statistiques, on peut constater, à mon avis, les actions entreprises dans le domaine de la santé, de l’éducation, des infrastructures… et les promesses de création d’usines. Les conséquences heureuses entraînées par les remous sociaux, seront comptabilisées à l’heure du bilan comme des résultats atteints non attendus. Un autre élément d’évaluation des actions du gouvernement, c’est la gouvernance et le renforcement de l’Etat de droit, piliers indispensables pour booster l’économie. A ce niveau, du chemin reste à faire. Pas seulement par le gouvernement, mais par l’ensemble des citoyens. Parvenir à une gouvernance vertueuse, va sans doute prendre du temps, mais cela doit impérativement être amorcé sous la conduite des institutions en combattant les mauvaises habitudes et à enseigner par l’exemple.

En quoi peut- on parler d'évolution dans la participation politique des femmes au Burkina Faso?

Cette participation peut être vue sous plusieurs angles. Dans la perception même du statut de la femme, dans les textes réglementaires, dans les discours et déclarations des politiques et à travers les statistiques. Tous ces aspects ont eux-mêmes évolué dans le temps si bien qu’aujourd’hui, même si des écarts existent entre eux, leur évolution s’est faite presque simultanément. Par exemple, si les textes sont de nos jours à un niveau élevé de satisfaction, la perception du statut de la femme en tant que personne humaine à part entière, égale de l’homme, a du mal à convaincre dans certains milieux. De façon chronologique, les us et coutumes définissaient le statut de la femme avant l’arrivée des colonisateurs. Il n’y avait pas de textes juridiques. Si pendant la colonisation, les droits civils étaient reconnus à la femme, dans les faits, son statut n’a pas vraiment évolué et ce statut était toujours régi selon la coutume. A l’Indépendance, la femme burkinabè a hérité de la colonisation du droit de vote sans avoir eu à mener des luttes comme cela s’est fait ailleurs. Elle est électrice et éligible. La période révolutionnaire a marqué les esprits avec cette politique volontariste du président Sankara de voir évoluer la condition de la femme (le 8 mars, les hommes au marché ). Beaucoup de femmes politiques ont fait leurs premiers pas pendant la révolution et cela a énormément contribué à valoriser l’image de la femme. Le discours politique était au top. Malheureusement, du fait de l’Etat d’exception, les textes réglementaires faisaient défaut, quoique nous ne devions pas perdre de vue que le Code des personnes et de la famille date de cette période (Zatu an VII 13 du 16 novembre 1989). Sur le plan international, la journée et la décennie internationales de la femme (1975-1985) ont été une période d’intenses sensibilisations et ont permis de modifier le regard de la société sur la femme. Dès l’adoption de la Constitution du 2 juin 1991, qui consacre l’égalité entre l’homme et la femme, une nouvelle ère s’est ouverte : ratification tous azimuts de textes internationaux et régionaux sur les droits des femmes ; adoption de textes au niveau national, discours et déclarations politiques favorables à la participation de la femme aux instances de décision ; loi sur le quota genre. Pour avoir une idée de l’évolution des statistiques, il faut identifier tous les postes de décisions depuis la Ière République et faire une présentation désagrégée. En général, elles ont évolué en dents de scie : faible avant la Révolution, fort appréciable pendant la révolution et fluctuant depuis la IVe République. La participation des femmes dans les différents gouvernements de Paul Kaba Thiéba, c’est du genre « Je t’aime, moi non plus ». On utilise une échelle pliante qu’on allonge ou replie à souhait, comme si on craignait d’aller plus haut pour cueillir les fruits de la pleine participation des femmes ! De 24% en 2016, le pourcentage est à 18% avec le récent gouvernement. L’Assemblée nationale est passée de 3% de femmes en 1992, 8% en 1997, 13% en 2002, 15% en 2007, 19% en 2012 et 12,5% en 2018 malgré le vote de la loi n°010-2009/An du 16 avril 2009 sur « le quota genre ». Ce tableau sombre ou gris, c’est selon, nous interpelle : femmes, pouvoirs publics, organisations de la société civile, partis politiques, populations. Car il n’y a de vraie démocratie que si elle est inclusive, intégratrice des hommes et des femmes, toute chose qui traduise l’équilibre de la composition de la société.

Peut-on compter sur la participation effective des députés membres de l’UPC-RD au Congrès de l’UPC en juin prochain ? Est-ce que vous vous attendez à perdre vos postes à l'issue du congrès?

Nous sommes membres de l’UPC et participerons au Congrès si toutes les dispositions sont prises pour notre sécurité. Du reste, cela reste une décision collective.

« A ma connaissance, il n’y a pas eu une négociation directe entre la famille Zongo et l’Etat burkinabè »

Nous avons ouï dire que le groupe est en passe de créer un parti ou de rejoindre le MPP. Qu'en est-il exactement?

Vous serez informés en temps opportun. Pour l’instant, ni l’un, ni l’autre n’est à l’ordre du jour. Nous avons été mis devant une situation inattendue et la sagesse commande que nous prenions toutes les dispositions pour décider et agir en toute connaissance de cause.

Vous sentez-vous redevable au parti ?

J’ai toujours pensé que dans la vie, on reste redevable à tous ceux qui, de notre enfance jusqu’à notre disparition, forment notre famille, nos amis, nos proches, nos collègues, nos camarades... J’ai dit à mes collègues députés à Fada, lors de nos deuxièmes journées parlementaires, au début de la crise, que je ne disposerais pas assez de toute ma vie pour témoigner ma reconnaissance au Président de l’UPC, à chacun des députés et à l’ensemble des militants et sympathisants pour m’avoir permis d’être élue, et pour tout le soutien, toutes les sollicitudes dont j’ai bénéficié de leur part, à un moment ou à un autre au cours de ces années de relations humaines. Je leur ai dit aussi que même envers son propre fils, on n’a pas tous les droits. J’ai cette faiblesse d’avoir des limites dans la vie, que je ne saurais franchir. Mon engagement en politique ne peut être un prétexte pour faire des compromissions ou un renoncement de soi. Je sais aussi que je suis là parce que je le mérite. Bien entendu, ils sont nombreux, les camarades qui sont autant méritants que moi. J’ai eu un véritable pincement au cœur à la publication des résultats, parce que j’aurais souhaité que nous engrangions beaucoup plus de sièges. Dans la commune urbaine de Dédougou, nous occupons deux postes dans le bureau du Conseil municipal : ceux de 2e adjoint au maire et de président de la Commission environnement et développement durable. A Sourgou, commune rurale de la province du Bulkiemdé d’où est originaire mon défunt mari, l’UPC occupe le poste de 1er adjoint au maire, de président de la Commission environnement et développement durable et a un représentant au Conseil régional. J’ai été approchée par le président du parti pour travailler dans la province du Mouhoun, parce qu’une délégation de la province lui a expressément demandé de me convaincre de venir leur porter main forte pour implanter le parti. Alors, redevabilité pour redevabilité, l’UPC est au Mouhoun aujourd’hui, ce que des camarades et moi avons voulu qu’il soit !

Dans les provinces de la Kossi et des Banwa, certains militants menacent de claquer la porte parce la direction nationale du parti veut leur imposer des correspondants provinciaux. Quelle lecture faites-vous de cette situation?

Pour la Kossi, circonscription électorale du Président du groupe parlementaire UPC-RD, le député Daouda Simboro, je dis simplement que malgré les commentaires, les déclarations et les missions-terrains de l’UPC, qui tendent à faire croire que les députés démissionnaires du groupe parlementaire ne représentent pas grand-chose à la base et que le parti continue d’enregistrer de nouveaux militants, notre démission du GP/UPC donne bien du fil à retordre aux responsables du parti. Quant aux menaces des militants dans la province des Banwa, je suis de près les malaises causés ici et là, nés de la désignation de correspondants venus d’autres provinces et la tentative d’imposer les responsables aux structures. Je n’ai pas de commentaire particulier.

En politique, il faut savoir encaisser les coups. Est-ce qu'une femme engagée est capable d'encaisser des coups?

J’ai envie de répondre que si elle ne peut pas encaisser des coups, elle a intérêt à s’y exercer avant de s’engager sinon, elle l’apprendra à ses dépens. Je pense néanmoins que les femmes sont persévérantes et téméraires. Cela ne veut pas dire qu’elles doivent avoir les mêmes attitudes que les hommes. Par nature, elles ne donnent pas de coups de poing. Elle n’a donc pas à s’exercer à en donner parce qu’elle fait la politique. Faire face aux attaques et tentatives de déstabilisation morale est le seul moyen d’acquérir une vraie force intérieure. On acquiert des connaissances et de l’expérience lors des moments les plus difficiles de la vie. Comme le dit le Dalaï-Lama, « nous ne devons pas être furieux contre le feu si nous nous brûlons, car la nature du feu est de brûler ».

Au cours de l’émission controverse sur la RTB-télé, Ablassé Ouédraogo a avoué que le cas Norbert Zongo a été réglé financièrement. Vous qui êtes proche de la famille, qu’en est-il exactement ?

Je suis, disons, par alliance, plus ou moins proche, mais je ne parle pas au nom de cette famille que je connais peu, mais je vais juste donner mon avis en tant que citoyenne. A ma connaissance, il n’y a pas eu une négociation directe entre la famille Zongo et l’Etat burkinabè ; la famille avait d’ailleurs refusé de prendre part à la journée du pardon. On se souvient qu’en 2014, suite à la saisine de la Cour africaine des droits de l’Homme par le MBDHP et les ayants droit de feu Norbert Zongo, celle-ci, dans son arrêt, a exigé de l’Etat la réouverture du dossier et des réparations. Peut-être que c’est de cela qu’il s’agit.

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D’abord, vous réitérer mes remerciements et prier ceux et celles qui m’ont soutenue personnellement, et qui ont collectivement soutenu le groupe, de recevoir, à travers vos colonnes, ma profonde gratitude et la reconnaissance du groupe UPC/RD. Les sentiments et leurs expressions sont capitaux pour moi. L’amour et l’estime de mes proches, me donnent la force d’avancer. Le vin est tiré, il faut le boire ! Pour toutes celles et tous ceux qui ont partagé mes angoisses, mon traumatisme, mes insomnies, je reste engagée et déterminée et refuse d’abandonner le combat. Pour mon pays, je souhaite paix, stabilité et bien-être pour ses filles et ses fils. Chaque Burkinabè fait partie de la solution parce qu’étant un maillon de la chaîne du développement. Aux femmes, je les exhorte à plus de détermination, de courage et d’audace. Nous avons été témoins des engagements pris par les autorités à l’occasion de la célébration du 8 mars : tenons-nous prêtes pour relever les défis. De cette crise, j’ai tiré des leçons et suis sortie grandie et assagie. C’est sans doute ce qui fait la beauté de la politique !
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