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Paul Sawadogo, professionnel du gaz à propos de la coupe abusive du bois : « En 2002, il ne restait plus que 10% de nos forêts»
Publié le samedi 27 janvier 2018  |  Le Pays




Depuis des années, le Burkina Faso connaît des crises récurrentes de gaz. Pour mieux comprendre le phénomène, nous sommes allé à la rencontre d’un acteur évoluant dans le domaine du gaz butane, Paul Sawadogo, bien connu du public, ancien responsable Gaz de Total Burkina. Il a effectué beaucoup de missions dans le cadre de sa formation dans le domaine du gaz. Dakar (Sénégal), Douala (Cameroun), Tema et Accra (Ghana), Rabat (Maroc), Paris, Marseille et Toulouse (France). Il a participé à une Convention internationale sur le gaz à Paris, du 16 au 18 octobre 2002. Aujourd’hui, Paul Sawadogo a créé une unité de gaz dénommée « GPL Service ». Dans l’interview qui suit, il donne sa vision sur l’activité du gaz au Burkina Faso.

« Le Pays » : Que signifie GPL ?

Paul Sawadogo : Gaz des pétroles liquéfiés (GPL). GPL Service est une société de distribution de gaz. Mais nous faisons aussi de la formation, pour soutenir les structures qui sont dans le besoin.



Sur quoi porte cette formation ?

Elle s’articule sur les modules suivants : la connaissance du produit GPL, les avantages du GPL, son utilisation, la lutte contre l’incendie, les consignes de sécurité. Nous pouvons également aider les nouvelles sociétés de gaz à créer leur réseau de distribution.



Comment se porte GPL service à ce jour ?

Ce n’est un secret pour personne. Les GPL sont issus des pétroles bruts ou des gisements de gaz brut. Sont dénommés GPL, le propane commercial, le butane commercial et le mélange carburant GPL. GPL service rencontre en ce moment des difficultés financières pour relancer son activité gaz. J’ai demandé du soutien à l’Etat qui, comme on le sait, est engagé dans la lutte contre la désertification et soutient les initiatives dans ce sens. J’attends toujours une réponse favorable qui tarde à venir. Si je n’obtenais pas gain de cause, GPL Service sera fermé et ce serait dommage !

Seriez-vous prêts à travailler dans une société qui vous ferait cette offre ?


Pourquoi pas ? Avec toutes les connaissances acquises sur le gaz après une trentaine d’années de service, je n’hésiterai pas à mettre mon savoir-faire au service du bien-être des populations à travers une société, en vue de développer l’activité gaz à leur profit. Ceux qui me connaissent, vous diront que j’ai toujours œuvré aux côtés des autorités de ce pays pour développer au mieux l’activité gaz au Burkina.

Pensez-vous que l’Etat s’est beaucoup investi dans le développement du gaz ?

Je félicite l’Etat pour ses efforts. Avant l’option pour le gaz, des mesures avaient été prises pour la protection de la forêt, à savoir le reboisement industriel et villageois, la diffusion des foyers améliorés et la règlementation de la coupe du bois. Malheureusement, le bilan de ces mesures n’a pas été satisfaisant quant à freiner de façon significative la désertification. C’est ainsi qu’on a dû recourir au gaz butane comme combustible de substitution au bois de chauffe et au charbon de bois. Le gaz est un produit subventionné. Il faut donc noter la bonne volonté politique de l’Etat, avec la création de la SONABHY en 1985 et on se souvient qu’en 1987, l’activité gaz a été inscrite au premier plan quinquennal de développement et classée parmi les projets prioritaires. On peut aussi retenir que dans les années 80, il y a eu un rabattement des droits de douane à l’importation sur le matériel gaz, pour permettre aux distributeurs de s’approvisionner à coût réduit.

Apparemment, la vente du gaz progresse chaque année. Est-ce suffisant pour contrer le déboisement, selon vous ?

Vous faites bien de le dire. Chaque année, on constate une progression de la consommation du gaz, mais je pense que pour une bonne analyse, il faut voir comment se comporte l’énergie concurrente qu’est le bois. Dans la classification des énergies domestiques consommées au Burkina Faso, le bois est en tête du peloton. Cela veut dire que même si le marché du gaz progresse chaque année, au niveau du bois, il y a aussi une constance qui semble dépasser celle du gaz.

Quels sont les risques liés au fait que le bois occupe la première place dans la classification des énergies domestiques consommées ?


Pour ma part, et comme on le dit dans notre jargon, il faut comparer le tonnage annuel du gaz consommé par tête d’habitant au Burkina Faso, à la moyenne annuelle par tête d’habitant en Afrique pour mieux comprendre la situation. La coupe abusive du bois entraîne forcément la disparition de la forêt ; ce qui est dangereux. C’est pourquoi il faut réagir, faire en sorte que le gaz butane devienne véritablement le produit de substitution au bois de chauffe et au charbon de bois, et devienne également un produit combustible qui sera consommé comme l’énergie principale et non comme une énergie d’appoint. En 1993, on avait 30% de forêt par exemple. En 2002, il ne restait plus que 10% et de nos jours, il est question de 5%. Nous pensons qu’il faut agir vite pour trouver les bonnes réponses, car, outre la déforestation, il y a aussi les animaux qui sont menacés de disparition.

Qui sont les plus gros consommateurs de bois, à votre avis ? Sont-ils du milieu rural ou urbain ?

Les gros consommateurs de bois se trouvent malheureusement dans les centres urbains. Il ressort que sur l’ensemble du bois collecté en milieu rural, seulement une petite quantité reste sur place pour la consommation. Tout le reste est véhiculé dans les grands centres urbains. C’est rare de voir un camion qui charge du bois en ville pour aller desservir des gens en campagne. S’il y a coupeur de bois, c’est parce qu’il y a consommateur de bois.

Quel message adresseriez-vous aux Burkinabè qui vous liront ou qui vous connaissent en tant que professionnel du gaz sur la problématique de la lutte contre la déforestation ?

Je leur dis simplement que la protection de l’environnement est l’un des plus grands métiers que nous ont légué nos ancêtres. Nous devons continuer cette œuvre en leur nom et pour la génération future. J’invite les compatriotes à une meilleure compréhension des enjeux liés à l’utilisation du gaz et à se mobiliser autour des autorités pour lutter efficacement contre la désertification.

Vous êtes aussi un amoureux de football, ancien entraîneur de l’équipe des « Black Stars » de Paspanga et délégué sportif de l’Association sportive des employés de pétrole (ASEP). Qu’est-ce que tout cela vous rappelle aujourd’hui ?

C’est un très bon souvenir pour moi parce que, lorsqu’on vit en société et qu’on a la possibilité d’unir les gens ou de créer une bonne ambiance, c’est un plaisir et c’est toujours bon de le faire. Le sport, on le sait, est un facteur de cohésion sociale et de mobilisation autour d’objectifs de développement socioéconomiques dans la cité. Je fais, du reste, un clin d’œil aux joueurs de cette équipe et leur souhaite du succès dans tout ce qu’ils entreprendront dans la vie.

Votre mot de fin !


J’ai consacré ma vie professionnelle au développement de l’activité gaz au Burkina Faso. Au regard de mon parcours professionnel et de mes expériences aux plans national et international dans ce domaine, je souhaite vivement que l’Etat puisse soutenir GPL Service dans le but d’œuvrer toujours au développement de l’activité gaz. Cela, pour faire profiter au Burkina Faso toute l’expertise acquise dans ce domaine au cours de ma carrière. Je tiens au passage à remercier le Groupe Total, la SONABHY, le BUMIGEB, les sapeurs-pompiers, les ministères du Commerce et de l’Energie, l’IGAE, les grossistes-gaz et tous les revendeurs gaz du Burkina Faso pour leur contribution. Je félicite également les femmes du Burkina Faso pour leur adhésion remarquable à la lutte contre la déforestation, en acceptant d’abandonner le bois pour utiliser le gaz butane.

Propos recueillis par Lonsani SANOGO
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