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Léonce Koné, président de la commission AD HOC du CDP: « Je ne regrette pas d’avoir déclaré que je ne condamnais pas la tentative de putsch »
Publié le mardi 26 decembre 2017  |  Le Pays
CDP
© Autre presse par Roger Nana
CDP : le directoire rencontre les anciens élus locaux du parti
Mardi 17 février 2015. Ouagadougou. Stade du 4-Août. Le directoire du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP, ex-parti au pouvoir) a rencontré les anciens maires du parti et les anciens présidents de conseils régionaux. Photo : Léonce Koné, président du directoire du CDP




De l’insurrection populaire d’octobre 2014 au putsch manqué de septembre 2015, Léonce Koné est un des politiciens qui ont été les plus éprouvés par ces deux événements, avec le saccage de son domicile familial dans son fief à Banfora et sa mise en examen dans le cadre du coup d’Etat manqué du Conseil national de la démocratie (CND). Outre ces épreuves, il est de ceux des anciens dignitaires du régime déchu qui jouent les premiers rôles pour redorer le blason du CDP, l’ex-parti au pouvoir. Entre peaufinage de stratégies pour donner un nouveau souffle à son parti, mission pour laquelle il lui est échu le poste de président de la Commission ad hoc et ennuis judiciaires, Léonce Koné se confie à ‘’Mardi Politique’’. Lisez plutôt !

Le Pays : Vous êtes président de la Commission ad hoc du CDP alors qu’il existe un président. En quoi consiste votre rôle ?

Léonce Koné (L.K) : La création de la Commission ad hoc obéit à la volonté de notre parti de mettre en place une structure et des mécanismes exceptionnels, pour répondre à un défi exceptionnel. Depuis trois ans, nos adversaires de tous bords n’ont eu de cesse de tenter de désarticuler le CDP, de l’anéantir ou de l’affaiblir de façon irrémédiable. On ne peut pas résister à une adversité de cette ampleur, de cette violence, en fondant uniquement l’action du parti sur la routine du fonctionnement de ses organes permanents. D’autant que ces organes ont eux-mêmes été fragilisés par un climat d’hostilité, entretenu par le caractère massif et répétitif des attaques que leurs membres ont subies. Cette entreprise d’intimidation a provoqué le découragement de certains de nos militants et la désorganisation de nos structures. La mission de la Commission ad hoc est à la fois simple à énoncer et complexe dans
sa mise en oeuvre. Il s’agit de remobiliser nos forces politiques, en restaurant nos structures sur l’ensemble du territoire national. En même temps que ce travail de réorganisation, il s’agit également
de relancer l’action du CDP sur les scènes politiques nationale et locales, afin de lui permettre de jouer pleinement son rôle d’élément majeur de l’opposition républicaine. Notre but ultime étant de participer pleinement à la compétition démocratique, ainsi que la Constitution du Burkina nous en donne le droit, pour apporter notre contribution à l’amélioration des conditions de vie de nos concitoyens.

L’ insurrection populaire a- t -el le donc eu raison de l ’assise du CDP?

Effectivement, notre parti a été fortement ébranlé par l’insurrection de
2014, par la perte du pouvoir et ses conséquences multiples, par les violences qui ont été exercées sur ses
dirigeants, ses militants et ses sympathisants, supposés ou réels. Un de ses dirigeants, le doyen Salif Ouédraogo, qui était secrétaire national chargé des anciens, a été tué durant l’attaque du siège du parti le 30 Octobre 2014. Il est, à ma connaissance, le seul militant avéré d’un parti politique qui a trouvé la mort durant ces émeutes. Si je signale cela, ce n’est évidemment pas pour minimiser la tragédie que constitue,
pour leurs familles, pour leurs proches et pour la Nation entière la disparition des autres citoyens victimes des violences qui ont accompagné ces manifestations. C’est seulement pour relever un fait, qui ajoute au désarroi que nos membres et nos structures ont pu ressentir du fait de ces évènements. En plus, les domiciles de plusieurs de nos militants ont été incendiés, de même que les sièges de notre parti à Ouagadougou et dans de nombreuses
localités. Il ne vous a certainement pas
échappé que depuis la Transition, notre parti est en butte à un harcèlement continuel. Il a fait l’objet d’une mesure de suspension en fin 2014, qui pouvait laisser craindre qu’il ne fût dissous purement et simplement. En avril 2015, le CNT a voté une modification liberticide du Code électoral qui a eu pour effet d’écarter arbitrairement des militants du CDP et d’autres partis de l’ancienne majorité des scrutins qui devaient clôturer la période de transition.
Ce texte a été pris en violation flagrante de la Constitution burkinabè, des traités internationaux signés et ratifiés par notre pays et au mépris d’un jugement explicite rendu par la Cour de Justice de la CEDEAO. Ensuite, des poursuites judiciaires ont été engagées contre les membres du dernier Gouvernement du président Compaoré, accusés de complicité pour les homicides et dégâts matériels causés par l’insurrection, sur un fondement juridique totalement absurde. Enfin, après la tentative de putsch de 2015, on s’est évertué à établir une responsabilité du CDP et de ses membres dans cette opération.
Cette allégation n’a pas prospéré en ce qui concerne le parti luimême, mais plusieurs de ses membres, dont moi-même, sont sous le coup de poursuites pour leur complicité présumée dans ce putsch. Sans compter l’accusation scandaleuse et farfelue, énoncée par les plus hauts responsables du pouvoir,
qui tend à nous présenter devant l’opinion comme les commanditaires des attaques terroristes et troubles variés qui menacent la stabilité
du pays et la tranquillité de
ses habitants. Peu de formations politiques survivraient à un tel acharnement hostile. Or le CDP, non seulement a su résister face à l’épreuve, mais fait aussi preuve d’une nouvelle vigueur.
Cela illustre un trait de caractère de nos compatriotes, qui sont des hommes et des femmes courageux, fidèles à leurs engagements. Quant à mon rôle personnel dans cette démarche, il consiste à coordonner l’action de réorganisation et de relance du parti. J’exerce cette mission en parfaite intelligence avec mon camarade Achille Tapsoba, premier vice-président du parti, à qui le Bureau politique national a confié l’intérim de la présidence du CDP jusqu’au prochain congrès statutaire prévu en 2018. L’un et l’autre, nous faisons ce qui est nécessaire pour que cet attelage fonctionne au mieux de l’intérêt de notre parti et les choses se passent bien.

Où en est-on avec la restructuration du parti pour laquelle vous avez été porté à la tête de la Commission ad hoc ?

Je crois pouvoir dire que la restructuration du parti se développe de façon tout à fait convenable. Nous avons déjà renouvelé presque toutes nos sections provinciales, dans un climat de rassemblement, d’unité et de dialogue démocratique. Cela n’interdit pas la compétition et les rivalités qui sont inhérentes à l’action politique. Mais dans la plupart des cas, une fois que ces débats démocratiques ont été épuisés, le consensus a prévalu pour achever la désignation des membres des sections provinciales. Les 4 ou 5 sections qui restent à renouveler, le seront dans les prochaines semaines. Nous avons choisi délibérément de laisser à nos militants le temps nécessaire pour se concerter et trouver par eux-mêmes un consensus pour la désignation des membres de leurs sections respectives. Le fait que cela s’accompagne parfois de discussions vives, de rivalités, est plutôt un bon signal pour le regain d’intérêt que suscite le parti et pour le dynamisme de ses pratiques démocratiques. C’est la même démarche qui est suivie pour le renouvellement de nos structures à l’échelon des communes, des secteurs et des villages. Là aussi, les choses vont bon train. Le CDP est donc présent et debout sur toute l’étendue du territoire national. A vrai dire, dans cette action de remise sur pied de nos structures, les organes de la Commission ad hoc ont surtout joué un rôle de catalyseur de l’énergie de nos militants de base, de leur volonté invincible de relever le parti dans lequel ils
croient. Mais le travail de la Commission ad hoc ne se limite pas à la remise sur Il a porté également sur l’instauration d’une meilleure coordination entre le groupe parlementaire du CDP et la direction du parti. Cette action aussi a porté ses fruits. Je crois pouvoir dire que notre groupe parlementaire joue, au sein de l’Assemblée nationale, le rôle d’une opposition républicaine cohérente, active et résolue. De surcroît, nos députés ont à plusieurs reprises apporté une contribution financière substantielle à la vie du parti. L’autre chantier de la Commission est celui de la communication. Nous voulons insuffler un nouveau dynamisme à notre communication, en la rendant à la fois proactive et réactive. Comme vous avez pu le voir, le parti réagit de façon proportionnée aux attaques qui sont faites contre nous, de manière factuelle et modérée ou avec vigueur suivant les cas. Mais nous avons surtout l’ambition d’organiser une communication positive, qui explique à nos militants et à l’opinion nos positions politiques sur les sujets importants. Cette approche est complétée d’ailleurs par un effort accru de formation de nos militants, particulièrement les jeunes et les femmes. L’un des objectifs que nous nous sommes fixés et que nous sommes en passe d’atteindre, est de mettre fin à la diabolisation du CDP pour le faire reconnaître par l’opinion comme un parti normal, qui participe à la vie politique du pays au sein d’une opposition républicaine, respectueuse des institutions, mais combative. Il y a encore des gens pour nous contester ce droit, mais ils sont quantité et qualité négligeables.

Vous dites que votre parti est maintenant debout et présent sur toute l’étendue du territoire national ; alors comment comptez-vous rebondir pour l’échéance de 2020 ?

Ce que je viens de vous expliquer sur notre action, montre que nous sommes en train de reconquérir une position importante sur la scène politique. Certes, nous n’avons plus la place hégémonique que nous occupions par le passé, mais cela n’est pas une situation dramatique. Au contraire, elle est stimulante, en ce qu’elle nous appelle à réfléchir pour tirer leçon de nos échecs, de nos insuffisances, de façon lucide et intelligente. Depuis 2014, le Burkina est entré dans une nouvelle étape de son évolution démocratique, avec des forces politiques plus équilibrées, un niveau d’exigence accru de la part de la société civile sur la gouvernance du pays. Nous devons nous mettre en position de répondre à ces nouvelles attentes, avec ouverture d’esprit, sans renier pour autant les avancées majeures qui ont été accomplies par notre pays sous la direction de Blaise Compaoré. Elles touchent aux données macroéconomiques, aux secteurs sociaux, à l’environnement des affaires, aux libertés publiques, à la vie démocratique, à la sécurité, à la diplomatie, etc. Tout n’était pas parfait, loin s’en faut. Mais quand j’écoute ce que disent nos compatriotes extérieurs aux luttes de positionnement politiques, il apparaît évident qu’une grande partie de l’opinion nationale considère que la vie devient de plus en plus difficile sur tous ces plans. Lorsqu’il n’existe pas d’éléments de comparaison, on peut raconter aux citoyens qu’avant c’était l’enfer et qu’ils découvriront le paradis. Lorsqu’ils ont eu à subir plus de deux années de galère et d’insécurité permanente, avec des
promesses mirobolantes confrontées à une réalité et à des perspectives sombres, ils peuvent juger sur
pièces. Donc, nous ne sommes certainement pas le parti qui a le plus à redouter des échéances électorales de 2020. Nous nous y préparons avec application et détermination.

Et à quand le prochain congrès du CDP ?

L’échéance statutaire pour notre prochain congrès est l’année 2018. Nous nous organisons pour la respecter. C’est devenu d’ailleurs une nécessité impérieuse, pour mettre le parti en ordre de bataille et en ordre tout court, en prévision des élections de 2020. Mais il n’y a pas que les élections futures. Dans l’intervalle, le parti doit être bien organisé pour participer à l’animation de la vie démocratique et politique.

Léonce Koné serait-il candidat à la présidence du CDP ?

Le moment venu, les instances que nous aurons désignées à cette fin se concerteront pour choisir les candidats aux différents postes de direction du parti et ces propositions seront soumises à la décision du Congrès. A ce stade, je n’ai aucune idée de la procédure qui sera retenue, ni de l’identité des candidats aux différentes fonctions, pour la raison simple que la direction du parti n’a pas encore statué sur ces questions, ni même commencé à travailler sur les organes de préparation du Congrès. Cela viendra en son temps. Maintenant, pour répondre de façon précise à votre question, je ne suis pas obsédé par l’idée de devenir président du CDP. Mais l’une des maximes de la politique est qu’il ne faut jamais dire jamais. L’essentiel est que le parti soit dirigé par une personne sérieuse, crédible, entourée par une équipe solidaire et engagée. Nous avons besoin d’une direction forte et soudée, composée d’hommes et de femmes aguerris, qui ont donné la preuve de leur constance et de leur fidélité au parti face à l’adversité. Nous avons besoin d’une direction capable de mener l’action du parti, de manière résolue et cohérente, dans les bons comme dans les mauvais jours. Nous appartenons à l’opposition et nous devons nous attendre à un durcissement de la lutte politique à mesure qu’approcheront les prochaines échéances électorales, avec tout ce que cela peut supposer de manoeuvres de déstabilisation et d’intimidation. Nous en faisons l’amère et rude expérience depuis 3 ans. Cela dit, nous aborderons également ces défis avec une sérénité et un calme résolus, parce que je pense qu’il est temps que le dialogue démocratique et la compétition politique dans notre pays se déroulent dans un climat apaisé, civilisé.
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