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Le Pays N° 5405 du 22/7/2013

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Meeting de la Coalition contre la vie chère : Une foule immense et furieuse à la place de la Nation
Publié le lundi 22 juillet 2013   |  Le Pays


Manifestation
© AFP par DR
Manifestation contre le pouvoir et la "vie chère"
Samedi 20 Juillet 2013. Ouagadougou. Les populations ont manifestés contre la cherté de la vie et le régime du président Blaise Compaoré.


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La Coalition contre la vie chère (CCVC) a battu le rappel de ses troupes le 20 juillet 2013. Objectif : dire non à la politique actuelle du gouvernement qui rend la vie de plus en plus chère. C’est un appel qui a été entendu, en témoigne la foule immense qui a pris d’assaut la place de la Nation, autour d’une trentaine de syndicats, d’associations et d’organisations de la société civile. Si les participants au meeting ont souhaité marcher dans les rues de Ouagadougou, le président de la CCVC, Tolé Sagnon, les en a dissuadés. « La marche, ça sera pour plus tard, a-t-il dit ». Mais les mises en garde n’ont pas manqué. Pour les leaders de la CCVC, cette manifestation, qui s’est aussi déroulée dans toutes les 45 provinces et les 13 régions, est un signal.

Pour ce grand rassemblement de la trentaine de syndicats, d’associations, d’organisations de la société civile (OSC), la place de la Nation était bondée de monde. Les slogans n’ont pas manqué : « Président, le peuple a faim. Touche pas à l’article 37 » ; « Laissez les articles, modifiez les salaires » ; « Le peuple est affamé. Où va mon pays ? » « Compaoré, quitte le pouvoir = l’été noir » ; « Blaise, pitié, descends ; la vie est pire ». Ceux qui ont pris la parole au cours de ce meeting ont embouché la même trompette pour faire dire à tous ceux qui sont sortis que « trop, c’est trop ». Le message de l’Organisation démocratique de la jeunesse (ODJ) du Burkina Faso a fait ressortir les maux que vit l’ensemble des Burkinabè. « Pour les jeunes diplômés et les chômeurs, l’insertion professionnelle est devenue un parcours du combattant dans la mesure où la IVe République a démissionné en matière de création ou de promotion d’emploi. En lieu et place, il propose des programmes factices », dira le représentant de l’ODJ. Celui-ci a appelé à la vigilance l’opposition officielle qui croit que des « élections transparentes et justes peuvent être organisées dans ce système politique pourri, hermétiquement fermé et décadent ». A sa suite, la représentante des femmes, le président du mois des centrales syndicales, tous, ont tour à tour, mis en garde le pouvoir qui continue de paupériser les populations et de rendre la vie plus chère.

La tentative de marcher

Puis vint le temps du message de la CCVC avec le président de la coalition, Tolé Sagnon. Au moment où celui qui a pris le sobriquet de « Général » est monté sur le podium, la foule était déjà gonflée à bloc par les messages, les chansons et les coups de sifflets. Une partie réclamait de marcher hic et nunc à travers les artères de la capitale. On entendait donc :« on veut marcher ! On veut marcher ! » La foule criait de plus en plus fort à telle enseigne que le « Général » a dû user de toute son expérience pour la calmer. Voici ce qu’il disait : « Que ceux qui sont venus à l’appel de la coalition, s’asseyent. Asseyez-vous camarades. Nous allons parler et nous allons nous comprendre. Certains sont venus pour marcher, nous ne savons pas trop pourquoi, à quelle destination et avec quel objectif, qu’ils aillent où ils veulent, ce n’est pas notre problème ». De fortes acclamations fusaient de la foule, des cris et des coups de sifflets. Il fera, par la suite, un rappel pour dire que, depuis plus de 20 ans, les organisations de la société civile se battent pour de meilleures conditions de vie, pour plus de démocratie et pour que finissent les violations des libertés syndicales. « Est-ce le cas ? » La réponse est venue sèche et sans hésitation ; « Non ».

Aller à Kosyam…

A ceux qui veulent marcher, Tolé Sagnon leur a fait comprendre que ce n’est pas le moment. A la question de savoir où elle voulait aller, la foule répondra : « A Kosyam ! A Kosyam ! A Kosyam » ! Voilà la réponse de Tolé Sagnon : « Si on va aller à Kosyam, il vous faut encore amener d’autres personnes ». La lutte a toujours été menée et ses formes varient en fonction des objectifs et du contexte. Pour pouvoir aller à Kosyam, le « Général » a demandé à ses troupes de « commencer par faire tomber les zones rouges ». La marche n’est pas exclue et elle n’est pas loin. « Nous allons marcher », dira Tolé Sagnon mais ce ne sera pas par effet de mode. Pour ce faire, il faut s’organiser et éviter de se disperser au moindre gaz lacrymogène. « On a trouvé la solution à ça », lance un jeune dans la foule et le « Général » de renchérir : « Le gaz lacrymogène, ça finit ; mais le peuple ne finit jamais » et d’ajouter que « derrière le pouvoir, il y a les balles ». A propos de l’organisation, le président de la CCVC a demandé à la foule de se rappeler la lutte engagée par les syndicats en 1966 et qui a fait partir le président Maurice Yaméogo. « Soyez vigilants », a-t-il martelé. En réaction au message d’une pancarte qui disait, « Blaise, pitié, descends », Tolé Sagnon fait comprendre que si la population attend la pitié du président, celui-ci ne s’en ira jamais. La coalition appelle le peuple à se poser la question suivante : « On amène qui à la place de Blaise ? N’hésitez pas à vous poser la question » afin d’éviter les mêmes travers.

Un autre « Non au Sénat »

Le cri de détresse de la coalition va encore plus loin car, selon son président, la Constitution de 1991 a été modifiée à plusieurs reprises, « en moyenne une fois tous les trois ans ». Face à une telle situation, la coalition s’est même demandé « ce que vaut véritablement aujourd’hui notre Constitution qui est ainsi triturée, manipulée, tripatouillée, plâtrée et replâtrée à souhait au gré des intérêts du moment ; on dirait un petit arrêté de ministre ». Face à la situation présente avec les augmentations des prix des produits de première nécessité, « le pouvoir a des velléités de modification de l’article 37 de la Constitution et d’institution du Sénat qui, immanquablement, va coûter cher au contribuable », a souligné Tolé Sagnon. Cela n’a pas manqué de soulever les hourras de la foule. « Les cris de détresse des populations du pays réel montent en même temps que leur colère face à la vie chère et à la misère causées, entre autres, par l’augmentation des prix des hydrocarbures en 2011 et de ceux du gaz en 2013 » ; et il faut ajouter « les augmentations annoncées des prix du riz, du lait, de l’huile alimentaire et du ciment qui viendront encore aggraver la situation », opine le « Général ». L’économie burkinabè, depuis 2002, année de suppression de la deuxième Chambre, ne s’est pas consolidée et la lutte contre la pauvreté est encore de mise, a précisé le président de la Coalition contre la vie chère.

« Pas de commentaires, on veut des actes »

Tolé Sagnon a appelé les populations « à maintenir le cap de la mobilisation et de la lutte organisée ». « Dans les semaines et mois à venir et pourquoi pas sans délais, si la situation l’exige, la CCVC va vous rappeler pour organiser des luttes », a-t-il ajouté. En direction du pouvoir de la IVe République, la coalition a confié que « la plate-forme d’actions ne restera pas sans suite ». La mobilisation constatée est déjà le signe, selon la coalition, que la lutte est juste. Pour Sams’K le Jah, l’un des leaders du mouvement « Le Balai citoyen », il n’y a plus de commentaires, il faut passer aux actes. Le président de la coalition a terminé son speech en demandant à la foule si elle est prête à renforcer la mobilisation et celle-ci, dans les acclamations, les coups de sifflets et les hourras, a répondu « Oui ».


Aimé NABALOUM et Cathérine PILABRE


Les à-côtés du meeting

Le « Lion » et son chapeau de « y en a marre ! »

Boukary Kaboré dit le « Lion » a fait son entrée à la place de la Nation aux environs de 9h 50mn. Cette entrée n’a pas été facile. Elle a été marquée par une bousculade au niveau du cordon sécuritaire car, n’ayant pas été annoncée par le protocole. Dans cette bousculade, le chapeau du « Lion » est tombé. Il a fallu l’intervention des organisateurs pour frayer un chemin au « Lion ». « On n’a pas voulu me refuser l’entrée, c’est le bruit et les cris avec la présence de ce monde qui ont créé cette incompréhension », dira-t-il une fois installé. « Je suis un citoyen comme les autres. Si j’avais eu une carte d’invitation avec l’heure, je serais venu à l’heure car, je suis militaire. Si je n’ai pas de carte d’invitation, le peuple est là et moi je fais partie du peuple. A propos de mon chapeau qui est tombé, ce n’est rien pour ma personnalité. Ce n’est pas un chapeau de chef mais un chapeau de « y en a marre ! » Dans la bousculade, si ça tombe, on prend, on porte et on continue, c’est le combat ! », a-t-il ajouté.

Ce que le Sénat signifie

Au cours de cette manifestation, chacun y allait de sa définition, de son interprétation, de ses comparaisons et de ses inspirations avec le mot Sénat. Lors du meeting de la CCVC, on pouvait lire sur une pancarte d’un citoyen, « SENAT = Société des Espèces Nuisibles pour Accroître les Tensionnaires ».

« Laissez les articles et révisez les salaires »

C’est du moins, ce que proposent certains manifestants à travers ce message sur une pancarte : « Laissez les articles et révisez les salaires ». Certaines inscriptions étaient plutôt des messages à l’intention du régime en place avec le président du Faso en ligne de mire. « Compaoré, game over » ; « Blaise, écoute, le peuple est souverain » « Quand le peuple s’Egypte, Blaise se MORSIfie » ; « Blaise, pitié, descends, la vie est piiiiiiiiiiire ! » « Président, le peuple a faim, ne touche pas à l’article 37 » ; « non à la blaisocratie ! Non au pouvoir à vie » ! « Que devient Guiro et ses cantines ? », « non aux braqueurs de la République », « Quelle émergence pour un peuple affamé ? Non à la vie chère, à la corruption et à l’impunité », etc. Les inspirations étaient de taille et des plus ingénieuses.

Les balais et les ustensiles de cuisine étaient au rendez-vous

« Décidément, le marché de balai devra connaître une hausse », a laissé entendre une voisine au meeting. En effet, comme les artistes Smockey et Sams’K Le Jah, certains jeunes tenaient des balais, d’autres avaient des assiettes et des cuillères. Et pour couronner le tout, les marmites, les casseroles et les louches étaient de la partie. Un peu comme dans une cuisine. En tous les cas, les commerçants de balais s’en frotteront les mains car, des balais, il y en avait à ce meeting.

« Le Général » Tolé pour un face-to-face

La lutte ne se fera pas sur les réseaux sociaux. A l’appel de Tolé Sagnon pour que la mobilisation se poursuive, la foule a fait comprendre qu’elle était déjà nombreuse. Le « Général » Tolé Sagnon ne l’entend pas de cette oreille. Pour lui, « la lutte ne se fera pas sur les réseaux sociaux. Elle se fait vis-à-vis. Ce sera face-to- face ».

Des éco-citoyens aussi

A la fin du meeting, des jeunes ont immédiatement procédé au nettoyage de la place de la Nation. Des sachets et autres ordures jetés çà et là ont été ramassés et mis dans des cartons de fortune. Ils portaient comme inscription « poubelle ». Qui dit meeting et autres manifs doit aussi inclure la notion de propreté autour de soi. En somme, il faut rester éco-citoyen.

Ils ont dit :

Chrysogone Zougmoré, vice-président du CCVC

« Un test et un rappel des troupes pour nous organiser davantage »

« Notre présence a été motivée par le fait que depuis un certain nombre d’années, nous vivons des conditions extrêmement difficiles. En l’espace de 2 ou 3 ans, les prix des produits de première nécessité ont augmenté de façon exponentielle et anarchique. Si fait qu’aujourd’hui, la plus part des Burkinabè tirent le diable par la queue comme on le dit. Deuxièmement, nous avons constaté, ces dernières années, qu’il y avait des tentatives de remise en cause de certains principes liés à l’exercice des libertés publiques et notamment des libertés syndicales. Vous avez suivi avec nous le mouvement de grève et de protestation qui a été organisé par l’opposition qui s’est terminé heureusement par une victoire de mouvement. C’est donc l’ensemble de ces questions qui nous a amenés à lancer cet appel à la mobilisation pour protester contre la vie chère, les agressions de libertés de presse et publiques. Cela a été surtout, pour nous, un test et un rappel des troupes pour nous organiser davantage et faire en sorte que notre lutte puisse aboutir. Aucune lutte n’a de chances d’aboutir si elle n’est pas organisée. Nous avons donc profité pour lancer un appel à l’ensemble des populations des villes et campagnes afin qu’elles s’organisent dans les structures délocalisées de la CCVC pour les étapes à venir. Cette mobilisation peut avoir des impacts sur la vie sociale et politique au Burkina Faso. Si on prend le cas de la mobilisation contre la Taxe de développement communale (TDC) qui a payé, nous avons bon espoir que ce type de manifestation pourra permettre au gouvernement de réfléchir par deux fois avant de prendre certaines décisions ou de s’abstenir de prendre certaines décisions tel le contrôle des prix ou de la qualité des produits que nous consommons. Il faut savoir qu’il y a beaucoup de maladies qui se développent et qui sont certainement dues à la qualité de ces produits. C’est un appel au pouvoir public afin qu’il se penche sur les conditions réelles de vie de ses populations. Lorsqu’on vient au pouvoir, c’est pour agir en faveur du bonheur des populations de ce pays-là. C’est aussi un appel que nous lançons afin que les populations burkinabè puissent vivre dignement parce que c’est cela aussi savoir gérer un pouvoir. »

Sams’K Le Jah, artiste- musicien, co-leader du Balai citoyen

« On rêve d’un Burkina normal »

« Nous sommes des artistes et nous n’aspirons pas au pouvoir. Nous voulons un respect de la démocratie car, s’il n’y a pas de paix, il n’y a pas de musique. La démocratie est comme un jeu de football où il y a un arbitre. Cet arbitre, c’est la Constitution. Nous demandons aux politiciens de ne pas y toucher car, si le pays est en feu, ce sera de leur faute. Nous interpellons tous les politiciens, opposition et parti au pouvoir, à faire en sorte d’éviter le pire pour notre pays et préserver la paix. Aux Occidentaux qui sont souvent le soutien des dictateurs en Afrique, même si Blaise Compaoré fait leur affaire en matière de géostratégie et de géopolitique, qu’ils comprennent que la jeunesse au Burkina Faso aspire à une vraie démocratie. Ça suffit et il faut qu’ils arrêtent de soutenir les dictateurs en Afrique. Une démocratie, c’est le respect de la Constitution. C’est la raison pour laquelle on se lève contre la modification de l’article 37, contre le Sénat et contre la mal gouvernance. On rêve d’un Burkina normal. »

Boukary Kaboré dit « Le Lion »

« Ceux qui nous gèrent sont des têtus »

« Ma présence se justifie par la volonté populaire soutenue par les syndicats et la société civile. A l’invitation des syndicats et de la société civile, c’est un devoir pour moi de venir parce que c’est le peuple qui manifeste. Ce n’est pas une question de partis politiques mais c’est le peuple tout entier qui est là aujourd’hui. Je suis là en tant que citoyen et élément du peuple burkinabè. Nous avons l’impression que le peuple montre qu’il commence à prendre conscience et je suis très content. Ma présence est pour marquer mon accord avec ce que tout le monde pense. Une telle mobilisation peut avoir un effet sur la vie politique du Burkina Faso, sauf que ceux qui nous gèrent sont des têtus. Au vu et au su de tout cela, ils doivent faire très attention parce que, quand le peuple se met debout, l’impérialisme tremble. L’impérialisme, c’est ce pouvoir chancelant qui doit savoir que son départ est presqu’arrivé. S’il force le peuple, il s’en rendra compte très bientôt ».





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