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Tribune - Le Partenariat Public- privé : défis et appréhensions
Publié le jeudi 7 septembre 2017  |  Sidwaya
L`usine
© Autre presse par DR
L`usine SOFAB




Dans la tribune ci dessous Jean Christophe Ilboudo, Chercheur Associé LAREQUOI, apporte aux lecteurs quelques informations théoriques sur le Partenariat Public- privé (PPP). A travers cet écrit l’auteur espère « avoir rendu compte du phénomène des ppp en résumant quelques principes de fonctionnement en attendant de partager prochainement le bilan que l’on pourrait faire de la contractualisation des ppp, aussi objectif que possible et débarrasser de tout biais méthodologique ». Bonne lecture !

Les autorités burkinabè ont dans le cadre du financement et/ou de la réalisation d’infrastructures, de bien ou de services au profit des populations opté pour l’implémentation d’un outil, alternatif de la commande publique, le Partenariat Public- privé (PPP). Nous voulons par cette publication apporter notre contribution à l’éclairage de l’opinion publique sur les contours de cet outil, avec la ferme volonté de susciter des échanges et la contribution de tous à la mise en œuvre réussie de cet outil stratégique, dans l’intérêt supérieur des Burkinabè. Nous aborderons dans cette première partie de notre publication les éléments théoriques relatifs aux aspects étymologiques, de typologie et de montage des PPP. La seconde publication portera sur l’évaluation des résultats des ppp et des suggestions d’amélioration de leurs performances.

Contexte et problématique des PPP
Les années 80 ont été marquées, par des taux de croissance économique généralement inférieurs aux taux de croissance démographique, par une dégradation du pouvoir d’achat des populations ou par un fort déficit des Entreprises publiques, consécutif à leur mauvaise gestion. Ces déficits allaient s'accentuer et de ce fait, un grand nombre d'entreprises publiques au Burkina Faso, allait perdre toute perspective de disposer d’autonomie financière à court et moyen- terme. C'est dans cette situation difficile qu'apparaîtra au Burkina Faso, un important changement dans les politiques économiques du pays. Les graves déficits des finances publiques, du commerce extérieur burkinabè, allaient conduire à la révision de la philosophie du développement économique de notre pays.
Cette nouvelle politique économique dessine les contours d'un désengagement progressif de l'Etat, privé de son rôle traditionnel de promoteur du développement et de pourvoyeur d'emploi. Elle propose une gestion moderne de la production, jusqu'alors peu performante, ouvrant ainsi la voie au développement des partenariats public-privé au Burkina. Les ppp, qui peuvent être créés sous diverses formes de cession ou de mode de délégation de service public (Société d’Economie Mixte, affermage, concession de service public, Régie …), contribueront à apporter des réponses pertinentes aux préoccupations des populations en termes de financement et/ou de réalisation d’infrastructures, de biens ou de services.
Ce faisant, il revient à la puissance publique au Burkina Faso de s’inventer un nouveau rôle de régulateur et d'incitateur mais aussi d'organiser le développement des entreprises et des partenariats en soutenant l'initiative privée. Elle devra en conséquence s’engager à réduire, non seulement le fardeau financier et les lourdeurs administratives, qu’impose la gestion par l’Etat des entreprises publiques, mais aussi de stimuler le développement du secteur privé à travers les partenariats public-privé. L’Etat devra donc être garante de l’efficience de ses actions, de contribuer à la création de richesses avec pour objectif fondamental l’amélioration du niveau de vie des populations.

Objet et méthode d’analyse
Dans le cadre de l’analyse que nous avions effectuée sur le PPP, l’élaboration des connaissances et donc le cadre épistémologique s’est inscrit dans le paradigme épistémologique interprétativiste. Pour ce faire, nous avons adopté une approche d’analyse axée sur la méthode des cas et qui a concerné des entreprises objet de ppp.
Ainsi, par la méthode d’abduction, des hypothèses plausibles (cadres de référence) ont été émises et nous avons procédé à leur validation par l’application de variables. Ces dernières ont elles aussi été vérifiées au moyen d’indicateurs et ce, conformément au principe de la méthode d’observation. Les données terrains ont été collectées à partir de l’administration soit, d’un guide d’entretien ou de questionnaires. Les entretiens ont été soit de type directif ou semi-directif et réalisés auprès d’un public cible constitué, de clients, de salariés des entreprises, de techniciens ou de professionnels des secteurs concernés, de chercheurs spécialistes du domaine, d’acteurs partenaires du fait de leurs connaissances du sujet traité ou de leur expérience dans le secteur des ppp.
Pour cette analyse, nous avons émis un cadre de référence ou hypothèse principale et deux cadres de référence secondaires.
- Du cadre de référence principal
La raréfaction des ressources financières, consécutive aux multiples et répétitives crises a eu des conséquences économiques et sociales très néfastes pour les Etats africains, fragilisés par la précarité ambiante et la paupérisation de leurs populations. Dans une telle situation, le ppp apparait comme une alternative pertinente, pour la réalisation, le financement et la gestion d’infrastructures, de biens ou de services au profit des populations.
Pour ce faire, les différentes parties prenantes au contrat de ppp, devront travailler non seulement à la création de richesses par l’entreprise, mais aussi elles devront veiller à une meilleure répartition des richesses créées au profit de l’ensemble des parties prenantes.
Par la mise en œuvre de cet outil (ppp) on assisterait également à une meilleure répartition des risques et des incertitudes de coûts (théorie de la réduction des incertitudes et des coûts des transactions). Ce faisant, chaque cocontractant devrait agir sur les activités pour lesquelles il a une meilleure maîtrise.
- Les cadres de références secondaires
v Premier cadre de référence secondaire : l’application de la théorie des parties prenantes (TPP) ou théorie partenariale de la gouvernance d’entreprise peut contribuer à l’amélioration des performances (économique et financière) des ppp. Cette théorie a pour principe fondamental, une meilleure répartition des ressources créées par l’entreprise au profit de l’ensemble des parties prenantes.
v Deuxième cadre de référence secondaire : la mutation de l’action publique est indispensable à l’essor et au développement des ppp.
Les politiques publiques doivent prôner désormais le recentrage du rôle de l’Etat, cantonné désormais à des missions de régulation, d’évaluation et de contrôle des activités socio-économiques.
A travers l’analyse de ces cadres de référence ou hypothèses fondatrices, nous avons étudié l’évolution des soldes caractéristiques de gestion des entreprises après contractualisation des ppp (en Côte d’Ivoire) et nous avons constaté une croissance significative de ces indicateurs, parfois allant à plus de 300%. En outre, nous avons pu observer également que les besoins d’investissements ont été satisfaits au regard des investissements réalisés au cours de ces périodes post partenariat.
Fort de ce rôle joué par les ppp, il est important qu’on puisse garantir leur pérennité. La gouvernance d’entreprise pourrait y apporter une réponse.

DES CONCEPTS

Du Partenariat Public-Privé (PPP)
- La définition du PPP
Considéré comme une alternative à la commande publique, le ppp est conclu avec pour objectif fondamental d’offrir, de gérer ou d’exploiter une infrastructure, un bien ou un service public de qualité aux populations.
Le PPP « recouvre l’ensemble des modalités de coopération entre les autorités publiques et le monde des entreprises qui visent à assurer le financement, la construction, la rénovation, la gestion ou l’entretien d’une infrastructure ou la fourniture d’un service » (Frédéric Marty, Sylvie Trosa, Arnaud Voisin, 2006). Mais il faut noter que les définitions varient d’un pays à l’autre ainsi que les principes et les modalités de mise en œuvre.
Au Burkina Faso, le gouvernement est confronté aux besoins croissants d’investissement dans les domaines des infrastructures, en matière de structures sanitaires et scolaires, dans les aménagements agricoles, dans les secteurs de l’énergie, de l’eau et de l’assainissement, etc.
Conformément aux dispositions de l’article 4 de la loi n° 020-2013/AN du 23 mai 2013, portant régime juridique du partenariat public –privé, le contrat de ppp régit la collaboration entre une entité publique et une ou plusieurs personnes privées. C’est un contrat par lequel « une autorité publique confie à un partenaire privé, pour une période donnée, en fonction de la durée des amortissements ou des modalités de financement retenues, la responsabilité de tout ou partie des phases suivantes d’un projet : 1°) la conception des ouvrages ou équipements nécessaires au service public, 2°) le financement, 3°) la construction, 4°) la transformation des ouvrages ou des équipements, 5°) l’entretien ou la maintenance, 6°) l’exploitation ou la gestion… ».
Aussi, le ppp se différencie de la privatisation pour deux raisons fondamentales :
v Premièrement, c’est un instrument utilisé relativement à des activités relevant du domaine régalien de l’Etat et concerne généralement des secteurs dits stratégiques.
v Deuxièmement, par le ppp, la puissance publique détient les leviers de commande sur la définition, le contrôle des prestations délivrées au public. En outre, elle reste surtout propriétaire du domaine public objet du ppp.
- Les approches théoriques du ppp
Deux approches théoriques principales sous-tendent généralement la création des PPP. Il S’agit de :
v la théorie des contrats incomplets : au regard de la complexité des secteurs objets des ppp, on suppose que le contrat de ppp ne peut prévoir tous les futurs cas de figures et partant, il peut être révisé de commun accord entre les parties contractantes. Cette opportunité offerte aux acteurs permet d’actualiser les contrats de PPP et de les adapter au contexte, contraintes et réalités du moment pour plus d’efficience.
v la théorie de la réduction des incertitudes ou risque de coûts: prenant en compte, au-delà de la complexité des secteurs objets des ppp, mais aussi des volumes importants de ressources financières nécessaires à leur mise en œuvre, cet instrument permet à l’Etat ou ses démembrements de minimiser les incertitudes et les variations de coûts des opérations à réaliser. La contractualisation de tout ppp devrait, en tout état de cause, tenir compte du respect à la fois des principes fondamentaux non seulement de la théorie des contrats incomplets, mais aussi de la réduction des incertitudes de coûts.
- Les intérêts et le but des ppp
Les PPP permettent une mobilisation optimale de l’expertise internationale et nationale privées, nécessaires à la réalisation des projets de ppp, qui sont par essence complexes et qui par conséquent ont besoins de compétences et de qualifications spécifiques pour leur mise en œuvre.
Ainsi ils contribuent :
v à l’accroissement et à la consolidation de l’investissement public, permettant ainsi de satisfaire les attentes toujours croissantes des populations en services, biens et équipements publics. La puissance publique ne disposant pas des ressources et des compétences suffisantes pour faire face à l’ampleur des besoins en matière d’investissements. Ces investissements privés tomberont à échéance des conventions, dans le domaine public de l’Etat ;
v à la réduction des coûts et des délais de réalisation d’équipements publics.
v au développement d’une relation de partenariat plus forte entre la sphère publique et la sphère privée ;
v à la possibilité de recourir à des financements privés pour la réalisation de projets d’infrastructures et d’équipements collectifs concourant à la réalisation d’une mission de service public ;
v à une meilleure identification des risques à allouer dans le contrat à la partie à même de mieux les gérer ;
v à l’atteinte des objectifs de performances (qualitatifs et quantitatifs) par le partenaire privé ;
v à offrir une vraie garantie d’entretien et de surveillance du patrimoine en raison des astreintes pesant sur les entreprises, d’offrir le service et qui est sanctionné en cas de défaillance ou d’insuffisance. (F.BERGERE, X BEZANCON, 2010).

- La typologie des PPP
Les modes de ppp sont multiples, diversifiés et sont en perpétuelle évolution. Par conséquent, il serait difficile d’établir une classification exhaustive de cet instrument.
Toutefois, il faut noter que le mode de ppp que l’on pourrait retenir varierait en fonction de la mission assignée par la puissance publique au secteur privé. Ainsi, « souhaite-t-elle se désengager totalement, partiellement, conserver le contrôle, faire appel ponctuellement aux services et aux produits des entreprises, ou bien les encourager ou soutenir leurs activités ? ».(Paul LIGNIERES, 2005)
Ce faisant, nous pouvons retenir les PPP contractuels dérivés des modes de délégation de service public dont entre autres : la concession, l’affermage, la régie, The Build Operate Transfert (BOT), l’Autorisation d’Occupation Temporaire (AOT), le Bail Emphytéotique Administratif (BEA).
Les ppp concernent aujourd’hui tous les secteurs d’activités de la vie économique d’une nation. Si au départ les partenariats dans nos pays ne concernaient le plus souvent que les secteurs marchands, aujourd’hui ils s’appliquent aussi bien aux secteurs à contrainte de service public ou non- marchands. Ainsi constatons nous aujourd’hui des ppp dans les secteurs comme l’éducation (ppp pour la construction de lycées et collèges), la santé (ppp pour la construction d’hôpitaux ou de centres de santé), la défense nationale (ppp pour la construction de camps militaires, de bâtiments administratifs), le secteur pénitencier (ppp pour la construction de prisons).
- Le Montage des PPP
Le montage du PPP consiste à mettre à la disposition du secteur privé, un domaine, un service ou un bien appartenant à la puissance publique.
La réalisation des PPP est soumise à une procédure afin de garantir une transparence dans les processus. Et compte tenu de son caractère complexe et de la sensibilité des secteurs concernés, des précautions préliminaires sont exigées. Il s’agit :
v de l’évaluation préliminaire ou préalable au déclenchement du processus de recrutement du ou des partenaires. Elle a pour objectif de s’assurer que le ppp reste la solution idoine à entreprendre. Ensuite, elle permet de retenir le mode de ppp approprié, permettant d’assurer le succès du partenariat ;
v de l’appel à concurrence : elle garantit la transparence du processus et permet de disposer d’un éventail d’investisseurs. Ce processus se décompose en trois phases :
· une phase de publicité préalable. Elle permet de diffuser l’information à l’ensemble des potentiels investisseurs ;
· la sélection de l’attributaire du marché : En droit français cette attribution se fait au « mieux disant » et non plus au moins disant. Les offres reçues sont évaluées en référence à des critères de sélection des offres ;
· la signature du contrat. Suite à la notification de l’attribution du marché, le contrat est signé entre les parties contractantes et constitue le point de départ des différentes obligations des parties.
v la procédure négociée : Elle permet à la puissance publique de négocier directement les conditions du marché. A cet effet, la personne publique sélectionne une liste d’investisseurs potentiels, à l’issue d’un appel à soumissionner, en vue de la négociation.

La Gouvernance d’entreprise
Les développements relatifs à l’impératif de bonne gouvernance s’impose face à l’inefficacité des aides apportées aux pays en développement, mais aussi face aux lourdeurs administratives et au déficit des finances publiques. Et comme le souligne Jean- Pierre Gaudin, on peut distinguer au moins deux principes déterminant de la « good governance » à savoir :
v Une lisibilité et une transparence accrue de l’action publique, une action qui se doit d’être plus accessible pour tous les citoyens ;
v Une redevabilité des acteurs publics et donc une obligation de rendre compte de l’accomplissement de leurs missions. Cela passe nécessairement par des évaluations technique et financière de leurs activités.

Conclusion
Au terme de cette première partie, nous espérons avoir pu apporter aux lecteurs quelques informations théoriques sur le ppp. Elle comporte certes des insuffisances découlant du fait qu’aucune œuvre humaine n’est parfaite, mais nous avions voulu apporter notre modeste contribution à l’éclairage de l’opinion publique sur ce concept.
A travers nos propos nous espérons avoir rendu compte du phénomène des ppp en résumant quelques principes de fonctionnement en attendant de partager prochainement le bilan que l’on pourrait faire de la contractualisation des ppp, aussi objectif que possible et débarrasser de tout biais méthodologique.
Certes la nature des secteurs concernés par les ppp et donc l’éventail de leurs domaines d’application ne vont pas sans susciter des inquiétudes. Certains échecs de PPP enregistrés tant dans nos pays que dans les pays développés, ont contribué à forger l’image d’arrangements opaques, excessivement favorables aux intérêts privés. Mais symétriquement les succès constatés de la contractualisation des ppp sont très importants et ont même suscité des enthousiasmes inconditionnels pour l’usage de cet outil.
L’enjeu sera donc de prévenir les dérapages et de nous lancer pour la réalisation de ces investissements indispensables au progrès de notre pays et que nos finances publiques ne peuvent prendre en charge, nous permettant aussi d’éviter le dévoiement progressif du service public.
Pour corroborer cet enthousiasme, notons pour terminer, même si comparaison n’est pas raison, d’après les statistiques de certains partenaires techniques et financiers, 2 500 projets d’infrastructures en PPP ont été lancés dans les pays en développement entre 1990 et 2001, pour un montant de 750 milliards de dollars. Jugeons-en, les investissements ou les réalisations dont aurait pu bénéficier notre pays durant cette période.

Dr Jean Christophe ILBOUDO
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Sidwaya N° 7229 du 8/8/2012

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