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Planification familiale : Quand « l’équipe mobile » entre en action
Publié le mardi 24 janvier 2017  |  Sidwaya




Des prestataires de santé à bord d’une « clinique mobile » sillonnent les localités reculées des centres villes. Objectif, offrir des soins de santé de la reproduction et de la planification familiale aux populations défavorisées. L’initiative est de l’Association burkinabè pour le bien-être familial (ABBEF).


Il est 9h30, ce vendredi du mois de décembre 2016, à Pitieko, dans la commune rurale de Koubri, à un jet de pierre de Ouagadougou. En cette matinée, des femmes voilées ou non, seules ou avec leurs bébés, se dirigent vers le Centre de santé et de promotion sociale (CSPS). Arrivées, elles sont accueillies par Noufou Kaboré, animateur social de l’Association burkinabè pour le bien-être familial (ABBEF). Il les installe dans la salle d’attente d’un bâtiment aménagé pour la circonstance. Au fur et à mesure que le temps passe, les femmes, dont certaines sont venues d’autres villages environnants de Pitieko, envahissent la pièce. Si bien que la salle se remplit, obligeant les nouvelles venues à se trouver des places assises sur la terrasse à l’extérieur.
Chacune de ces femmes a rendez-vous avec une équipe de sages-femmes de l’ABBEF, venue spécialement de Ouagadougou pour proposer des services de planification familiale. Les sages-femmes ont fait le déplacement depuis la capitale, à bord d’un véhicule 4*4 équipée de matériel, de produits contraceptifs et de consommables. D’où l’appellation « clinique mobile ».
Parmi la quarantaine de femmes de Pitieko et environnants présentes, figure Minata Sawadogo, 21 ans.
Mme Sawadogo est tombée enceinte à la suite d’une mauvaise utilisation de la pilule. Elle impute cette « mésaventure » à un manque de communication et de consultation permanente des agents de santé. Mme Sawadogo dit avoir « beaucoup souffert » pendant cette grossesse, survenue quelques mois seulement après la première. En avril 2016, Minata a assisté à une projection de films suivie de débats sur la planification familiale, animée par les agents de l’ABBEF. Elle soutient avoir pris contact avec ces derniers afin d’être informée et de participer à toutes les activités de sensibilisation de l’association dans son village natal. A la lumière du message des animateurs sociaux et de son entretien avec l’équipe de la « clinique mobile » de l’ABBEF, Minata Sawadogo opte finalement pour les injectables.
Quant à Fatoumata Ilboudo, 27 ans, elle fait confiance à la pilule. Cette « novice » dans l’usage des contraceptifs est à sa 4e grossesse. Elle indique avoir été informée de la tenue d’une rencontre au sujet de la PF, il y a seulement deux mois, par le crieur public de l’ABBEF à Pitieko.


La PF, « un bon plan de santé »


A l’en croire, elle a partagé la « bonne nouvelle » avec M. Ilboudo, son mari, qui lui aurait donné son accord. « On a choisi la pilule, parce que c’est ce qui me convient le mieux. Je tombe très souvent malade et je suis habituée à prendre les comprimés. Donc, la pilule me va bien », explique-t-elle. Mariam Ouédraogo, 24 ans, porte son troisième enfant au dos. Elle n’a suivi qu’une seule séance de causerie-débat de l’ABBEF. Mais, elle dit être convaincue que l’épanouissement de sa famille « passe » par la planification familiale, notamment à travers l’adoption d’une méthode contraceptive appropriée à sa personne.
Après le counseling des sages-femmes, elle opte pour les implants. Toutes les dames interrogées semblent résolument engagées en faveur de la contraception. Le message de Noufou Kaboré, animateur social, aura donc été bien reçu. L’enseignant de profession s’emploie à animer des rencontres et à organiser des projections de film suivies de débats, des théâtres-fora au profit des adultes, dans les quartiers de Pitieko. « A domicile, discutons en groupe avec les pères et mères de famille. Ensemble, nous débattons d’un thème donné sur la PF et trouvons des solutions », détaille M. Kaboré. Et d’expliquer : « Nous leur démontrons que l’espacement des naissances constitue un bon plan de santé pour l’enfant, la femme et le mari». Pour lui, les populations commencent peu à peu à comprendre la nécessité d’espacer et même de maîtriser les naissances. Pour ce faire, M Kaboré leur recommande « fortement l’utilisation d’une méthode contraceptive moderne ». En outre, il invite les hommes à prendre part aux activités de sensibilisation. Des dames interrogées, nombreuses sont celles qui attestent avoir eu l’aval de leur époux. « Mon mari a donné son accord. Même s’il n’acceptait pas, j’allais néanmoins me cacher pour le faire », témoigne Aïssata Barry, venue à la rencontre des sages-femmes. Pour mener à bien sa mission, l’animateur social associe également les Agents de santé à base communautaire (ASBC) qui bénéficient d’un encadrement en matière de santé sexuelle et reproductive. Ces derniers, selon lui, l’assistent dans la distribution des produits de PF, notamment les pilules en réapprovisionnement, les condoms masculins et féminins.


Des avantages de la « clinique mobile »


A eux, s’ajoutent les pairs-éducateurs, chargés de sillonner les « coins et recoins » des villages pour diffuser la même « bonne nouvelle ». « Avant l’arrivée de l’équipe des services mobiles de la PF, nous préparons le terrain, en informant la population », ajoute M. Kaboré.
Une fois sur place, l’équipe de l’ABBEF reçoit les clientes, à tour de rôle. Elle leur présente les avantages et les effets indésirables des différentes méthodes contraceptives. C’est à la cliente de choisir librement la méthode qui lui convient le mieux. « En matière de PF, nous n’imposons pas un contraceptif à une femme. C’est à elle de faire son choix sur la base d’un counseling éclairé», assure Amida Sama, sage-femme à l’ABBEF. Aujourd’hui, Mme Sama et ses collègues disposent d’une gamme variée de méthodes contraceptives : des pilules (combinées ou à progestatif seul), aux injectables (depo provera, sayana press…) en passant par des implants (jadelle, implanon…), le dispositif intra utérin et des préservatifs féminins et masculins. « Pour une méthode qui nécessite une intervention, nous avons tout le matériel nécessaire dans la voiture pour la leur offrir, pourvu que toutes les conditions surtout environnementales soient réunies », soutient la sage-femme. La « clinique mobile » offre les mêmes types de services de PF qu’une clinique fixe. A entendre Mme Sama, elle permet de rapprocher les services de PF des populations vivant dans les zones reculées d’autant qu’ils leur sont offerts gratuitement.. « Les femmes sont souvent dans le besoin mais n’ont pas la possibilité de se déplacer et d’aller vers les centres de santé pour bénéficier des méthodes de contraception », affirme-t-elle. Ces sorties de terrain de l’ABBEF permettent d’améliorer les indicateurs en matière de PF dans les localités visitées. « Lors de nos entretiens avec les femmes, nous parlons des contraceptifs sans tabous. Ce qui leur permet de comprendre mieux et de lever certains préjugés », indique la sage-femme.


Près de 105 500 bénéficiaires


En 2016, l’ABBEF a bénéficié d’une subvention du projet « Agir pour la Planification Familiale (AgirPF) », financé par le Bureau régional l’USAID/Afrique de l’Ouest. Ce projet est exécuté dans cinq pays francophones d’Afrique de l’Ouest dont le Burkina Faso et couvre la période de juillet 2013 à juillet 2018. Il a pour objectif de susciter la demande de services de PF en améliorant les connaissances des populations cibles et d’accroître leur accès aux services de SR/PF de qualité. Les fonds reçus par l’ABBEF en 2016 ont permis de mener plusieurs activités de sensibilisation, de plaidoyer et d’offres de méthodes contraceptives dans les villes et zones péri-urbaines de Ouagadougou, de Bobo-Dioulasso et de Koudougou.
Grâce à l’appui reçu de Agir PF, 105 465 clients ont bénéficié des méthodes de PF grâce aux différents canaux d’offre de services (clinique fixe, stratégie avancée/mobile, journées spéciales PF). Par ailleurs, près de 75 500 personnes ont été sensibilisées dont 56 660 femmes et 18 812 hommes à travers 1530 séances d’activités. « Tout cela a permis à la population d’avoir des notions sur les différentes thématiques en lien avec la PF et au personnel de prendre les dispositions pour satisfaire les besoins ainsi créées », soutient la chargée de suivi du projet à l’ABBEF, Mme Somé Roselyne.
L’une des stratégies appuyées dans le cadre de cette subvention à savoir l’appui aux équipes mobiles qui permet de rapprocher les services de bénéficiaires a permis de recruter 6 504 nouvelles utilisatrices de PF au cours de l’année 2016. Et le directeur exécutif de l’ABBEF, Boureihima Ouédraogo, ne cache pas sa satisfaction. Tout en appréciant l’appui de Agir-PF, il souhaite que cette collaboration puisse se poursuivre. « Nous sommes en pourparlers avec le projet Agir-PF pour voir dans quelle mesure nous pouvons être soutenus avec des moyens logistiques notamment des véhicules équipés pour nous permettre d’aller encore plus loin. Ces négociations sont en bonne voie. (…) Mon vœux est de voir notre partenariat se renforcer au profit de nos populations, surtout la frange jeune», s’est exprimé M. Ouédraogo.
Dans tous les cas, les bénéficiaires saluent les prestations de l’Association burkinabé pour le bien-être familial en matière de planification familiale. Fatoumata Ilboudo l’exhorte à multiplier les actions de sensibilisation, en vue de permettre aux femmes de mieux cerner l’importance des méthodes contraceptives. Car, pour elle, c’est par ignorance que certaines « refusent » la planification familiale. « Il faut aussi impliquer les hommes. C’est eux le problème », suggère Mme Ilboudo. Selon elle, ils doivent comprendre la nécessité, non seulement pour les femmes, mais aussi pour eux-mêmes d’espacer les naissances. Minata Sawadogo, quant à elle, invite l’ABBEF à étendre ses activités au profit des femmes de tous les milieux ruraux du pays.


Djakaridia SIRIBIE
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