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A l’audience : Quand deux tourtereaux se traînent à la barre
Publié le jeudi 1 decembre 2016  |  L`Observateur Paalga
Affaire
© aOuaga.com par A.O
Affaire OBOUF : le procès renvoyé au 27 mars
Mardi 24 mars 2015. Ouagadougou. Palais de justice. La première audience du procès de l`affaire OBOUF a été renvoyée au 27 mars prochain à la demande des avocats de l`opérateur économique




Convaincu d’abus de confiance et de détournement de vélomoteur, Roland s’est vu infliger une peine de prison de 12 mois avec sursis par le tribunal correctionnel de Ouagadougou. L’engin en question appartenait à sa compagne Ramata.

La rose est le symbole de l’amour, mais on oublie trop souvent qu’elle porte également des épines et que si l’on s’y frotte, on s’y pique. Et la douleur est d’autant plus atroce qu’elle est infligée par l’être aimé. Roland a amèrement expérimenté cela avec sa dulcinée Ramata.

Pourtant, vu de l’extérieur, tout indiquait qu’ils filaient le parfait amour. On avait coutume de les voir bras dessus, bras dessous lorsqu’ils faisaient les cent pas dans le quartier sur les ruelles poussiéreuses de Ouagadougou. Dans le voisinage, on ne les avait jamais entendus se disputer. Bref, ces tourtereaux-là avaient tout pour former un couple parfait, ou presque…

Pour que ce bel amour ne reste pas au stade des amourettes, Roland et Rama avaient décidé d’officialiser leur relation. Tout cela s’est conclu par l’organisation d’un PPS (Pug Pou Soum) comme on dit en milieu moaga (1) et les amoureux ont commencé à vivre sous le même toit. Cela a eu le don de renforcer leur affection et ses démonstrations.

La dulcinée de Roland épargnait depuis quelques mois pour s’acheter une moto. Lorsqu’elle a pu réunir l’argent nécessaire, elle a informé son chéri qui a salué son initiative. La date d’achat de la moto a été arrêtée de commun accord. Au jour indiqué, l’homme était passé chercher sa moitié à son lieu de travail. Ensemble, ils ont choisi la moto et la couleur qui convenaient à Ramata. Montant de la transaction : 385 000 FCFA.

L’erreur fatale

La jeune dame a alors sorti de son sac à main les liasses nécessaires qu’elle compta avant de les remettre à Roland qui recompta les billets de banque. Le compte était bon. Marché conclu.

A présent, il fallait faire la pièce d’achat. C’est à ce moment qu’elle s’est rendu compte qu’elle n’avait pas sur elle sa carte nationale d’identité burkinabè (CNIB) qu’elle avait oubliée à son lieu de travail. Mais ce ne serait pas pour cet impair qu’on allait reporter l’achat de la bécane. Ça tombait bien puisque monsieur avait sur lui la sienne. La jeune dame lui a alors demandé de donner sa pièce pour que la moto soit à son nom. De toute façon, Ramata était convaincue que cette moto, qu’elle soit à son nom ou à celui de Roland, serait la leur à cause de la passion qu’ils éprouvaient l’un pour l’autre et aussi parce qu’ils vivaient sous le même toit. N’étaient-ils pas devenus un ?

C’est ainsi que le couple est rentré ce soir-là avec une « nouvelle moto neuve » comme qui dirait, dont les pièces portent le nom de Roland. Une erreur fatale que la jeune dame va vite regretter.

En effet, quelques mois après, des bisbilles ont commencé à naître entre les deux amoureux au point que l’atmosphère familiale était devenue délétère.

C’est dans ce contexte que Ramata s’était vue imposer, par son compagnon, une restriction dans ses déplacements. Et pour limiter les mouvements de sa compagne, Roland avait pris le contrôle exclusif de la moto qu’il utilisait à sa guise.

Mais ce jour-là, la bonne dame n’avait pas le choix. Elle avait une obligation sociale : il y avait un baptême dans sa famille. Elle ne pouvait pas renoncer à y aller puisque cela la concernait directement.


«Je vais vendre ta moto»


Mais Roland n’entendait pas les choses de cette oreille. Il avait opposé une fin de non-recevoir à l’insistante demande d’autorisation de sortie de sa compagne. La veille de cette cérémonie, le couple avait eu une discussion qui n’avait pas abouti. L’homme avait conclu les échanges en ces termes : «Si tu pars au baptême, je vais vendre ta moto». La jeune dame avait ri, se disant qu’il devait plaisanter ou voulait la faire chanter. Mais elle n’aurait pas dû.

Le lendemain, elle était effectivement partie en famille pour satisfaire à cette obligation qui s’imposait à elle. Le soir, à son retour, pas de moto. A la question de savoir ce qu’il était advenu de son char, Roland a juste répondu qu’il avait mis à exécution sa menace de la vendre et qu’il n’avait eu aucun mal puisque l’engin était à son nom.

Ramata n’en croyait pas ses oreilles. C’est seulement trois jours après qu’elle a commencé à croire effectivement que sa monture avait été peut-être vendue. Le doute a cédé place à la certitude.

Quelqu’un n’a-t-il pas dit que «l’amour rend aveugle mais le quotidien, lui, rend la vue» ? Il ne croyait pas si bien dire. Ce geste a ouvert les yeux à Ramata qui a enfin compris que depuis un certain temps, elle vivait sous la férule de son compagnon qui, en fait, l’exploitait.

Si jusque-là elle avait pardonné, par amour, les frasques de son compagnon, la jeune dame, cette fois, avait opté de lui faire payer la vente de son moyen de déplacement. Et elle avait choisi la voie judiciaire en posant plainte à la gendarmerie pour «abus de confiance et détournement de vélomoteur».

La machine judiciaire s’est mise en branle. Roland a été interpellé et gardé-à-vue puis présenté au parquet qui l’a auditionné et déposé à la Maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou (MACO) depuis le mois d’août 2016.

Le 22 novembre dernier, l’indélicat compagnon a comparu à la barre du tribunal correctionnel de Ouagadougou. Le procès a été rapidement expédié puisque le prévenu a reconnu les faits à lui reprochés. Il a expliqué son geste par le fait qu’il était malade et avait besoin d’argent.


12 mois de prison avec sursis


Au prétoire, les ex-tourtereaux ne manquaient pas de se jeter des coups d’œil furtifs qui ont fini par convaincre l’assistance et le tribunal que ces deux-là s’aimaient encore. C’est sans doute pourquoi le parquet, bien que l’infraction d’abus de confiance soit constituée, a requis une peine de 12 mois avec sursis.

Le prévenu a pris l’engagement de rembourser la moto à raison de 50 000 FCFA par mois.

En vidant son délibéré sur le siège, le tribunal a condamné Roland a 12 mois de prison avec sursis et à payer la somme de 385 000 FCFA représentant la valeur de la moto à l’achat.

En guise de conclusion, le président du tribunal s’est adressé à Ramata : «Madame, avec ce verdict, il va sortir de prison, payer la moto et peut-être que vous pourrez poursuivre votre histoire… ».

Mais après avoir été traîné en justice et avoir croupi durant quatre mois à la MACO, Roland sera-t-il prêt à recoller les morceaux avec Ramata ? Rien n’est moins sûr ! Et quelle solidité pourra encore avoir une famille qui a lavé son linge sale en public ? Mais comme le cœur, dit-on, a ses raisons que la raison elle même ignore,…


San Evariste Barro
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L`Observateur Paalga N° 8221 du 27/9/2012

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