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Traque de présumés terroristes : retour à Kilwin
Publié le mercredi 26 octobre 2016  |  L`Observateur Paalga




Un jour après ce qu’on pourrait appeler les évènements de Kilwin, nous sommes retourné sur les lieux. Occasion d’échanger avec le voisinage et d’apprendre un peu plus sur le présumé recruteur de djihadistes abattu. Selon nos informations, il se prénommerait Ali et habitait dans une villa louée par son prétendu grand frère qui s’est présenté au bailleur comme un orpailleur du nom d’Issiaka Ouédraogo.

C’est sous un soleil brûlant que nous arrivons à Kilwin. Après une nuit agitée et une journée où ses habitants avaient l’impression d’assister en direct au tournage d’un film policier, la vie a repris son cours dans le quartier et surtout dans les environs du lieu où a été abattu le présumé terroriste. En cet après-midi, le coin est désert, ce qui détonne avec le fourmillement des badauds la veille. Mais dans les maisons, et dans les kiosques aux alentours, le principal sujet de discussion autour de la télé et du café reste le cadavre qui gisait il y a peu de temps devant leurs portes. Dans la zone qui était délimitée par le célèbre bandeau jaune : « Crime scene, do not cross », nous remarquons deux femmes. La première, assise sous un hangar où elle exerce son petit commerce, et la seconde, dans sa maison, non clôturée. Le regard de ces deux femmes semble converger vers un même lieu : une broussaille non loin, la dernière demeure du présumé terroriste pendant plusieurs heures. Nous nous approchons. A l’endroit précis où il gisait, la terre a été retournée. Des habitants du quartier ont recouvert de terre la mare de sang dans laquelle baignait le corps. Mais du sang séché reste toujours visible. Nous nous approchons d’une des femmes, mais elle élude nos questions : « Je n’ai rien vu, je n’ai rien entendu », dit-elle, un brin agacée. Sa maison étant à quelques mètres, elle est un témoin privilégié, mais une journée après ces péripéties, les langues ne se sont pas déliées. Nous revenons alors sur nos pas, pour prendre le chemin inverse de celui qu’a pris le suspect avant d’être abattu. Avec les traces noires laissées par le sang comme guide, nous parvenons à une autre cour. Juste à l’entrée, au coin du mur, nous apercevons une autre mare de sang. C’est là que le suspect s’est caché avant d’être repéré puis blessé par les forces de l’ordre. Au milieu de la cour, d’autres taches noires sur le sol, les murs portent encore les traces des balles. La maison est habitée par des jeunes. Eux aussi sont peu enclins à s’exprimer mais sur notre insistance un d’entre eux accepte finalement de témoigner sous l’anonymat. C’est avec une voix presque inaudible qu’il nous relate ce qu’il a vécu. Selon lui, aux premiers coups de feu ils étaient au lit, mais le groupe de jeunes étaient toujours éveillés. Ils n’ont pas compris vraiment ce qui se passait. « Nous avons eu peur, car on aurait dit qu’on tirait sur nous », explique-il. Ce n’est qu’au lever du jour qu’ils verront le cadavre qui gisait devant leur porte. Tous assurent connaître l’homme pour l’avoir aperçu parfois dans les parages. Comme eux, personne ne pouvait se douter de ses intentions. Mais foi de notre interlocuteur, le présumé recruteur de djihadistes n’aurait pas pu embrigader les jeunes de Kilwin : « S’il avait essayé, il n’aurait pas réussi. Aucun d’entre nous n’est assez fou pour agir de la sorte». Si le suspect, traqué, a trouvé refuge en ces lieux, c’est qu’il habitait juste derrière, à quelques maisons de là. Nous faisons donc un tour pour nous retrouver dans le 6-m du présumé djihadiste. Il fait face à une réserve. On ne peut y accéder qu’à pied. La cause, de part et d’autre, un barrage de troncs d’arbres a été installé par les éléments de l’Unité d’intervention de la police nationale (UIP). Après autorisation, nous parvenons à nous approcher d’un peu plus près pour observer avec curiosité la maison de l’homme à la grenade. Vu de l’extérieur, c’est une villa neuve peinte en violet. Elle jouxte une école maternelle. Des éléments de l’IUP montent toujours la garde devant la porte. Impossible d’avancer plus loin. Mais grâce à des témoignages que nous avons recueillis, on en sait encore plus sur l’homme et les habitants de cette cour.

Un locataire peut en cacher un autre

La première chose à savoir est que la maison où habitait le présumé terroriste est louée à 65 000 F le mois. Le bailleur étant une dame que nous appellerons Eulalie, pour préserver son anonymat. Auditionnée par la gendarmerie et contactée par L’Observateur Paalga, elle n’en revenait toujours pas, car ce n’est pas à l’homme abattu qu’elle avait loué la villa. Tout commence en mars 2016, lorsqu’Eulalie achève la construction d’une villa deux chambres salon. Elle propose la maison en location au prix de 70 000F, et confie la responsabilité de trouver un locataire à un habitant de Kilwin, elle-même n’y résidant pas. Les personnes intéressées trouvent la maison trop chère et il faut attendre juillet pour qu’un homme se présentant comme Issiaka Ouédraogo, orpailleur évoluant dans un pays voisin, se manifeste. Eulalie ayant demandé que le locataire soit marié, l’homme lui a assuré que sa femme viendrait le rejoindre plus tard. Ils tombent d’accord sur un loyer de 65 000 F et le présumé orpailleur paie cash trois mois d’avance. Depuis lors, Eulalie dit ne plus avoir remis les pieds dans la villa. Quelque temps après, le nouveau locataire va ensuite y amener son « petit frère », car ce dernier, habitant d’une zone non-lotie, aurait eu sa maison écroulée. Mais tout laisse croire que c’est le présumé petit frère, celui qui a été abattu, qui a toujours été le principal habitant de la cour. Issiaka Ouédraogo, lui, « était toujours en voyage ». La Mercedes verte qu’on a retrouvée dans la cour lui appartiendrait.


Un second mariage et une vie recluse

Tous les témoignages sont unanimes, « La dernière cour à droite » était toujours porte close. Ses habitants n’avaient aucune relation avec le voisinage. Le maître des lieux, qu’on voyait de temps en temps sortir sur une moto Spark 135, portait une barbiche. Il a refusé une fois de saluer une femme en lui annonçant qu’il était un wahhabite. Du linge était également étalé dans la maison, ce qui laissait penser qu’il y avait probablement au moins une femme et des enfants. Ces enfants seraient au nombre de deux : un garçon d’environ 12 ans et une fillette. C’est le premier qui effectuait toutes les courses, comme payer des unités téléphoniques. Un jour, brisant exceptionnellement le silence, l’homme va annoncer à un voisin au mois d’août, qu’il va prendre une seconde femme. Le mariage fut célébré sans « grand monde » et sans « aucun voisin » dans le courant de ce même mois. A l’occasion de cet évènement, il avait pris le fourneau d’un voisin qu’il tardait à restituer. Interpellé, le présumé djihadiste va faire rendre le fourneau par l’entremise de « deux femmes entièrement voilées ». Cependant, selon d’autres témoignages, la famille ne fréquentait pas la mosquée du coin. Et son voisin, l’imam du quartier, ne le connaissait pas lui non plus. « Peut-être qu’il fréquente un autre lieu de prière». A noter qu’une mosquée wahhabite se trouve dans le quartier, mais nous n’avons pas pu nous y rendre pour vérifier les propos de cet habitant.


L’homme abattu s’appellerait Ali Ouédraogo

Selon nos informations, la villa du présumé terroriste était dans le collimateur des forces de l’ordre depuis des mois. Et l’intérêt des enquêteurs aurait été suscité par un homme qui avait régulièrement ses habitudes dans la cour. Ce dernier, qui ne parlerait que dioula et arabe, entretiendrait des relations avec des personnes suspectes dans un autre quartier de Ouagadougou. C’est en suivant les traces de cet individu que les enquêteur sont remontés à cette maison à Kilwin et ont mené cette opération de la nuit du 22 au 23 octobre avec la suite qu’on connait. Nous avons appris que le dénommé Issiaka Ouédraogo s’appellerait plutôt Abdallah, sans qu’on puisse dire quel est son vrai nom de famille. L’homme abattu, quant à lui, se prénommerait Ali. Et on ne sait pas pour l’instant s’ils sont vraiment des frères. Mais sans doute que les enquêteurs sont déjà bien avancés là-dessus.

Hugues Richard Sama
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