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Le président Blaise Compaoré ne peut pas être jugé
Publié le lundi 3 octobre 2016  |  Sidwaya
Armand
© Autre presse
Armand Ouédraogo, Procureur général près la Cour de cassation




Le procureur général près la Haute cour de justice (HCJ), Armand Ouédraogo, a animé un point de presse à Ouagadougou, le vendredi 30 septembre 2016 pour faire le point des dossiers de l’insurrection populaire et du putsch manqué.

L’instruction des dossiers de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014 et du putsch manqué du 16 septembre 2015 ont fait l’objet d’une conférence de presse à Ouagadougou, le vendredi 30 septembre 2016. C’est le procureur général près la Haute cour de justice, par ailleurs procureur général près la Cour de cassation, le magistrat Armand Ouédraogo, qui a animé la conférence. Il avait à ses côtés le président de la Haute cour de justice, le député Mathieu Bèbrigda Ouédraogo. Les échanges avec les hommes de médias ont porté essentiellement sur le dossier Sidi Paré, ministre sous la Transition et celui de Blaise Compaoré et son dernier gouvernement, en rapport avec l’insurrection populaire. En ce qui concerne le dossier Sidi Paré, Armand Ouédraogo à, d’emblée, indiqué que l’instruction est terminée et que tous les éléments sont réunis pour le jugement. « Mais nous ne pouvons pas le faire parce que Sidi Paré est poursuivi devant la Haute cour de justice pour complicité alors que les auteurs principaux sont poursuivis devant le tribunal militaire », a-t-il fait savoir. De ce fait, a-t-il confié, sa structure doit attendre que la justice militaire juge d’abord les auteurs principaux, car si ces derniers venaient à être acquittés, les complices doivent l’être aussi d’office. Cette patience que doit observer la Haute cour de justice permettra d’éviter des décisions contradictoires entre les deux juridictions.
Le gros dossier, selon Armand Ouédraogo, est celui de l’insurrection populaire. Depuis un certain temps, foi du juge, sur commission rogatoire, il y a eu des interrogatoires à la gendarmerie à ce sujet. Après cela, les intéressés ont été entendus par la justice et inculpés. Il s’agit de 24 ex-ministres du dernier gouvernement de Blaise Compaoré, dont Luc Adolphe Tiao et Djibrill Bassolé. Selon ses dires, au cours de cette semaine, il y aura d’autres inculpations, notamment celles de Moussa Ouattara, Vincent Zakané, Jérémy Tenga Ouédraogo et Salif Ouédraogo. Ils viendront porter le nombre d’inculpés à 28 sur un total de 33. Pour les cinq autres, le procureur près la Haute cour de justice a affirmé qu’on n’a aucune nouvelle d’eux. Il a cité Blaise Compaoré (ministre de la Défense au moment des faits), Salif Lamoussa Kaboré, Lucien Marie Bembamba, Koumba Barry et Assimi Kouanda. Selon les explications du conférencier, en plus d’être poursuivi comme ministre de la Défense, Blaise Compaoré est appelé à répondre devant la justice en sa qualité de chef de l’Etat pour « haute trahison » et « attentat à la Constitution ». Mais, il y a blocage sur ce point parce que ces deux faits ne sont pas des infractions dans le droit positif, leurs éléments constitutifs n’étant pas définis. De ce fait, à entendre Armand Ouédraogo, il est difficile pour le juge de traiter le dossier. « Il y a à ce niveau un problème d’achèvement de la loi. La trahison tout court existe dans la Constitution mais pas la haute trahison. Ainsi, ce dossier ne peut pas être exécuté car nul ne peut être jugé et puni qu’en vertu d’une loi antérieurement définie», a-t-il étayé. Il estime d’ailleurs que le dossier n’a pas été suffisamment muri avant la mise en accusation. Quelle méthode adopter pour un aboutissement de ces dossiers « sensibles »? Cette fois-ci, il n’est pas question d’émettre des mandats d’arrêt en amont. Trois raisons expliquent cette décision. La première est que l’émission de mandat d’arrêt va entrainer une lenteur dans le traitement du dossier. La deuxième est que la plupart des ministres concernés sont présents, y compris le chef du gouvernement de l’époque. La dernière raison évoquée par le procureur général près la Haute cour de justice est qu’il n’y a aucune garantie que les personnes recherchées seront effectivement extradées. Par conséquent, les mandats d’arrêt interviendront après le jugement, selon M. Ouédraogo. Il a continué pour expliquer que lorsque les inculpations seront terminées (probablement au cours de cette semaine), les interrogatoires au fond seront entamées et les auditions pourront être terminées d’ici fin octobre.

Revoir la loi dans la nouvelle Constitution

Ces auditions concerneront d’abord les prévenus présents. Après eux, le juge passera aux citations à comparaître pour les absents. Ceux qui ne se présenteront pas à ces citations à comparaître seront inculpés et poursuivis au même titre que les autres. Une fois les décisions rendues, l’on pourra maintenant parler de mandat d’arrêt. Cependant, le juge Armand Ouédraogo a précisé qu’ « on ne peut pas donner une date précise dans le traitement de ce genre de dossier mais dans un délai de trois mois, ces affaires devraient être jugées ». Il a continué pour relever des défaillances se rapportant à la loi applicable par la Haute cour de justice. Des insuffisances qui, à son sens, porteraient entrave à la justice. Il a évoqué par exemple la disposition de cette loi qui dit que pour que le chef de l’Etat soit jugé et puni, il faut que les 4/5 des députés donnent leur accord et celle qui stipule que pour mettre un ministre en accusation, il faut l’accord des 2/3 des députés. Pour lui, « avec ces conditions, dans une démocratie normale, on ne peut pas juger un ministre ou le chef de l’Etat ». Il plaide donc pour que ces textes soient revus dans la nouvelle Constitution. En ce qui concerne les dossiers de crimes économiques, l’animateur de la conférence de presse a fait savoir qu’ils seront déclassés pour être jugés après ceux du putsch manqué et de l’insurrection populaire qui paraissent plus urgents. Par ailleurs, il a rappelé que la liberté provisoire est un droit fondamental pour tout détenu et que la population doit comprendre cela et ne pas demander systématiquement des explications au juge quand ça arrive. Que doit-on inscrire concrètement dans les textes pour que Blaise Compaoré puisse être jugé en tant que chef de l’Etat ? Pourquoi Luc Adolphe Tiao qui est revenu de lui-même de son exil a été arrêté et déposé à la Maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou (MACO) alors qu’il s’est montré disposé à répondre devant la justice ? Quelles sont les peines possibles à la Haute cour de justice ? Ce sont, entre autres, les questions des journalistes à l’endroit du conférencier. En réponse à la première question, Armand Ouédraogo a fait comprendre que les députés qui votent les lois savent ce qu’il faut comme contenu à la « haute trahison » et à l’ « attentat à la Constitution ». Sur la deuxième question, il a rétorqué que M. Tiao a été déposé à la MACO pour sa propre sécurité. En plus, s’il est libre, il peut entrer en contact avec les témoins, afin de brouiller les pistes de l’enquête. Sur la dernière question, il a fait savoir qu’il s’agit de peines criminelles qui vont de cinq ans à la peine de mort. La Haute cour de justice a compétence uniquement pour les affaires concernant des personnes ayant qualité de ministre. Les dossiers du putsch manqué et de l’insurrection populaire sont les deux premiers auxquels elle s’attaque. Après son jugement, ceux qui demanderont réparation devront aller devant les juridictions de droit commun, à savoir le Tribunal de grande instance (TGI) ou le tribunal administratif, selon que les infractions sont commises par des civils ou que c’est l’Etat qui est responsable des dommages subis.


Daniel ZONGO
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